«Veuillez scanner vos articles»; «désirez-vous des sacs?»; «entrez votre carte de points». Entendre une voix robotisée vous dérange? C’est comprenable. Mais si vous êtes du genre à refuser d’utiliser les caisses libre-service, les chances sont que c’est le personnel du commerce qui sera dérangé.
On parle souvent des caisses libre-service en pensant aux dépenses engendrées par les employeurs ou à l’expérience des client.e.s. Les impacts qu’elles ont sur les employé.e.s, qui passent pourtant des dizaines d’heures par semaine en leur présence, sont rarement évoqués, si ce n’est pour dire que ces caisses risquent de voler leur job. Eh bien, ce n’est pas le cas pantoute!
«Avec les caisses automatiques, il y a trois irritants qui sont soulevés de façon récurrente», avance Roxane Larouche, représentante nationale du Syndicat des travailleurs unis de l’alimentation et du commerce (TUAC), dont sont membres les employé.e.s de plusieurs épiceries de la province.
Réticences et vigilance
Ce n’est pas la voix de robot ou la crainte de se faire remplacer par une machine qui tape sur les nerfs du personnel. Au contraire: les caisses libre-service sont arrivées au Québec au début des années 2000 et leur présence accrue s’explique tout simplement par la pénurie de main-d’œuvre, qui contraint les employeurs à les installer.
Selon la représentante syndicale, le problème le plus souvent mentionné par les employé.e.s, c’est les clients qui refusent de passer aux caisses libre-service par principe.
«Il y en a souvent qui vont dire qu’ils ne travaillent pas là, qu’ils ne sont pas payés pour passer leurs articles à la caisse. Ça explique pourquoi ce n’est pas rare qu’on voie des caisses libre-service vides alors qu’il y a des grosses files pour les caisses traditionnelles», résume Roxane Larouche. Ça, ça veut dire bien de la pression sur la ou le caissier.ère.
Le deuxième principal enjeu, c’est que surveiller six caisses libre-service, c’est un autre métier que celui de caissier.ère. «On voit que nos membres ont un rôle d’accompagnement pour les clients, explique la représentante des TUAC. L’employé.e qui supervise les caisses libre-service doit aider les gens, leur montrer comment faire, gérer les bogues avec la machine et les client.e.s qui ne sont pas nécessairement patients…»
Et sans surprise, les caisses libre-service riment avec davantage de cas de vols, ce qui demande aux employé.e.s d’être plus alertes qu’avec une caisse traditionnelle, même si personne n’a à se prendre pour un.e agent.e de sécurité.
Trouver des solutions
Il n’y a pas de solution miracle, croit Roxane Larouche. Si on veut pallier la pénurie de main-d’œuvre, on peut bien employer des mineurs de plus en plus jeunes, mais leur embauche vient avec d’autres enjeux. On peut aussi réduire les heures d’ouverture, mais on privera alors des employé.e.s d’une partie de leur salaire.
Les caisses libre-service sont donc une solution de remplacement souvent privilégiée et, pour faciliter la vie du personnel, il faut faire de l’essai-erreur.
Chaque établissement ou bannière a sa façon de procéder. Par exemple, à certains endroits, on va demander aux clients avec 20 articles et moins de passer à la caisse libre-service, parce que c’est plus facile à superviser quand il y en a moins. À d’autres endroits, il y a quelqu’un pour diriger les clients vers les caisses libre-service s’ils payent par carte.
Roxane Larouche, représentante syndicale
Des solutions plus technologiques sont aussi développées pour décharger en partie les employé.e.s. Par exemple, en Asie, des paniers d’épicerie intelligents peuvent détecter si des articles n’ont pas été payés, auquel cas ils ne passent pas à la sortie. Ailleurs dans le monde, ce sont les portes automatiques qui restent fermées. Ici, on a des balances qui détectent si un article non scanné est ajouté au panier. Ces façons de prévenir le vol demandent moins de vigilance de la part du personnel.
Mais au fond, ce qui peut vraiment faire une différence dans le quotidien des caissier.ère.s et des personnes qui surveillent les caisses libre-service, c’est l’attitude des client.e.s. Être poli.e et suivre les consignes du commerce, c’est ce qui peut le plus soulager les employé.e.s des irritants qui viennent avec ces machines. Révolutionnaire, non? Non!