Les Rencontres internationales du documentaire de Montréal (RIDM), un des principaux rendez-vous du cinéma documentaire en Amérique du Nord, se déroulent jusqu’au 27 novembre dans une demi-douzaine de salles de la métropole.
Métro attire votre attention sur deux documentaires d’ici qui, aussi différents que complémentaires, représentent ensemble le cycle de la vie, du début de l’âge adulte aux derniers moments sur Terre. Place à Jouvencelles de Fanie Pelletier et J’ai placé ma mère de Denys Desjardins.
Lancée jeudi avec la projection de Rewind & Play du réalisateur français Alain Gomis, cette 25e édition des RIDM propose 134 films en provenance de 49 pays. Dans le lot, on compte 44 longs, courts et moyens métrages du Québec, donc 14 qui sont en compétition dans l’une ou l’autre des catégories.
J’ai placé ma mère
Film très personnel du documentariste vétéran Denys Desjardins (Au pays des colons, Mon œil pour une caméra), J’ai placé ma mère est la suite logique de la websérie L’industrie de la viellie$$e du même cinéaste, qu’on suit ici avec sa sœur Maryse et leur maman, Madeleine.
Active toute sa vie, cette dernière se retrouve dans un « ghetto pour ainés » quand ses enfants l’installent dans une résidence pour personnes âgées. En perte d’autonomie, elle «a de la difficulté à s’adapter à sa nouvelle prison». Ce langage carcéral entourant les dernières années de cette femme «enfermée dans sa maladie», appuyé par des images désaturées, une musique anxiogène et de longs plans fixes, donne le ton au documentaire, qui montre comment Denys et Maryse Desjardins doivent se battre pour que leur mère puisse finir ses jours dans la dignité.
À la recherche d’un endroit où leur mère ne fera pas que « faire du temps » en attendant la mort, Denys et Maryse doivent lutter contre un système qui s’écroule tout en vivant leurs propres émotions face au déclin de celle qui les a mis au monde. Un film qui montre que, parce qu’on a mal géré le vieillissement de la population, qu’on a mal investi, des personnes âgées se retrouvent aujourd’hui dans des conditions pitoyables.
Quelques moments de bonheur partagés en famille, scènes remplies de musique joyeuse, de couleurs éclatantes, de rires et d’amour, permettent d’adhérer un peu le documentaire, qui se déroule sur trois ans, prenant fin avec le début de la pandémie. J’ai placé ma mère est d’ailleurs dédié aux 5600 personnes âgées décédées pendant cette période au Québec, province où l’on n’a pas envie de vieillir après avoir visionné le documentaire.
21 novembre, 20h30, à la Cinémathèque québécoise.
23 novembre, 15h15, à la Cinémathèque québécoise.
Jouvencelles
Premier long métrage de Fanie Pelletier, qui a signé les courts métrages Photo jaunie et Vagabonds, Jouvencelles est un documentaire sans narration qui s’intéresse à la perception de soi.
La cinéaste braque sa caméra sur des adolescentes (et leurs vidéos TikTok, qui parsèment le film) qui, entre leurs conversations du quotidien sur l’abrosexualité ou sur le nombre de personnes qui ont vu leur dernier live, confient combien elles doutent d’elles-mêmes, à quel point elles se trouvent laides, voire se détestent.
Sans jamais forcer la note, Fanie Pelletier fait comprendre comment cette image négative est teintée par le rapport des jeunes femmes avec les réseaux sociaux, où elles s’exposent peut-être plus qu’elles ne le réalisent. Et cette phrase crève-cœur d’une ado racisée qui idéalise l’image de la ballerine, réalisant qu’elle ne verra jamais sa propre beauté à cause de cette «espèce de racisme intégré en moi».
Applications de retouches de photos pour s’amincir et se donner un teint parfait, clichés aux angles avantageux, comparaison avec les autres internautes, commentaires positifs qui engendrent du plaisir et commentaires négatifs qui créent de la détresse: Jouvencelles donne de la compassion et de l’attachement pour cette génération Z qui grandit avec le web, mais qui développe aussi sa pensée féministe de façon précoce.
18 novembre, 18h, au Cineplex du Quartier latin.
24 novembre, 20h45, au Cinéma du Musée.