La première ministre du Québec, Pauline Marois, ne fait pas campagne sur la souveraineté du Québec. «Nous allons en élection sur le programme du gouvernement», a-t-elle insisté. Celle qui croit dur comme fer pouvoir se faire réélire le 7 avril entend malgré tout déposer un livre blanc sur l’avenir du Québec, qui annoncera les intentions – déjà bien connues – du Parti québécois. Métro a passé en revue avec Mme Marois quelques-uns de ses engagements.
Où se situe votre projet d’indépendance du Québec dans vos priorités?
Pour l’instant, nous allons en élections sur le programme du gouvernement qui concerne l’emploi, l’économie – on est très fiers d’avoir recruté un candidat de la trempe de Pierre Karl Péladeau qui va nous donner un solide coup de pouce –, la culture et la santé. Mais, ce n’est pas une élection sur la souveraineté. Pour ce qui est de l’avenir du Québec, nous avons l’intention de déposer un livre blanc sur l’avenir du Québec qui permettra d’avoir un débat et de consulter les Québécois. On ne bousculera pas les Québécois dans ce débat.
Un enjeu important pour la métropole, c’est la charte de la laïcité. Elle ne fait pas l’unanimité à Montréal. Comment pensez-vous rallier tout le monde?
Notre intention, ce n’est pas que les gens perdent leur emploi. Il y aura une période de transition, il y aura une période où on essaiera de trouver des solutions avec les gens concernés. Je suis persuadée qu’on est capable de trouver des voies de passage. Cependant, je vais être claire avec les Montréalais, cette charte, lorsque nous serons réélus, va suivre son cours et elle sera adoptée. Est-ce qu’il y aura des modifications et des ajustements? C’est toujours possible. La loi n’est pas encore définitive. Mais pour l’essentiel, honnêtement, il n’y aura pas de changement de cap. C’est important pour moi.
Quand on questionne les Néo-Québécois qui viennent de partout à travers le monde, plusieurs d’entre eux partagent notre point de vue sur la charte parce qu’ils ont choisi le Québec à cause de sa liberté. La liberté d’expression religieuse et les convictions des gens, on ne les remet pas du tout en question, ni leur droit de pratique, ni leur droit de s’exprimer librement dans l’espace public, ni de porter les vêtements qu’ils veulent dans l’espace public. On ne touche pas à cela. Au contraire. On est très respectueux du choix de gens. Parce qu’on est respectueux, on croit que l’État doit être neutre et la base sur laquelle on proposera des guides pour adopter des accommodements, ce sera sur la base du respect de l’égalité entre les hommes et les femmes qui est une valeur absolument fondamentale, intouchable et sur laquelle jamais nous ne céderons.
Sur le plan économique, Montréal a vu plusieurs sièges sociaux la quitter et son taux de chômage est plus élevé que la moyenne québécoise. Qu’est-ce que le gouvernement du Québec peut faire pour l’aider?
Nous nous sommes engagés à changer les règles de l’actuariat des entreprises pour nous assurer que nos sièges sociaux puissent demeurer au Québec. On a l’intention de changer la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec pour qu’elle soutienne davantage nos entreprises et les encourage à conserver leurs sièges sociaux ici. On ne leur demande pas d’investir à perte, mais on a de grandes entreprises qui sont de véritables fleurons de l’économie québécoise. La caisse peut investir dans ces entreprises pour consolider leurs activités au Québec.
Dans notre politique d’emploi, l’un des volets est l’électrification des transports. Évidemment, Montréal est privilégiée pour mettre en place des transports électrifiés sur certaines voies. On pense évidemment au boulevard Saint-Michel, par exemple, et le métro de Montréal qu’on veut pouvoir prolonger. Ce sont des éléments qui peuvent avoir des impacts considérables sur Montréal. Nous avons aussi une politique de recherche et d’innovation. Comme beaucoup de nos centres de recherche dans nos universités sont dans la métropole, là aussi, ça va avoir un impact. C’est sûr que ce ne sera pas un impact immédiat en terme d’emplois, mais à moyen terme, c’est drôlement structurant pour notre métropole.
