Depuis 1995, le mois de mai est désigné comme le mois international de la masturbation. Encore aujourd’hui, le plaisir intime chez la femme est stigmatisé, mais les mentalités évoluent «tranquillement».
La masturbation peut être faite en consommant ou non de la pornographie. Ce moment intime permet de prendre conscience de ce qu’on aime plus ou moins dans les pratiques sexuelles. «Cela amène à prendre conscience de son imaginaire érotique et de ses fantasmes», explique Stéphanie Beaudet, membre de l’Ordre professionnel des sexologues du Québec (OPSQ).
Elle aide aussi à se détendre. C’est un moment pour prendre soin de soi, décrit Sara Hébert, cofondatrice de Caresses Magiques, un projet éditorial féministe qui vise à recueillir et diffuser des témoignages de femmes de tous âges. La majorité des femmes qui ont témoigné dans les deux recueils de Caresses Magiques l’ont fait de façon anonyme, expose-t-elle. «Le simple fait de ne pas vouloir être étiquetée comme salope, c’est assez pour vouloir garder cela secret», explique-t-elle.
Culturellement, on est conditionné à penser que les hommes ont plus de désirs sexuels que les femmes. Or, beaucoup de participantes de Caresses Magiques ont témoigné que leur libido était plus élevée que celle de leur partenaire masculin. «Les deux réalités existent», lance la cofondatrice.
Elle constate qu’il y a de plus en plus de projets féministes et que cela contribue à déstigmatiser la masturbation féminine. Cela reste toutefois tabou pour ceux qui sont en dehors des cercles féministes.
Les stéréotypes de genre font en sorte que ces préjugés évoluent lentement. Les hommes sont valorisés pour leurs conquêtes, tandis que l’inverse ternit l’image de la femme.
«Quand tu affirmes ta sexualité et que c’est important pour toi d’avoir du plaisir, ça ouvre la porte à recevoir le jugement des autres. Les femmes qui affirment leur sexualité sur les réseaux sociaux peuvent recevoir des commentaires assez désobligeants», dénonce Mme Hébert.
«La masturbation chez l’homme est plus normalisée. Cela va valider la masculinité tandis que chez la femme, c’est vu comme quelque chose de sale et de honteux.» –Stéphanie Beaudet, sexologue.
Il faut aller déconstruire les messages qui sont véhiculés dans la société, affirme Stéphanie Beaudet, également membre de l’Association des sexologues du Québec (ASQ).
Elle ajoute que tous ne sont pas ouverts à la masturbation, ce qui est normal. «Si une personne a le goût d’explorer, mais qu’elle se sent limitée par les discours sociétaux, c’est là que c’est problématique», souligne la sexologue.
Solutions
D’autres bienfaits sont reliés à la masturbation, comme une meilleure connaissance de son corps, son fonctionnement, les différents types de sensation et ce que l’on peut en retirer. «Cela permet à une personne de se familiariser avec son corps et de l’apprivoiser. Ainsi, elle sera plus à l’aise de le regarder et de le toucher», indique la sexologue.
Cela est bénéfique dans un contexte de couple aussi. Se connaître mieux facilite la communication des désirs, ce qui apporte davantage de plaisir sexuel.
Briser les tabous entourant la masturbation féminine passerait par le simple fait d’en parler plus ouvertement. L’éducation sexuelle joue un rôle clé.
Or, les cours à la sexualité, obligatoires au Québec, n’abordent pas nécessairement la masturbation féminine. Cela dépend de l’éducateur qui donne le cours.
Le rôle des parents est aussi important. Ils ne doivent pas bannir la masturbation. Il est normal qu’un jeune enfant, garçon ou fille, explore son corps.
L’enfant le voit comme un jeu, et non une activité à caractère sexuel, explique Stéphanie Beaudet. Le parent doit lui apprendre à faire cela dans l’intimité et éviter de le réprimander. Cela peut avoir un impact sur sa sexualité à long terme.
Il peut être bénéfique pour les adolescentes de voir davantage de scènes de masturbation féminine à l’écran. Cela leur permet d’avoir des modèles et d’assimiler que cela est naturel de se masturber.