Implanté dans sa communauté depuis près de 70 ans, le centre commercial Le Boulevard sera vraisemblablement rasé pour laisser place à une future station de la ligne bleue du métro. Sa disparition du paysage sème toutefois une inquiétude pour les personnes vulnérables des environs.
«Ça va déplacer l’achat, mais ça va surtout affecter ceux qui magasinaient local. Le monde qui habite le quartier, qui était habitué à y aller, et les personnes âgées qui ne peuvent pas marcher», déplore Paul Micheletti, président de la société de développement commercial (SDC) Jean-Talon.
Ce dernier se désole de la perte du centre commercial, un établissement qui occupe un rôle névralgique dans le secteur. Il s’attriste également pour les commerçants qui avaient investi pour s’y installer.
«Le centre était là parce qu’il y avait un besoin dans ce secteur. On perd des marchands qui étaient là depuis longtemps. Je ne sais pas ce qui va apparaître une fois que tout sera refait», ajoute-t-il.
Le Boulevard laissera éventuellement sa place au projet de prolongement de la ligne bleue. Dans les plans originaux de la STM, seule une partie du stationnement devait servir pour les futures infrastructures. C’est à la demande de ses propriétaires que l’expropriation entière du Boulevard sera réalisée. À la veille de Noël, ceux-ci ont également avisé les locataires de l’éventuelle fermeture du centre commercial.
Lieu de socialisation
Construit en 1953, le centre commercial Le Boulevard est l’un des plus anciens au Québec. Abritant notamment un supermarché, une pharmacie, une quincaillerie et plusieurs succursales de détaillants connus, le centre Le Boulevard est bien apprécié des résidents du secteur.
«C’est tout le temps plein de personnes âgées. C’est aussi un lieu de socialisation pour eux. Je pense également aux résidences aux alentours. J’ai l’impression que beaucoup y aménageaient pour la proximité», souligne Johanne Pitt, directrice du Centre des aînés du réseau d’entraide de Saint-Léonard.
Elle rappelle qu’une fois le centre commercial disparu, les résidents perdront un lieu de rencontre. Le centre commercial le plus près sera alors le Carrefour Langelier, situé à plus de 3 kilomètres de là.
«Ça aura un impact; les aînés vont perdre des commerces qui sont essentiels pour eux. Dans quelle mesure ça aura des répercussions, c’est difficile à dire», ajoute-t-elle.
Christine fait partie de ces habitués du Boulevard. Depuis une trentaine d’années, elle y vient de temps en temps faire des achats et socialiser. Malgré la COVID, elle a gardé l’habitude de venir occasionnellement y prendre son café et y faire des emplettes.
«Avant la pandémie, je venais ici presque tous les jours. On se rencontrait pour manger ensemble. Il y a beaucoup de monde à qui ça fera de la peine», se désole-t-elle.
Pour sa part, Gérard s’y rend en voiture chaque semaine depuis 25 ans. «Je ne sais pas ce que je vais faire si ça ferme. Je viens y faire mon épicerie et prendre mon café», explique l’octogénaire.
«Ça me dérange beaucoup. J’habite dans le coin et je viens régulièrement [depuis] 25 ans, explique Louise. J’espère qu’ils vont faire quelque chose pour le remplacer.»
Occasion de développer
Conseiller de ville à Saint-Léonard, Dominic Perri ne partage pas, outre mesure, ces craintes face à l’éventuelle disparition du centre commercial. Il y voit plutôt une opportunité pour développer le secteur, qui sera le point de convergence de la ligne bleue et du SRB Pie-IX.
«Je pense que c’est un endroit où on pourrait avoir un pôle d’emploi incroyable», entrevoit-il, en mentionnant l’idée d’y faire des tours à bureau.
«C’est toujours intéressant d’avoir des commerces, mais si on peut les remplacer par quelque chose de mieux, de plus intéressant… Ça ne veut pas dire que dans le nouveau développement, il n’y aura pas quelques commerces de proximité.»
Il rappelle en outre que l’arrondissement organisera prochainement une série de consultations pour réaménager la rue Jean-Talon dans le cadre de la venue de la ligne bleue.