Des citoyens présents à la séance d’idéation autour du terrain dit de Fort-Lorette ont presque unanimement mis en lumière la dimension mémorielle de ce site historique. Ils souhaitent que quel que soit l’aménagement envisagé, que celui-ci rende hommage sobrement aux peuples autochtones.
Le terrain à l’ouest de l’église de la Visitation, dans le quartier Ahuntsic, est le site d’emplacement du Fort Lorette. Deux campagnes de fouilles archéologiques ont fini par convaincre les autorités de Québec de lui accorder un statut patrimonial. Il devient de fait un élément phare du Vieux-Montréal du Nord.
La Ville veut en faire un parc d’intérêt patrimonial, mais n’a pas d’idée précise à mettre sur la table. L’arrondissement Ahuntsic-Cartierville a convié les citoyens le 7 mai à la salle paroissiale de l’église de la Visitation pour une soirée destinée à imaginer l’avenir de ce site.
L’idée qui a fait le plus de chemin : en faire un lieu commémoratif qui rende hommage aux premières nations. «Il faut éviter d’en faire un lieu récréatif», a martelé une citoyenne.
Histoire
Le fort, dont ne subsistent que quelques traces et vestiges, a été bâti par les Sulpiciens et des Autochtones en 1691. Il était destiné à l’évangélisation des Amérindiens. Il avait remplacé la Mission de la Montagne, située près du Mont-Royal, fermée en 1696 alors que les religieux voyaient surgir des problèmes d’alcoolisme chez les autochtones.
«Le site ne représente pas notre page d’histoire la plus glorieuse», soutient Stéphane Tessier, chercheur et conférencier en histoire. Le lieu a été surtout le théâtre d’un drame qui a duré au moins 25 ans. Les sulpiciens retenaient des autochtones, Iroquois des Hurons et des Algonquins.
«On a voulu convertir des personnes, mais au passage nous avons voulu effacer leurs cultures et leurs traditions», précise M. Tessier. Lui également convient qu’il faut faire du site un parc commémoratif.
Il pouvait y avoir près de 200 personnes dans le fort et dans les alentours immédiats. Outre des autochtones, on enfermait dans le fort des colons anglais que les Français avaient capturés dans le sud, dans les actuels États-Unis. «On ne sait pas combien de gens sont passés par le fort, mais probablement quelques milliers», souligne l’historien.
Lors de la rencontre du 7 mai, Émilie Thuillier, mairesse de l’arrondissement a assuré que l’idée d’un parc mémoriel serait soumise à la commissaire aux affaires autochtones.
Sauvé in extremis
Le terrain appartenait aux sœurs de Miséricorde qui l’avaient vendu en 2016 au promoteur Antonio Rizzo pour un peu plus de 2 M$.
Il a ensuite été déclaré réserve foncière par l’ancien maire de Montréal, Denis Coderre quand des membres d’organismes d’histoire ont tiré la sonnette d’alarme pour ne pas voir le terrain servir d’assiette à un développement immobilier. Un avis d’intention de classement du site avait été émis par le ministère de la Culture en 2017 avant de le classer patrimonial. La Ville de Montréal l’a finalement acheté en mai 2018, pour 5,7 M$.