Il n’en rate pas une et les travers de nos vedettes ont souvent passé avec lui un sale quart d’heure. Il en est convaincu, Marie-Mai et Marilou «souhaitent [sa] mort ensemble». Aujourd’hui, avec son premier one man show, Jean-Sébastien Girard prête flanc à la critique à son tour.
L’homme de l’heure (sa myriade de projets pour la prochaine année a de quoi donner le tournis, on vous les énumère plus loin) l’avoue candidement: il est conscient qu’Un garçon pas comme les autres, dont le rodage s’amorcera en grande pompe à l’automne en vue d’une rentrée montréalaise en mars 2023,pourrait ne pas être «le succès de [sa] vie». Et il espère, évidemment, secrètement le contraire. Car, une fois qu’on a brillé sous la lumière d’un succès comme celui de La soirée est (encore) jeune – et pendant une décennie –, on n’a pas envie de retourner dans l’ombre…
«J’aimerais ne jamais être l’objet d’une chronique de type Que sont-ils devenus, admet Jean-Sébastien Girard, sourire aux lèvres, lové dans un fauteuil d’une loge du cabaret Le Bordel. Quand j’étais recherchiste, j’en ai fait des dossiers sur ceux qui ont existé puis disparu. Je n’aimerais pas dire à un journaliste que je fais maintenant du jardinage. J’aimerais rester dans la lumière, et je l’assume totalement. C’est le fun, la lumière!».
Amour et autodérision
Il faut dire que les projecteurs ont irradié fort sur le rendez-vous final de La soirée…, le 8 mai dernier. Jamais, au grand jamais, Jean-Sébastien Girard et ses comparses Jean-Philippe Wauthier, Olivier Niquet et anciennement Fred Savard n’auraient pu anticiper que leur émission «extrêmement nichée», «super underground» du vendredi soir – à laquelle n’assistait alors qu’une poignée d’étudiants universitaires dont ils connaissaient les noms par cœur – deviendrait un tel monument de radio et de culture populaire.
«Robert Lepage nous a envoyé une couronne mortuaire, signale Jean-Sébastien pour illustrer l’ampleur du phénomène, qui le dépasse encore lui-même. Voyons, que Robert Lepage nous envoie des fleurs! On a été comme trois gamins qui réalisaient à peine qu’ils envoyassent chier Nathalie Petrowski [en pleine face, au micro] sur qui ils trippaient pourtant dans leur jeunesse…».
Jean-Sébastien Girard est un ex-étudiant en théâtre – de son propre aveu «pas bon» – devenu recherchiste, qui rêvait de mener des reportages «très dark» aux soins palliatifs des hôpitaux pour enfants. Puis, il a été remarqué par Dominique Poirier dans les coulisses de L’après-midi porte conseil, où la grande dame de l’information lui a prédit que son destin professionnel se tracerait droit devant lui le jour où il assumerait son côté comique. Et il est devenu «quelqu’un» grâce à La soirée. Il le sait, le dit et le réitère souvent.
Il est devenu ce personnage caustique, capable de décocher une bitcherie virulente à l’endroit de Josée Boudreault et son AVC. Et qui, paradoxalement, vénère les chanteuses parfois considérées comme «quétaines» des années 1980, à la Johanne Blouin et Marie-Denise Pelletier, dorlote sa maman vieillissante et fait un malheur auprès des personnes âgées. «Un gars baveux qui aime les grand-mères», en somme, comme il aime se définir.
«Je suis quelqu’un de fondamentalement gentil, bienveillant, qui s’intéresse aux autres, mais aussi baveux. C’est ce qui fait que les gens ont accepté cette convention: ils ont rapidement vu une espèce d’humanité derrière ce personnage de gars baveux, mais pas méchant. J’avais une licence pour dire des énormités, parce qu’on savait que, venant de moi, ce n’était pas mesquin. Les gens sont généralement bons joueurs.»
Jean-Sébastien Girard, en entrevue avec Métro
Sauf Marie-Mai et Marilou, remémorions-nous plus haut.
Une critique acerbe du concert de la première au Centre Bell, en février 2019, et il était attaqué de toutes parts sur les réseaux sociaux par des hordes de fans en délire de la chanteuse, qui l’a bloqué sur toutes les plateformes sociales. Ses souvenirs de l’origine du froid avec Marilou sont plus flous – il mentionne une entrevue qui aurait mal tourné –, mais il sait que la créatrice de Trois fois par jour avait par la suite exigé de ne plus se retrouver sur les mêmes plateaux télé que lui.
«L’autodérision me séduit, oppose Jean-Sébastien. C’est une grande manifestation d’intelligence de savoir rire de soi. C’est la base. Et les personnes ci-haut mentionnées en font cruellement manque…(sourire)».
Envie de bienveillance
Et La soirée… a fait de lui une célébrité, à un point tel que Juste pour rire lui a offert le luxe d’un one man show. Rien de moins. Le gaillard de 46 ans (47 le 24 juin), qui avait pourtant déjà promis qu’aucune expérience du genre ne découlerait de ses années à la radio, a donc promptement refusé la proposition à la première discussion, puis a consenti à se lancer en prévenant qu’il n’est pas Louis-José Houde. Ça tombe bien, lui a-t-on répliqué, c’est Jean-Sébastien Girard qu’on veut.
