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Profession de foi péquiste

Le suspense n’était pas très grand. Après avoir annulé plusieurs de ses engagements cette semaine, Martine Desjardins a finalement admis avoir été approchée par le Parti Québécois. Elle met donc «temporairement fin à ses emplois, le temps de faire le point sur son avenir». Mon expérience de travailleuse autonome me dit toutefois que, lorsque l’on met «temporairement fin à ses emplois», le point sur notre avenir est pas mal déjà tout décidé. Ne reste qu’à fignoler quelques détails, comme la date de l’élection et le nom de la circonscription.

Mais au-delà de l’incongruité de cette affirmation probablement stratégique, plusieurs personnes ont souligné le fait que l’ancienne leader étudiante devrait entrer dans les rangs et faire connaissance avec la discipline de parti en joignant le PQ. En fait, m’est d’avis que Martine a «joint les rangs» depuis belle lurette déjà. Son appui à la charte n’était que la profession de foi nécessaire pour sceller la patente. L’expression «profession de foi» étant toute désignée pour un parti qui veut ériger la laïcité en véritable religion.

Je ne connais pas toutes les féministes de ma génération, mais j’en connais un paquet. Et de toutes celles que je connais, seulement deux sont curieusement en faveur de la charte. L’auteure de cet excellent blogue, et Martine Desjardins. Bien que je reconnaisse l’autonomie de toutes les femmes de prendre position selon leurs convictions dans ce débat, permettez-moi de trouver ce concours de circonstances au moins étonnant.

Pour la plupart des jeunes féministes, l’intersectionnalité – le fait de reconnaître que les femmes peuvent être victimes de plusieurs sources d’oppression, que ce soit celle des hommes, ou celle du gouvernement, si on veut résumer – revêt une importance capitale dans la compréhension des enjeux liés à l’interdiction des symboles religieux. C’est une notion à laquelle certaines féministes des générations précédentes sont peut-être moins sensibles. C’est pourquoi il était étonnant (et pas tant que ça en même temps, la politique étant ce qu’elle est), de voir Léo Bureau-Blouin défendre avec autant de vigueur le projet de charte des valeurs du PQ. Quant à Martine Desjardins, ça s’est avéré à mes yeux le premier indice d’une cruise politique professionnelle.

Mais sa position pro-charte ne sera pas la seule profession de foi que devra faire l’ancienne présidente de la FEUQ, celle-là même qui serrait du bout des doigts la main de Pauline Marois en marge du sommet de l’éducation supérieure. Celle qui a milité contre une hausse des frais de scolarité de 50¢ par jour devra maintenant défendre une hausse des frais de garde de 2$ par jour. Entre autres positions pas le fun à défendre au PQ quand on est jeune et féministe.

Pour l’anecdote – Ce matin, sur Facebook, j’écrivais «Troisième engagement que Martine Desjardins choke cette semaine, à ma connaissance. Il ne reste de suspense que la circonscription». Mon collègue Hassan Serraji m’a demandé de l’informer sur la signification de l’anglicisme «choker». Je lui ai expliqué que ça voulait dire abandonner, se désister, changer d’idée, et je lui ai enjoint de consulter ce tumblr humoristique pour comprendre. À bien y penser, ce verbe ne sied pas qu’à l’horaire de Martine Desjardins cette semaine, mais peut-être aussi plus largement à son engagement envers le mouvement étudiant, dont les militants doivent se sentir trahis aujourd’hui. Comme dans l’expression «choker les étudiants».

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