Une salle de pratique du jiu-jitsu a ouvert ses portes sur l’avenue Sainte-Croix à Saint-Laurent. L’établissement offre des cours de lutte brésilienne à prix réduit, afin de financer son véritable objectif: la prise en charge de jeunes à risque par les arts martiaux.
L’Organisme Rue Action Prévention Jeunesse (RAP Jeunesse) gère le local de Jiu-Jitsu Saint-Laurent.
RAP Jeunesse effectue, dans le secteur de Saint-Laurent, de l’intervention de rue, des ateliers d’éducation sexuelle dans les milieux scolaires ainsi que de la prévention de la toxicomanie et des dépendances. Elle programme aussi depuis 2002 les «Jeux de la rue».
«L’école d’arts martiaux est offerte pour tout le monde, pas uniquement les personnes avec des problématiques d’itinérance», explique le directeur général de RAP Jeunesse, René Obregon-Ida.
Ils ont dit:
«Le programme t’apprend à ne pas avoir envie de te battre dans la rue. En plus, on est banni si ça arrive.» – Buster Call (nom anonymisé), membre des Lion Kings MMA
«La persévérance, il faut mettre du temps et de l’effort. Depuis que j’ai commencé ici, je n’ai pas redoublé de classe.» – Nizar Cheikho, membre des Lion Kings MMA depuis 2016
Une équipe distincte du volet commercial de la salle accueille les individus en situation de vulnérabilité. Pour faire partie du Lion Kings MMA – nom opté par les jeunes – chacun doit s’engager dans une démarche de longue durée, axée sur des heures de bénévolat. Certains ont été dirigés vers l’école par d’autres organismes.
Ceinture noire en jiu-jitsu, Nicolas Barbeau est à la fois instructeur et coordonnateur du programme d’intervention au gymnase.
Emplacement
L’obtention d’un local fixe permettra de renforcer le sentiment d’appartenance à un collectif, estime M. Barbeau. Le volet des arts martiaux a longtemps été ambulant.
Il a commencé à donner des cours au parc Painter lorsqu’il était travailleur de rue dans le secteur de Chameran-Lebeau, mais le lieu est grandement achalandé.
La troupe a ensuite occupé des salles du YMCA Saint-Laurent, mais la fermeture prochaine du bâtiment, combinée à la crise sanitaire, empêchait la tenue des cours en dehors des heures de garderie.
Le jiu-jitsu montre comment se défendre dans une société de droit. Ce sont des techniques pour contrôler l’adversaire plutôt que de le blesser.
Nicolas Barbeau – Coordonnateur du projet arts martiaux au RAP Jeunesse
L’organisme recherchait un établissement plus petit initialement, pour limiter les frais de loyer et d’entretien du matériel.
«On a décidé de se lancer malgré tout en augmentant l’offre commerciale», exprime le coordonnateur, qui souhaite profiter de la vitrine donnant sur le cégep Saint-Laurent et proche de la station Du Collège pour attirer des gens aux cours commerciaux de jiu-jitsu. Des curieux cognent déjà à la porte.
Une instructrice administre des cours non mixtes d’autodéfense pour les femmes. L’objectif est d’enseigner non seulement comment se battre, mais surtout le sentiment du droit à la riposte pour se protéger.
Rapport à la violence
Les arts martiaux permettent d’aborder directement la relation des jeunes avec la violence agie et subie, appuie M. Barbeau. «Elles peuvent être un couteau à double tranchant», nuance-t-il.
Plusieurs des instructeurs de la salle sont aussi des intervenants. «Un éducateur sait comment montrer le lien entre la vie quotidienne et les valeurs apprises dans la pratique», explique le coordonnateur.
Le ring ne ment pas. Il révèle des choses que la personne même ne savait pas sur elle.
Nicolas Barbeau – Coordonnateur du projet arts martiaux au RAP Jeunesse
C’est le fait de donner des modèles auxquels les jeunes peuvent s’identifier et se référer qui est au cœur de la démarche, préconise M. Obregon-Ida. Un des acquis mentionnés est celui du consentement.
Durant un sparring ou une compétition, l’adversaire peut se retirer en tout temps de la confrontation. Si une blessure affecte ses capacités mentales, l’arbitre ou l’entraîneur arrête le combat. «On peut facilement faire le lien entre le sport et le consentement sexuel libre et éclairé», illustre M. Barbeau.
Des discussions de groupe succèdent aux séances de pratique. Les participants s’expriment sur des sujets d’actualité, ou parlent au besoin de leurs expériences de vie.