«On ne veut pas d’un quartier sec.» Au Comité social Centre-Sud (CSCS), jusqu’au 14 février, on peut signer des cartes qui seront remises au ministre de l’Éducation. Elles visent à lui rappeler la raison d’être de cet organisme.
Depuis 49 ans, le CSCS fait œuvre utile auprès d’une population précarisée. Il offre des services répondant à des besoins de base: des repas à 3$ et des vêtements à 0,50$, et même un service de soutien pour les déclarations d’impôts. On y trouve aussi des ateliers éducatifs d’écriture, d’arts et de cuisine, en plus d’un volet de lutte dans lequel des sujets politiques sont vulgarisés, comme ceux liés à la gentrification des quartiers centraux.
Depuis plusieurs années, cet organisme a dû pourtant mener plusieurs batailles pour survivre. Faute d’engagement à long terme de la part du gouvernement, les démarches pour boucler le budget sont à recommencer sans cesse. Et plutôt que de pouvoir mettre toute leur énergie dans le soutien à la population du secteur, les travailleuses et travailleurs sont contraint.es de chercher de l’argent.
La pression est d’autant plus forte que les coûts liés au bâtiment, qui étaient jusque-là pris en charge par la Commission scolaire de Montréal, devront être assumés par l’organisme à partir de 2022. Les cartes adressées au ministre font partie d’une grande mobilisation qu’effectuent les six centres d’éducation populaire de Montréal (InterCEP).
Sans surprise, tous sont fragilisés et essoufflés.
Dans le Centre-Sud, des personnes témoignent que «le lieu brise l’isolement», qu’il est «anti-déprime». Une personne écrit que «ça [lui] permet de manger et de [s]’habiller» et une autre ajoute que «le comité social, c’est comme une famille et que c’est important quand je fais des crises de panique».
Essentiel. Vital. Une vraie de vraie bouée.
Cet espace n’est pas accessoire dans la vie des résidants du quartier, et le travail que font ces organismes n’est pas optionnel dans notre société.
Le fait qu’ils soient en difficulté est une conséquence des priorités douteuses établies par le gouvernement québécois, comme le précédent gouvernement libéral, qui n’y est pas allé de main morte avec les coupes budgétaires. Mais cette situation parle aussi du fonctionnement général de nos sociétés, dans lesquelles, trop souvent, les plus marginalisés sont perdus de vue.
Récemment, le premier ministre François Legault disait suivre «de très près» la situation de la multinationale Bombardier. Imaginez une telle préoccupation pour les organismes communautaires.
Récemment, le premier ministre François Legault disait suivre «de très près» la situation de la multinationale Bombardier. Imaginez une telle préoccupation pour les organismes communautaires.
Mais on répète depuis longtemps que ce milieu est tenu pour acquis. «Ils ont la main sur le cœur», dit-on, alors on suppose qu’ils feront le boulot requis, qu’on les finance bien ou pas. En réalité, celles et ceux qui y travaillent sont sans cesse poussés à bout et risquent l’épuisement professionnel.
Face à la situation du Comité social Centre-Sud, les bailleurs de fonds disent de rentabiliser les espaces. Comment, au juste? En augmentant le prix des repas? En coupant dans les ateliers pour payer le chauffage? Ou bien en augmentant le prix des locaux hébergeant des organisations qui n’auraient dès lors plus les moyens d’avoir pignon sur rue? C’est toute la structure qui serait fragilisée.
Avec les surplus budgétaires extravagants que parvient à dégager Québec depuis quelque temps, on a du mal à comprendre que des organismes comme le Comité social Centre-Sud doivent se battre pour combler les trous que l’État a creusés dans leurs finances.
Qui suivra «de très près» la situation du réseau InterCEP?
Après tout, ces oasis urbaines sauvent des vies.