Sur les réseaux sociaux, des auteurs se montrent sceptiques devant la décision de l’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ) de réclamer dans un avenir imminent des cotisations syndicales de 2,5 % aux membres et de 5 % aux non-membres sur leurs droits d’auteur, décision rapportée par Le Devoir.
Celle qui a fait paraître en octobre dernier son roman La reine de rien, Geneviève Pettersen, évoque notamment dans une publication les maigres revenus que perçoivent les écrivain.e.s au Québec, « qui sont en bas de la chaîne alimentaire du livre ».
Avec l’adoption de la nouvelle loi sur le statut de l’artiste (qui définit les artistes comme des entrepreneurs indépendants) en juin 2022, l’UNEQ « peut désormais négocier des ententes collectives au nom des écrivaines et des écrivains », indique le syndicat dans un communiqué de presse sur son site.
Son nouveau plan stratégique de 2023-2027 « devra permettre de surmonter les obstacles potentiels qui se mettront sur son chemin », peut-on lire.
« La Loi n’oblige pas les éditeurs à être membre d’une association professionnelle, et beaucoup ne le sont pas. Il nous faudra donc multiplier les avis de négociations pour espérer toucher toutes les maisons d’édition à moyen terme », déclare dans le communiqué le directeur général de l’UNEQ, Laurent Dubois, pour qui « il est indispensable que les autrices et les auteurs puissent enfin être protégés par des ententes collectives négociées de bonne foi et dans un état d’esprit de dialogue et de progrès social ».
Cette protection s’appliquera de manière égale à l’intégralité des écrivain.e.s, traducteur.rice.s et illustrateur.rice.s, peu importe le genre littéraire (roman, livre de recettes, poésie, essai…), que l’ouvrage soit autoédité ou non.
Étonnement
Si cette décision a pris des gens au dépourvu, c’est notamment à cause de « la précipitation avec laquelle, dans ce cas-ci, les choses se sont faites : l’information n’a pas eu le temps de circuler, les discussions se tiennent à la va-vite sur les réseaux sociaux, et tout cela donne à plusieurs un sentiment de surprise désagréable », écrit l’auteur, critique littéraire et professeur de littérature David Dorais dans un courriel envoyé à Métro.
Par ailleurs, le fait que le procès-verbal de l’assemblée générale ayant mené à la résolution sur les cotisations « est dur à trouver » contribue à la grogne, affirme à Métro une source dans le milieu littéraire, corroborant une question soulevée dans la publication de Geneviève Pettersen.
Selon cette même source, l’UNEQ aurait des difficultés à mobiliser ses syndiqué.e.s, peu présent.e.s aux assemblées générales, alors que les négociations ont commencé au début du mois avec l’Association nationale des éditeurs de livres et Sogides, le groupe Livre de Québecor Média.
Sur les réseaux sociaux, certain.e.s écrivain.e.s jugent ces pourcentages raisonnables, d’autres non, d’autant que celui réclamé aux non-membres — qui constituent la majorité — est le double de celui exigé aux membres.
Pratique syndicale courante
« C’est une question complexe, mais je dirais que je vois d’un œil assez positif cette décision de l’UNEQ », estime pour sa part David Dorais.
C’est une décision démocratique, car elle vise à assurer aux écrivains des conditions uniformes et respectueuses. Le principe derrière cela est que tous les travailleurs bénéficient de l’action d’un syndicat. L’idée de verser des cotisations obligatoires à un syndicat n’est pas nouvelle. Dans le droit du travail, c’est le principe de la formule Rand, qui est en place depuis les années 1940.
David Dorais, auteur, critique littéraire et professeur de littérature
L’UNEQ a en effet déterminé ses cotisations en s’inspirant des modèles de l’Union des artistes (2,5 % des revenus), de la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (2,5 % pour les membres et 5 % pour les non-membres) et de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec (entre 3 % et 4 %), détaille Le Devoir.
Donc, « le choix entre deux pourcentages […] permet à chacun de moduler sa cotisation selon son niveau de revenu », conclut l’auteur du récit Avant la mort.
Jusqu’à maintenant, les écrivain.e.s négociaient leurs conditions avec les maisons d’édition, l’UNEQ émettant des recommandations en vue d’aiguiller les contrats.