Une lettre envoyée à la mairesse de Montréal Valérie Plante et au maire de Rosemont-La Petite-Patrie, François Croteau, relance le débat sur le REV de Bellechasse. Ses auteurs demandent que les aménagements apportés sur cette rue soient repensés.
Dans cette lettre, ce que les 12 signataires déplorent avant tout, c’est un processus d’aménagement qu’ils jugent «unilatéral» et «cavalier». Selon eux, l’administration de Valérie Plante n’aurait pas pris le temps de consulter les résidents locaux et aurait manqué de transparence. Des reproches qui font écho à la grogne provoquée par le projet du REV sur la rue Saint-Denis.
Au cœur de la discorde, le retrait de 800 stationnements le long de la rue de Bellechasse. Ceci n’aurait jamais été annoncé comme tel d’après les auteurs de la lettre. En plus d’illustrer un «défaut» de communication, la lettre décrit cette mesure comme un danger pour la santé commerciale de l’artère.
«On s’attendait à une perte de stationnement, mais pas à ce point. La survie des commerçants est en péril. Un commerce s’apprête déjà à fermer ses portes et d’autres s’en viennent», témoigne David Martin, signataire de la lettre et président de l’agence Notam Placement Média située sur la rue Molson.
Pignon sur REV
Pour les commerçants situés sur la rue de Bellechasse, le retrait de nombreux stationnements et l’ajout de la piste cyclable côtés nord et sud peuvent présenter certains défis.
En effet, sur les tronçons où tous les stationnements ont été supprimés, les livraisons s’avèrent compliquées. Plusieurs camions de livraison ont ainsi été vus en train de stationner sur la piste cyclable, faute de pouvoir livrer par la ruelle.
«C’est une catastrophe! Je ne peux plus recevoir mon matériel. Les camions de 30 pieds ne peuvent plus me livrer», explique Luc Émard, propriétaire de la boutique Tapis Jules-Émard qui donne sur la rue de Bellechasse.
Selon lui, l’aménagement de la piste cyclable a grandement diminué l’accessibilité de son commerce qui se trouve maintenant «enclavé».
«C’est difficile de recevoir mes clients et je ne suis plus accessible aux personnes âgées ou à mobilité réduite. Je dois gérer le stationnement de mes clients pour qu’ils puissent venir. C’est beaucoup d’énergie», raconte-t-il.
Comme les autres signataires, il souhaiterait rencontrer les représentants de la Ville et de l’arrondissement afin de «corriger la situation».
Un projet de longue date
Appelés à réagir à la lettre qui leur était adressée, Valérie Plante et François Croteau rappellent tous deux que, depuis son annonce en juin 2019, le projet du REV de Bellechasse a été maintes fois couvert par les médias.
Dans l’arrondissement de Rosemont-La Petite-Patrie, des avis ont été distribués à plusieurs reprises et un bulletin spécial sur le projet Vision vélo a été déposé dans toutes les boîtes aux lettres.
«En termes de transparence, nous avons été irréprochables. Chaque commerçant qui nous a contactés à ce sujet a obtenu des réponses. Nous sommes sensibles à leurs demandes», affirme M. Croteau.
Ce dernier souligne aussi que parmi les signataires de la lettre, seuls quatre sont en effet des commerçants situés sur de Bellechasse. Plusieurs d’entre eux auraient d’ailleurs déjà été en communication avec les services de l’arrondissement.
De son côté, se disant ouverte à rencontrer les commerçants, Mme Plante n’entend pas pour autant remettre en question le projet du REV.
«Encore une fois, le REV sur Bellechasse c’est un projet qui était prévu depuis longtemps, mais on est ouverts. Est-ce que ça veut dire qu’on va reculer sur ce projet-là? Non. Mais si on peut faire des aménagements et accommoder, bien sûr», a-t-elle réagi.
S’adapter à une nouvelle mobilité
Pour sa part, Pierre Rogué, fondateur de l’Association pour la mobilité active de Rosemont-La Petite-Patrie (AMARPP), croit que la perte de stationnement dans ce secteur n’est pas déterminante pour la survie des commerces locaux.
«Je comprends l’inquiétude des commerçants, mais il me semble que les commerces comme ceux de la rue de Bellechasse ne sont pas forcément tributaires de l’automobile. On pourrait les rendre accessibles autrement», explique-t-il.
Il propose ainsi de mener une campagne de communication auprès des résidents de l’arrondissement afin d’aider les commerçants à s’adapter au changement.
«Maintenant les gens peuvent se déplacer facilement et en sécurité à vélo. C’est une opportunité pour les commerçants d’attirer une nouvelle clientèle», précise-t-il.