Après l’inarrêtable tsunami qui s’est infiltré dans la majorité des CHSLD de Montréal durant la première vague, le réseau de santé local a dû rapidement se reconstruire. En pleine deuxième vague, les établissements de la métropole croient avoir «appris de leurs leçons».
En date de mardi, à Montréal, huit CHSLD faisaient face à des éclosions de COVID-19. C’est moins de 15% du total de ces centres d’hébergement, par rapport à 75% à un certain moment lors de la première vague. Aucun des 12 établissements identifiés comme «critiques» ou «sous haute surveillance» par le ministère de la Santé et des Services sociaux ne se trouve dans l’agglomération métropolitaine.
De l’autre côté de l’autoroute 20, à Québec, le portrait est plus sombre. Sept CHSLD font face à des éclosions. Trois sont considérés comme critiques. Pourtant, dans la Capitale-Nationale, on compte deux fois moins de centres de soins pour aînés qu’à Montréal.
L’agglomération de Montréal n’est pas épargnée pour autant. Au moment d’écrire ces lignes, 53 personnes étaient atteintes de la COVID-19 dans des CHSLD de la région. Or, c’est 70 de plus dans la capitale et 50 de plus dans l’ensemble de la Montérégie.
«Ça ne fonctionnait pas»
Le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal aurait difficilement pu encaisser le coup plus difficilement que le printemps dernier. Sur les 17 CHSLD de son territoire, pas moins de… 17 ont fait face à des éclosions.
«La bête, on ne la connaissait pas, admet sans détours la directrice adjointe de l’hébergement
au CIUSSS du Centre-Sud, Isabelle Matte. On a commencé à combattre ce virus-là de la même façon qu’on le faisait pour d’autres. Et ça ne fonctionnait pas.»
Il a fallu refaire le cahier de jeux, convient cette gestionnaire. «On a énormément appris», souligne-t-elle.
Depuis le début de la deuxième vague, c’est du dépistage hebdomadaire systématique, affirme-t-elle. La première semaine, les résidents des chambres impaires passent un test. La seconde, c’est au tour des pairs.
S’ajoute à cela un meilleur respect des procédures par le personnel, constate Mme Matte. Depuis cet été, l’autorité de santé régionale a reçu 700 nouveaux préposés aux bénéficiaires formés expressément par le provincial pour éviter le drame de la première vague. Ces employés viennent palier le départ d’une centaine d’autres préposés du CIUSSS depuis mars 2020.
«On a beaucoup de surplus. On n’a aucune mobilité entre les sites», assure Mme Matte.
«Quand on manque de monde, les employés se dépêchent et ne mettent pas en place les meilleures pratiques. S’habiller, se déshabiller, se laver les mains. Tu ne le fais pas s’il manque de personnel.» – Isabelle Matte, directrice adjointe de l’hébergement au CIUSSS du Centre-Sud
Action-réaction
Comment procéder quand un résident attrape la maladie? C’est un des points prévus dans la stratégie de gestion de risque du réseau.
Cet automne, chaque centre d’hébergement a identifié une «zone rouge» à l’interne. C’est vers ces zones qu’on achemine les résidents s’ils testent positif.
«Ce qui est nouveau, c’est qu’on a gardé des lits libres», constate Isabelle Matte. Triste constat: une partie de ces lits ont été laissés vacants après les nombreux décès enregistrés au printemps.
Toujours est-il qu’aujourd’hui, une personne envoyée dans la zone rouge bénéficie de son «personnel dédié». Pas question de la laisser à elle-même, indique la gestionnaire.
Une recette pour tous?
Confrontés au nombre important de cas enregistrés dans les CHSLD de leurs territoires, ni le CIUSSS de la Capitale-Nationale, ni le CISSS de la Montérégie-Centre n’ont accepté de nous accorder une entrevue. Chacun s’est contenté de répondre par écrit.
«Lorsqu’une éclosion survient au sein d’un milieu de soins, une offensive soutenue est lancée par le CIUSSS», a-t-on indiqué dans la Capitale-Nationale, où 250 places auraient été réservées pour accueillir des personnes infectées.
En Montérégie-Centre, où quatre CHSLD gèrent des éclosions, on affirme suivre «la situation de très près». «Nous voyons à ajuster nos interventions en adéquation avec l’évolution de la situation», a écrit la conseillère-cadre aux relations avec les médias du CISSS, Martine Lesage.
Isabelle Matte soutient que les communications interrégionales sont constantes pour que le succès – fragile – de Montréal lors de cette deuxième vague se répète ailleurs.
«C’est sûr que tant qu’on l’a pas expérimenté, ce virus-là, c’est dur d’en saisir la portée», convient-elle.