Le synopsis d’Un garçon pas comme les autres, qui évoque un «weirdo en permanente», une «superstar de salon qui rêvait de signer des autographes et qui finalement se faisait pitcher des sandwichs au baloney», laisse entendre qu’il y aura un petit côté «Janette» à son tête-à-tête avec le micro. Jean-Sébastien Girard, qu’Olivier Niquet a comparé à «un mélange de Serge Laprade et de Mike Ward» lors de leur récent passage à Tout le monde en parle, concède en effet en riant qu’il est «de plus en plus Serge Laprade que Mike Ward».
«J’ai cette prétention d’espérer que les gens soient touchés, bouleversés, qu’il y ait une réflexion, même si ça reste un spectacle d’humour. J’essaie de trouver une certaine dramaturgie, en sachant très bien que je ne suis pas Michel Tremblay. Mais je veux créer des petites zones, des moments. J’ai des extraits de livres et de pièces qui me touchent, qui appuient mon propos.»
Si vous l’aimiez à La soirée…, vous aimerez Un garçon pas comme les autres, résume Jean-Sébastien. «Et si je vous tombais sur les nerfs, ne venez pas voir le spectacle!».
Une tonne de projets
Jean-Sébastien Girard sera de nombreuses tribunes dans les prochains mois.
-Dès l’automne, on pourra l’applaudir un peu partout au Québec alors qu’il rodera en salle le matériel d’Un garçon pas comme les autres. Sa rentrée montréalaise est prévue les 14 et 15 mars 2023, à l’Olympia (avec supplémentaires les 19, 20 et 21 avril). Son calendrier complet est disponible sur son site Web.
-Du 25 août au 5 septembre, il présentera dans quelques régions le spectacle JS Tendresse, qui s’inscrit dans la série Les arts d’été. S’inspirant de son émission de radio du même titre, le concept prendra la forme d’un jukebox d’où résonneront petites et grandes chansons populaires des années 1970 à 2000. Johanne Blouin, Joe Bocan, La Compagnie Créole, Léandre, Herbert Léonard, Marie-Denise Pelletier et Martine St-Clair se joindront à Jean-Sébastien dans cette grande réunion nostalgique.
-Jean-Sébastien Girard, Jean-Philippe Wauthier et Olivier Niquet goûteront à leur propre médecine comique lors du Roast de La soirée est (encore) jeune, présenté le 21 juillet prochain, à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, dans le cadre du festival Juste pour rire. Le bien-cuit, dont l’identité des invité.e.s est toujours gardée secrète, sera animé par Maude Landry, Suzie Bouchard, Élise Guilbault et Anne-Marie Cadieux, dans une mise en scène de Brigitte Poupart.
-Enfin, Jean-Sébastien Girard n’abandonne pas la radio et ICI Première pour autant. À l’automne, il ira régulièrement faire des saucettes à La journée est (encore) jeune (en semaine, de 13h à 13h30, dès le 5 septembre) auprès de ses complices de La soirée… Puis, le dimanche, de 17h à 18h, il sera à la barre de Jeannot BBQ, où il fera la fête à un.e convive choisi.e, en explorant sa vie et son œuvre avec humour, devant public.
Métro remercie chaleureusement le cabaret Le Bordel pour son aimable collaboration à cet article.
Jean-Sébastien Girard, à propos de…
Son deuil de La soirée est (encore) jeune
«La première semaine, je me sentais comme en peine d’amour. Je ne faisais rien. J’étais roulé en boule. La fin de La soirée… me faisait mal physiquement, pour vrai. On recevait des photos de l’événement, je les regardais, et j’avais l’impression de regarder des photos de mes ex. On se définissait beaucoup en tant que gars de La soirée… Avant, quand j’allais dans un souper plate, je me disais que j’aurais quelque chose à raconter à l’émission; maintenant, quand je vis une soirée plate, elle est juste perdue (rires).»
Ses premiers pas comme stand-up
«J’entreprends ce projet avec beaucoup d’humilité. Je vois aller les humoristes, je vais dans les comédies clubs, j’assiste à des premières parties, je vois le travail qu’ils font et je sais que je n’ai pas fait cette école. Je sais écrire une blague dans un contexte radiophonique, avec deux amis qui sont là pour m’appuyer et rire si elle tombe à plat, mais je n’ai pas fait de bars. C’est sûr qu’il y a un côté de moi que ça terrorise.»
Ses inspirations en humour et en animation
«Christiane Charette est encore mon idole à ce jour. Je l’écoutais quand elle faisait sa quotidienne à la télé dans les années 1990. Je la trouvais extraordinaire, avec sa spontanéité, son intelligence… Marie-Louise Arsenault me fascine dans sa façon de livrer des entrevues. À Dans les médias, ce qu’elle fait, c’est de l’art, de la dentelle. Quand j’étais petit, c’était les chanteuses, les animateurs. J’allais assister à De bonne humeur, avec Michel Louvain, à Casse-tête, un quiz avec Guy Fournier et Louise Deschâtelets, et je trippais sur Louise Deschâtelets. Un peu comme Éric Salvail, avec qui je revendiquais une certaine parenté, il y a quelques années… à quelques exceptions près! (rires)».