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Évelyne, une missionnaire du cheveu

Photo: Daphné Caron/Urbania

On la décrit comme une coiffeuse en milieu hospitalier, mais au fond, Évelyne est bien plus que ça: chaque semaine, elle soigne les âmes en redonnant un peu de dignité aux patients de l’hôpital Sacré-Cœur.

Comment êtes-vous devenue coiffeuse en milieu hospitalier?
J’étais tannée des salons de coiffure, de leur côté glamour et superficiel, mais je ne me voyais pas changer de métier. Un jour, un ami m’a demandé d’aller coiffer sa mère, à l’unité de gériatrie. D’autres patients ont demandé le service, et ça m’a permis de me lancer à mon compte.

Sinon, les patients de l’hôpital ne sont pas coiffés?
C’est un service qui a déjà été offert, ils appelaient ça les unités mobiles : ils envoyaient de jeunes coiffeuses, mais à un moment donné, ça a cessé de fonctionner. Il faut dire que ce n’est pas simple. Les patients ne sont pas tous mobiles. Les grands accidentés, par exemple, sont alités. Il y a aussi des patients plus vulnérables aux bactéries, ceux qui ont le cancer du sang, par exemple. Je dois désinfecter tout mon matériel.

Quelle sorte de services offrez-vous?
Ça dépend des patients. Ceux qui subissent des traitements de chimiothérapie, je les rase. C’est douloureux, perdre ses cheveux, en plus d’être dur psychologiquement. Sinon, je fais des coupes, des teintures, des mises en plis. La seule chose que je ne fais pas, c’est des permanentes. Quand je leur explique ça, les madames qui sont habituées d’avoir ce que j’appelle une «boule» sur la tête me demandent d’essayer quelque chose de nouveau. C’est l’fun! Mais parfois, les patients ont seulement besoin d’un shampoing de base. Certains d’entre eux ne se sont pas lavé les cheveux depuis deux semaines. Parfois, ils ont encore la tête pleine de sang et de gravelle.

Ça veut dire que les préposés ne les lavent pas?
En fait, les préposés ne lavent pas les cheveux. Que les corps. Elles apprécient quand je viens parce qu’elles voient que ça fait du bien à leurs patients. Une fois, je suis entrée dans la chambre d’une patiente et j’allais partir quand j’ai vu qu’elle était avec son psychiatre, mais il m’a dit: «Entre, tu vas lui faire plus de bien que moi!»

Est-ce que c’est dur pour le moral, travailler avec des gens malades?
Au début, j’avais peur de devenir hypocondriaque ou de trouver ça dur, mais finalement, je trouve surtout que c’est très valorisant. Pour une femme qui a été fière toute sa vie, c’est très important d’être belle, c’est sa dignité. Après que je les ai coiffées, certaines dames vont se mettre du fard à joues et une touche de rouge à lèvres en attendant leur visite. Elles me disent que je leur fais du bien à l’âme. J’aime mieux ça que de me faire dire «dépêche-toi, j’ai un 5 à 7!»

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