La «tempête du siècle» célèbre son 50e anniversaire. Mais cette tempête de neige, décrite comme la pire qu’ait connue Montréal à l’époque, se reproduira avec certitude, explique le titulaire de la Chaire de recherche du Canada en hydro-climatologie statistique à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), Ouarda Taha.
«La seule certitude qu’on a, c’est que cette tempête va revenir et on aura plus fort que cette édition de 1971. Même dans un cadre où il n’y a pas de changements climatiques, un évènement qui a une probabilité d’être observé tous les 50 ans se réalisera», assure M. Ouarda.
«On ne peut plus assurer que le passé représente le futur, sauf que l’on sait que le climat est en train d’évoluer, on est en train d’avoir une plus grande variabilité des évènements tant au niveau précipitations, températures ou accumulations de neige» – Ouarda Taha, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en hydro-climatologie statistique à l’INRS
En d’autres mots, une plus grande variabilité amène des évènements climatiques plus extrêmes.
On peut avoir des combinaisons qu’on n’a pas beaucoup observées avant, comme une accumulation de neige plus grande, un réchauffement plus rapide qui fait fondre la neige associé à des précipitations. Ces combinaisons entraînent des inondations printanières de plus en plus fortes, comme celles vécues en 2017 et 2019.
Adaptation et changement d’attitude obligatoire
Les impacts de la tempête de mars 1971 ont été marquants car les infrastructures et les équipements n’étaient pas les mêmes qu’aujourd’hui. Et les conséquences ont été dramatiques puisque 17 personnes en sont mortes. Cependant, les institutions, les infrastructures et les services se sont mieux outillés au fil des années.
M. Ouarda explique que des évènements similaires sont moins marquants car les sociétés se sont adaptées et sont mieux préparées. «Les différents ministères ont amélioré les infrastructures et leurs organisations pour mieux gérer ce genre de tempêtes mais c’est un comportement obligatoire. Maintenant, on ne peut pas continuer à émettre des gaz à effet de serre et s’attendre à ce que les choses s’améliorent. Il est important que tout le monde se mette ensemble pour inverser les choses car des actions au Brésil ou en Chine nous affectent directement. Mais même si on fait ça aujourd’hui, l’impact on ne le verra pas avant 300 ans.»
Je me souviens, le 4 mars 1971
Les fortes précipitations de neige, en peu de temps, associées à un vent violent avaient complètement figé Montréal. La combinaison du vent et de la neige déjà au sol l’avait transformée en «tempête du siècle». Les bancs de neige pouvaient atteindre le 2e étage des maisons.
Dix-sept personnes sont décédées. Les causes de décès étaient par crise cardiaque, essentiellement, mais d’autres personnes ont été retrouvées asphyxiées ou gelées dans leurs voitures.
Le vent a cassé des poteaux d’électricité et fait tomber les câbles, privant d’électricité certains secteurs pendant 10 jours. De nombreux salariés ont dû dormir au travail. Plusieurs journaux n’ont pu publier les 4 et 5 mars.
La grande majorité des bus publics ont été paralysés. Les commerces, magasins et écoles ont dû fermer pendant une semaine. La police, étant incapable de réaliser des patrouilles, a demandé aux motoneigistes qui le pouvaient d’aider au secours. Deux cents d’entre eux répondront à cet appel.
Au total, la Ville fit transporter 500 000 voyages de camion de neige afin de désengorger les rues.
La tempête du 4 mars 1971 en chiffres :
- 43 cm de neige tombée en 24h
- 17 morts
- 110 km/h de vent
- 1 semaine de confinement en famille demandée par le maire Jean Drapeau
- 1ere fois que le métro roulera toute la nuit (du 4 au 5 mars)
- 200 citoyens en motoneige iront secourir des personnes bloquées