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Jusqu’à quel point êtes-vous prête à accorder des pouvoirs à la métropole et à lui donner un statut particulier?
Nous considérons que Montréal a déjà un statut particulier de métropole par le fait que nous avons un ministre responsable des relations avec Montréal et une personne désignée à titre de sous-ministre de la métropole, dont l’essentiel de la fonction consiste à coordonner tous les programmes et à faire une concertation avec les décideurs montréalais, avec le maire de Montréal et l’ensemble des élus sur l’île de Montréal. Dans ce sens-là, il y a déjà une approche qui est propre à Montréal et qui est différente de ce qui est fait dans le reste du Québec.
Par ailleurs, sur la question de donner de nouveaux moyens aux villes, je vous dirais que c’est un débat qui a cours actuellement et qui reprendra au début du mandat pour convenir de nouvelles ententes avec les municipalités, de nouveaux moyens que les municipalités pourraient bénéficier pour assurer leur développement.
Avant le déclenchement des élections, deux projets de loi ayant un impact sur Montréal n’ont pas été adoptés, soit celui de l’inspecteur général et celui sur la restructuration des régimes de retraite. Si vous êtes reportée au pouvoir, allez-vous mettre rapidement ces projets de loi à l’agenda de l’Assemblée nationale?
Oui. La loi sur l’inspecteur général a été déposée, débattue et elle sera reprise là où on l’avait laissée. Le maire Coderre était particulièrement satisfait de ce que nous avons présenté. Notre intention, c’est d’aller dans ce sens-là.
Pour ce qui est des régimes de retraite, on a déposé un projet de loi qui amène les partenaires à travailler ensemble. Et même si on est en élections, ils peuvent continuer à travailler ensemble pour arriver à des consensus. Notre intention, c’est de proposer des solutions, mais nous pensons que les meilleures solutions viendront de ceux et celles qui sont concernés: l’administration municipale et les représentants des syndicats. Québec s’engage à respecter les consensus qui s’établiraient ou sinon à trouver des solutions si jamais on n’arrivait pas à s’entendre.
Montréal a d’importants défis liés au transport en commun, tant pour l’entretien de ses infrastructures que pour le développement de son réseau. Le ministre Sylvain Gaudreault a déjà annoncé la tenue d’un chantier de réflexion, mais avez-vous déjà en tête des solutions concrètes pour régler le problème de sous-financement?
Pour l’instant, on n’a pas arrêté l’ordre des moyens. On a fixé des objectifs. Entre autres, ce que l’on veut, c’est d’augmenter de 30% l’offre du transport collectif à Montréal d’ici 2020. On a adopté une stratégie de mobilité durable qui a été annoncée par Sylvain Gaudreault quelques semaines après la rentrée de 2014. Il avait fait une longue consultation à l’automne et je crois que les gens se sont montrés très satisfaits. Maintenant, on va travailler sur les moyens pour atteindre nos objectifs.
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Questions en rafale
- Qu’est-ce que vous aimez des campagnes électorales? J’aime presque tout, mais j’aime surtout rencontrer les gens sur le terrain.
- Votre plat préféré en campagne? Du poulet. On en trouve partout, en salade, rôti, grillé, en sandwich.
- Quel livre lisez-vous en campagne? Je suis en train de terminer la Trilogie berlinoise de Philip Kerr.
- Quel est votre rituel pour tenir le coup en campagne? Je me lève entre 5h et 6h. Je fais 30 minutes de marche et 15 minutes d’exercices. Après, je prends un bon petit déjeuner et je pars pour la journée.
- Votre mentor? Mme [Lise] Payette en a été une.
- Un mot pour décrire le nouveau maire Denis Coderre? C’est un homme qui est franc, avec qui j’aime beaucoup travailler.
Cette semaine
Métro présente cette semaine une entrevue par jour avec les chefs des principaux partis de cette campagne électorale provinciale.
- Lundi: Philippe Couillard
- Mardi: Françoise David et Andrés Fontecilla
- Mercredi: François Legault
- Jeudi: Pauline Marois
- Vendredi: Sol Zanetti