Alors que l’Ontario déploie massivement des tests rapides pour limiter la transmission du coronavirus dans ses secteurs essentiels, l’efficacité de cette méthode de dépistage pousse encore le gouvernement du Québec à agir avec «prudence».
Lors d’un breffage technique auquel les médias ont eu accès lundi, le Ministère de la Santé et des Services sociaux a fait le point sur son utilisation de deux modèles de tests rapides.
L’un d’entre eux, le «ID Now», sera déployé «de façon soutenue», a annoncé le ministère, qui en possède plus de 200 000 en stock. Le «ID Now» est un test rapide qui peut soutenir quatre tests par heure, ce qui le rend relativement limité en termes de capacité.
Ces tests seront disponibles dans plusieurs régions du Québec et pourront être sollicités par des entreprises qui souhaitent les utiliser pour prévenir la transmission du coronavirus.
L’Ontario en avant, le Québec «prudent»
Néanmoins, un autre test, le «Panbio», fait beaucoup plus hésiter le gouvernement, notamment en raison de son efficacité. Ce sont ces tests qui, au nombre de plus d’un million, dorment sur les tablettes du ministère depuis des mois. Ce modèle a l’apparence et le fonctionnement d’un test de grossesse et peut être utilisé dans une stratégie de dépistage massive.
Ce matin, Radio-Canada rapportait que l’Ontario a commandé 9 millions de tests «Panbio» pour dépister massivement des secteurs essentiels, une quantité si importante que cela laisse peu de tests disponibles pour le Québec. Le premier ministre Doug Ford souhaite que ces tests permettent une réouverture des écoles le 10 février.
Mais pour le ministère, ces tests comportent encore trop de risques pour les utiliser comme le fait l’Ontario. La sous-ministre adjointe Marie-Ève Bédard a refusé de juger des risques que pourrait comporter la méthode ontarienne et a plutôt fait valoir le contexte dans lequel la décision du gouvernement du Québec a été prise.
«On offre d’excellents tests très performants au niveau des laboratoires qui sont facilement accessibles partout le territoire du Québec avec des résultats qui sont obtenus à l’intérieur de 24 heures». Selon la sous-ministre, l’Ontario connaît davantage de problèmes de capacité avec ses tests en laboratoire.
Risques
Pour justifier la prudence avec le test «Panbio» au Québec, le ministère évoque plusieurs arguments, dont un pourcentage élevé de faux négatifs, un risque de relâchement du respect des mesures après avoir été testé et une réticence à être dépisté en raison d’une fréquence trop élevée.
«On a plein d’études qui disent qu’on peut nuire plus qu’on peut aider dans le contexte des tests rapides. Le lobby est très fort pour qu’on les utilise, mais c’est vraiment à risque, a expliqué la Dre Isabelle Goupil-Sormany, présente lors du breffage. On l’a vu aux États-Unis avec des éclosions dans des dortoirs, dans le milieu du cinéma, le milieu des arts.»
Les tests rapides seraient également inefficaces pour détecter les variants du virus, qui sont une préoccupation croissante pour les autorités sanitaires. «Plus on fait de l’antigène [soit les tests «Panbio»], plus on manque les variants», a soulevé Dre Goupil-Sormany.
Pour l’instant, Québec se contente de permettre l’utilisation de ces tests dans le cadre de projets pilotes ou de projet de recherche. Très peu de «Panbio» ont été déployés en date d’aujourd’hui.
Critiques
Présents lors du breffage, des élus de l’Assemblée nationale ont été critiques du gouvernement dans sa gestion du dossier des tests rapides.
Le porte-parole de Québec solidaire en matière de santé, Gabriel Nadeau-Dubois, a souligné le délai de plusieurs mois entre la réception des tests et la publication des directives ministérielles sur leur utilisation.
«J’ai l’impression qu’on vit un peu le même débat qu’avec le masque il y a un an», a pour sa part exprimé la porte-parole en matière de santé du Parti libéral du Québec, Marie Montpetit, quant à l’hésitation du gouvernement.
«L’Ontario semble avoir tout réservé les tests, a souligné le porte-parole en matière de santé du Parti Québécois, Joël Arserneau. Est-ce que ça ne démontre pas qu’on a un peu manqué notre coup en prenant le temps de faire les validations?»