Alors que les cas de coronavirus se multiplient dans les CHSLD d’Ahuntsic-Cartierville et du nord de Montréal, les infirmières et préposés aux bénéficiaires se disent à bout de souffle.
Depuis le début de la crise au Centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) Notre-Dame-de-la-Merci, premier foyer d’éclosion du coronavirus dans le nord de Montréal, les infirmières ont besoin de plus de temps pour mener chacune de leurs tâches quotidiennes.
«Il faut prendre les signes vitaux ou la température des résidents plus souvent. Il faut s’habiller, s’équiper de masques et de visières», décrit Kathleen Bertrand, présidente du Syndicat des professionnelles en soins du Nord-de-l’Île-de-Montréal (SPSNIM-FIQ).
De plus, les infirmières ne peuvent plus se déplacer aussi rapidement qu’avant. «Dès qu’on passe de la zone des personnes contaminées au secteur où les gens ne sont pas malades, il faut se changer», souligne-t-elle.
Il faut également désinfecter en permanence le matériel, car il n’y en a pas assez partout.
«Cela génère une surcharge de travail énorme et il n’y a pas eu de l’ajout de personnel nécessaire, déplore Mme Bertrand, présidente du SPSNIM-FIQ. Ce n’est pas l’enfer, mais c’est très difficile».
Cette situation serait la même dans tous les CHSLD où de nouveaux foyers d’éclosion sont apparus, soit Laurendeau, Paul-Lizotte, Légaré et la Petite Patrie
En date du 8 avril, les CHSLD du Nord de l’île déploraient 20 décès et plus de 100 personnes atteintes de la COVID-19.
Les PAB sur la ligne de front
Chez les préposés aux bénéficiaires (PAB), la situation est tout aussi complexe. Alors que l’on veut éviter les contacts entre les résidents, les employés présents doivent veiller autant à la sécurité des malades qu’à faire leur travail.
«Samedi passé nous étions trois PAB à un étage avec des patients atteints d’Alzheimer. Il y avait trois autres employés en surplus qui s’assuraient que les résidents ne sortent pas de leurs chambres. C’était très bien. Le lendemain, nous n’étions que les trois de l’équipe de PAB et personne pour nous aider», soutient Benoit Taillefer, vice-président au syndicat de la Fédération de santé et de services sociaux-CSN du CIUSSS.
Pour appuyer ses dires, il cite une lettre qu’une préposée aux bénéficiaires a envoyée à la ministre de la Santé sous couvert d’anonymat.
Cette PAB explique que le CIUSSS donner la directive de ne donner qu’une seule douche par semaine aux bénéficiaires plutôt que deux. Une mesure qui vise à donner un plus de temps au personnel des établissements.
«Les soins et services, comme les soins d’hygiène justement, peuvent également être adaptés temporairement pour respecter les directives liées à la prévention et au contrôle des infections», indique le CIUSSS du Nord-de-l’île-de-Montréal en énumérant les mesures prises pour aider le personnels soignant dans les CHSLD.
«Nous déployons depuis plusieurs semaines un plan de délestage qui nous permet de réaffecter les ressources en fonction des besoins de chacune de nos installations, incluant les CHSLD bien sûr», indique-t-on au CIUSSS.
Une lumière crue a été jetée sur la situation dans les CHSLD alors que La Presse a publié une lettre ouverte du Dr Serge Brazeau, président de l’Association des médecins gériatres du Québec. Il y dénonce des soins «souvent inférieurs à ceux offerts aux plus jeunes.»
Lors de son point de presse quotidien le 8 avril, la ministre de la Santé Danielle McCann déclaré qu’«une opération de redéploiement massif est actuellement en marche».
Il s’agit de déplacer du personnel des hôpitaux vers les CHSLD et les unités de soins pour les aînés. Selon Mme McCann, 450 médecins sont mis à contribution immédiatement, des infirmières et des PAB qui vont venir en renfort. Elle a souligné que le ministère a convaincu 500 infirmières pour se réinscrire au tableau de l’ordre des infirmières du Québec.