Le film Nomadland est sorti vainqueur dimanche soir de la cérémonie des Golden Globes qui ont également distingué un grand nombre d’artistes noirs, dont le défunt Chadwick Boseman, dans des catégories majeures après avoir été vivement critiqués cette semaine sur l’absence de juré noir au sein de l’organisation.
Nomadland, hymne à la gloire de hippies modernes sillonnant les États-Unis dans leurs camionnettes, l’a emporté dans la catégorie phare du meilleur film dramatique tandis que sa réalisatrice, la Chinoise Chloé Zhao, 38 ans, est devenue la deuxième femme de l’histoire des Golden Globes à être lauréate dans cette catégorie, après Barbra Streisand en 1984.
«Nomadland est pour moi, au fond, un pèlerinage à travers la douleur et la guérison», a-t-elle expliqué. «Je veux particulièrement remercier les nomades qui ont partagé leurs histoires avec nous», a dit la cinéaste à propos des acteurs de son film, pour la plupart des amateurs vivant réellement sur les routes dans des conditions souvent difficiles.
Andra Day, jeune actrice noire américaine a créé la surprise en s’imposant dans la catégorie de la meilleure actrice dans un film dramatique grâce à son rôle dans Billie Holiday, une affaire d’Etat. Elle comptait face à elle plusieurs actrices de renom dont Frances McDorman, seule vedette professionnelle à l’affiche de Nomadland.
Plusieurs autres acteurs noirs ont également été primés par les Golden Globes, en premier lieu Chadwick Boseman pour Le Blues de Ma Rainey, la dernière oeuvre dans laquelle il ait tourné avant de succomber à un cancer l’été dernier. La star révélée par Black Panther l’a emporté face à des poids lourds comme Anthony Hopkins, huit fois candidat malheureux aux Golden Globes.
Autre Black Panther par procuration, le Britannique Daniel Kaluuya a reçu le prix du meilleur second rôle pour son interprétation de Fred Hampton, jeune leader du mouvement révolutionnaire noir tué en décembre 1969 lors d’un raid de police.
Le film montre les efforts de ce leader des Black Panthers pour mobiliser contre les violences policières qui visaient la communauté noire dans les années 1960, un thème qui reste toujours d’actualité après les grandes manifestations qui ont secoué les États-Unis l’an dernier.
«J’espère que dans plusieurs générations on pourra voir comment il a brillamment combattu et brillamment parlé», a déclaré l’acteur à propos de Fred Hampton, assurant que le militant Black Panther lui avait beaucoup appris sur lui-même et l’avait «fait grandir en tant qu’homme».
La soirée des Golden Globes a fait la part belle à la diversité, un paradoxe alors que l’Association de la presse étrangère d’Hollywood (HFPA), qui décerne les récompenses, a été vivement critiquée cette semaine parce qu’elle ne compte aucun journaliste noir parmi ses 87 membres actifs.
Plusieurs participants à la soirée de dimanche, y compris les deux maîtresses de cérémonie, les ont plus ou moins gentiment épinglés sur le sujet.
«Nous reconnaissons que nous devons y travailler. Comme pour les films et la télévision, la représentation des personnes noires est cruciale», sont venus déclarer sur scène les responsables de la HFPA.
«Mank» à l’appel
En tête avec six nominations, le film en noir et blanc de Netflix Mank, avec Gary Oldman, est reparti bredouille.
Les Golden Globes font partie des prix les plus convoités du cinéma américain et peuvent venir conforter les favoris dans la course aux Oscars ou à l’inverse doucher leurs espoirs.
Contrairement aux Oscars, ils font la distinction entre les comédies et les films dramatiques.
Si Sacha Baron Cohen a manqué le Golden Globe du meilleur second rôle pour sa performance dans Les Sept de Chicago, il a raflé la mise avec Borat 2, sacré meilleure comédie. Le Britannique repart également avec le trophée du meilleur acteur dans cette catégorie.
Tourné dans des conditions difficiles, au beau milieu de la pandémie de coronavirus, Borat 2 avait vu l’humoriste reprendre le rôle de ce journaliste kazakh fictif pour mieux mettre en lumière les travers de la société américaine en amont de l’élection présidentielle.
«Attendez, Donald Trump conteste le résultat. Il affirme que plein de gens morts ont voté, ce qui est vraiment insultant pour la HFPA», a encore plaisanté dimanche Sacha Baron Cohen.
Chez les femmes, c’est sa compatriote Rosamund Pike qui l’a emporté pour son rôle dans I Care A Lot. «J’ai dû sortir en nageant d’une voiture qui coulait. Mais je pense que je préfère encore ça plutôt que de me trouver dans une chambre avec Rudy Giuliani», a-t-elle ironisé. Avocat de M. Trump, Rudy Giuliani se trouve dans Borat 2 dans une situation très embarrassante avec l’actrice Maria Bakalova, qui joue la fille – mineure ! – de Borat et était en lice aux Golden Globes.
Carton plein pour The Crown
Jodie Foster a reçu le prix du meilleur second rôle féminin pour son interprétation dans Désigné Coupable d’une avocate acharnée prenant la défense d’un Mauritanien accusé à tort de terrorisme par les États-Unis et emprisonné durant 14 ans à Guantanamo.
Minari du réalisateur américain Lee Isaac Chung a décroché le prix du meilleur film en langue étrangère, face notamment au film français Deux, qu’il pourrait affronter de nouveau aux Oscars.
Les Globes récompensent aussi les oeuvres de télévision et The Crown a fait cette année carton plein avec quatre prix. Netflix a engrangé d’autres trophées grâce à Anya Taylor-Joy et Le jeu de la dame.
La cérémonie de remise des Golden Globes était cette année entièrement virtuelle en raison de la pandémie de coronavirus. Elle était pour la première fois organisée à cheval entre Beverly Hills en Californie et New York.