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5 mauvais arguments contre le burkini

 

C’est fou, il y a une semaine à peine on déchirait sa chemise pour que les femmes ne puissent retirer la leur, et aujourd’hui, on s’offusque qu’une femme ait daigné porter trop de tissu lors d’une baignade. Que les mêmes personnes réclament que des femmes soient obligées de couvrir certaines parties de leur corps dans certaines circonstances et d’en découvrir d’autres selon le contexte pourrait paraître contradictoire, mais au fond, toutes ces opinions sont cohérentes entre elles : elles visent à délimiter les contours d’un code vestimentaire acceptable pour la femme. Plusieurs arguments – de modérément intolérant à très raciste – ont émergé suite à la publication de la photo d’une baigneuse en burkini au zoo de Granby. Prenons le temps d’analyser pourquoi il s’agit d’arguments mauvais.

  1. Ils nous imposent leur culture

Non. La femme qui se baigne en burkini n’impose rien à personne. Au pire, elle nous expose à un élément de sa culture et, le cas échéant, si cela vous déplaît, vous avez le loisir de détourner le regard. Il n’existe pas de droit à ne pas être exposé à quelque chose. C’est exactement la raison pour laquelle un certain YMCA était dans le tort d’avoir givré ses vitres pour ne pas exposer des juifs hassidiques d’Outremont à des corps féminins s’émancipant. C’est quand même drôle qu’on perçoive la femme en burkini, l’une des personnes parmi les moins privilégiées, comme une menace à notre culture. C’est dire le peu d’estime qu’on a de soi.

  1. À Rome on fait comme les Romains

J’ai du mal à comprendre ici l’application de cette maxime. Est-ce que cela voudrait dire qu’au Québec, on suit les lois québécoises et qu’on jouit de bénéfices comme l’égalité, la liberté, et ainsi une femme a autant le droit de porter ce qu’elle veut qu’un homme et donc on la laisse tranquille avec son burkini? Ou est-ce que ça veut dire qu’en voyage en Iran, j’enfile mon burkini si je veux me baigner – après en avoir fait bien sûr la demande au guide suprême? Personnellement, je préfèrerais que les règles de droit s’appliquent partout – y compris à Rome – et que je puisse me baigner comme bon me semble où bon me semble.

  1. C’est pas sécuritaire et c’est injuste parce que moi j’ai pas le droit de porter un t-shirt

En réalité, fait de tissu synthétique et relativement près du corps, le burkini respecte tout à fait les règles de sécurité prescrites par la Société de sauvetage. Au Zoo de Granby, sont également acceptés les combinaisons isothermes et les rashguards. Ça fait que si tu veux vraiment mettre un t-shirt pour te baigner, tu peux.

  1. Qu’elles s’intègrent!

Il est assez curieux que l’immersion d’une femme dans la piscine publique d’un parc thématique soit perçue comme un signe de non-intégration. Ne pas s’intégrer serait plutôt de rester chez soi, non? Ou encore de contempler jalousement ce plan d’eau dont les autres peuvent jouir sans souci… Et si ce burkini était pour cette femme un outil d’intégration sans lequel elle ne se sentirait pas à l’aise de fréquenter la piscine du zoo? Préférerions-nous qu’elle ne se baigne tout simplement pas? Ça aurait le résultat bien commode de ne déranger personne, puisqu’on ne le verrait pas.

  1. C’est contre l’égalité entre les hommes et les femmes

C’est beau de voir à quel point le féminisme gagne des adeptes lorsqu’il est question de rejeter les symboles identitaires d’autrui. Or, ce qui serait contre l’égalité entre les hommes et les femmes, ce serait d’imposer un code vestimentaire aux femmes, et pas aux hommes. Or, vouloir interdire le burkini, c’est exactement imposer un code vestimentaire aux femmes. Les femmes sont autonomes et capables de choisir pour elles-mêmes de quelle façon elles ont envie de faire trempette. Il se peut qu’elles répondent à des impératifs dictés par le patriarcat – comme certaines le font en abordant une tenue sexy ou du maquillage. Mais ce qui serait vraiment très paternaliste, c’est de présumer des raisons pour lesquelles elles portent le burkini – ou le maquillage. Ou, pire encore, de prohiber leur accès à la baignade en prétendant vouloir les libérer du joug de leur religion. De la belle émancipation.

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