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Artistes en quête de «merch» écolo 

La merch écoresponsable est de plus en plus populaire auprès des artistes.

La merch écoresponsable est de plus en plus populaire auprès des artistes.

Plusieurs mélomanes repartent des spectacles de leurs idoles avec un t-shirt ou une casquette souvenir, ce qu’on appelle communément de la merch. Mais comme vous le savez, l’industrie de la mode, surtout la fast fashion, est très polluante. Heureusement, quelques artistes ont commencé à proposer des solutions plus consciencieuses. 

Pour accompagner la sortie de son album Blue en 2021, il n’était pas question pour la rappeuse Emma Beko d’imprimer des t-shirts en série. Elle a plutôt acheté plusieurs vêtements choisis avec soin en friperie sur lesquels elle a fait sérigraphier son logo. Et elle ne compte pas revenir en arrière. 

Pour elle, cette démarche est non seulement plus originale que de produire de la merch traditionnelle, mais elle est plus cohérente avec son mode de vie. Elle se procure ses vêtements personnels dans des friperies, en évitant toujours la fast fashion, depuis belle lurette. 

D’autres artistes comme Safia Nolin ou Calamine ont aussi fait de même. 

Tomber la chemise 

Mais avant même de fouiller pour trouver des vêtements de seconde main, il faut d’abord penser à réduire à la source, c’est-à-dire à moins produire pour moins consommer. «C’est la première chose à faire lorsque l’on veut diminuer notre impact sur l’environnement», indique Laura Grenier-Paquette, conseillère en développement durable. 

«Pour les artistes qui ont une carrière avancée, qui ne sont plus dépendants de la merch, c’est assez populaire d’éviter d’en produire ou, du moins, de diminuer radicalement la production», remarque-t-elle. 

Mais, comme l’indique Laurence Lafond-Beaulne, moitié du duo Milk & Bone, également cofondatrice de l’organisme Artistes citoyens en tournée (ACT) qui a pour mission de promouvoir les pratiques écoresponsables dans le milieu du spectacle, la merch peut représenter «une part assez significative de revenu dans une industrie où les revenus pour ta musique ne font que baisser de plus en plus». 

Ainsi, plusieurs artistes ne peuvent pas se permettre, financièrement, d’abandonner la vente de t-shirts. Non seulement parce que la merch leur rapporte parfois plus que leurs chansons, mais aussi parce qu’elle apporte de la visibilité. 

C’est aussi une question de fierté: «Afficher ton artiste préféré fièrement dans la rue, avoir envie que les gens le connaissent, il y a quelque chose de beau là-dedans», estime Laurence Lafond-Beaulne. 

Acheter local et éthique 

Si un.e artiste veut créer de la merch à partir de vêtements neufs, il y a toujours moyen de faire des choix de fournisseurs plus éclairés en privilégiant la production éthique et locale.  

Important bémol: s’approvisionner auprès de ces fournisseurs est dispendieux.  

«Les producteurs éthiques au Québec coûtent cher. Il n’y a aucune marge de profit possible. C’est pour ça que tout le monde se tourne vers les Gildan et American Apparel de ce monde. Il y a un dilemme impossible entre faire de l’argent et être responsable», croit Laurence Lafond-Beaulne de Milk & Bone.  

D’ailleurs, même les vêtements achetés en friperie sont plus chers que ceux des grands producteurs de t-shirts en série.  

Emma Beko le confirme: elle n’a pas fait de profit avec sa merch faite de vêtement de seconde main. Mais ce n’était pas son but.  

«Je veux juste que le monde qui apprécie ma musique puisse porter quelque chose pour le dire, le partager avec les autres», indique-t-elle. 

Comme la rappeuse, Laurence Lafond-Beaulne compte faire de la merch avec des vêtements achetés en friperie pour son projet solo à paraître. Pour elle non plus, l’argent n’est pas la motivation. Elle se le permettra puisqu’elle jouit d’autres sources de revenus. 

Anti-gaspi 

Alors est-il possible pour un artiste contraint de produire de la merch industrielle de limiter son impact environnemental? Oui, «en allongeant la durée de vie des vêtements par leur design», indique Laura.  

L’experte encourage donc les artistes à créer «un vêtement intemporel pour s’assurer que la personne qui va l’acheter le porte pendant plusieurs années». 

Finalement, pour éviter le gaspillage, il faut aussi s’assurer de ne pas trop produire même si la production en grande quantité est souvent moins chère. Des pièces de merch invendues peuvent s’accumuler des années dans des entrepôts. 

C’est ce qui est arrivé à bien des artistes, notamment au groupe Heartstreets, l’ancienne formation de Emma Beko, maintenant inactive, qui a encore plein de marchandise invendue, qu’elle s’apprête à aller livrer dans un centre de don. 

Importante réflexion 

«Une fois que tu te mets à voir tout ça, c’est difficile de fermer les yeux, souligne Laurence Lafond-Beaulne. Il y a beaucoup de choses à revoir dans notre domaine, la merch n’en est qu’une infime partie.» 

Mais repenser les pratiques ne décourage pas l’artiste, au contraire, elle y voit «un processus créatif excitant». 

«Se donner des contraintes force à être plus créatif et des idées surgissent auxquelles tu n’aurais pas pensé», conclut-elle. 

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