Soutenez

Le cerveau mis à nu

Photo: INSERM-CEA ​
Kieron Monks - Metro World News

Barack Obama annonçait récemment son grand projet scientifique : décoder le cerveau humain. Le président des États-Unis ne peut toutefois être que témoin dans ce domaine où les avancées dépassent l’entendement. Métro jette un coup d’œil dans votre tête.

Voyez le graphique du projet d’Obama: le cerveau de 1 G$ ici.

Les images défilent en face du sujet. Des arbres. Une spirale. Il s’efforce de visualiser une route qui traverse ces images. L’ordinateur détecte les neurones qui s’excitent, marquant une longue pointe sur la charte.

«Nous l’observons pendant qu’il est en train de planifier et de chercher des images, explique le Dr Zeb Kurth-Nelson, du Wellcome Trust Centre for Neuroimaging de Londres. Ce programme étudie les dépendances. Il teste la capacité des sujets à répondre à des stimuli visuels et surveille l’activité cérébrale.»

«La partie du cerveau qui sert à prévoir ne fonctionne pas chez les héroïnomanes, continue le Dr Kurth-Nelson. En identifiant les endroits endommagés, nous pourrons fournir un traitement.»

Ce genre de programme repose sur les nouvelles techniques de lecture cérébrale qui ont rendu nos pensées beaucoup plus accessibles. L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) s’est fait connaître dans les années 1990. À cette époque, les scientifiques ne faisaient que détecter un minimum d’activité cérébrale. Aujourd’hui, ils peuvent cibler des types de comportements et les changer.

Ces avancées sont soutenues par les plus hautes sphères du pouvoir. «Nous devons investir dans les meilleures idées. Nos scientifiques sont en train de décoder le cerveau humain pour trouver des façons de vaincre l’Alzheimer», a dit le président Obama lors de son dernier discours à la Nation, qui survenait juste avant l’annonce d’un projet de plusieurs milliards de dollars consacré au décodage complet de l’activité cérébrale. Ce projet sera un peu plus coûteux que son pendant européen, qui cherche à reproduire de façon parfaite l’activité cérébrale humaine.

Les instigateurs de ces deux projets prétendent qu’il y aura un grand retour sur investissement pour la société. Une des principales cibles est le récidivisme criminel. Plus de 60 % des prisonniers américains récidivent. La capacité de décoder les comportements permettra de repérer les gens qui sont des criminels en puissance.

«Connaître les risques offre une façon d’intervenir qui peut soutenir le système juridique autant que les contrevenants, avance le Dr Kent Kiehl, du Mind Research Network, une organisation qui se spécialise dans la recherche sur les maladies mentales. Plus les traitements s’amélioreront, plus les juges pourront décider s’ils envoient quelqu’un en prison ou en traitement.»

Non seulement les scientifiques sont capables de lire le cerveau, mais ils sont aussi capables de parler sa langue. Cette année, le Dr Miguel Nicolelis, professeur à l’Université Duke, a créé la première interface cerveau à cerveau, qui dirige les signaux cérébraux des rats vers des électrodes qui leur permettent de communiquer entre eux. Il espère que nous pourrons un jour brancher plusieurs sujets en «réseau cérébral» pour leur permettre de résoudre des problèmes en groupe.

Cette technologie est déjà utilisée par certaines personnes pour contrôler leurs prothèses corporelles par la pensée. Le Dr Nicolelis croit que les signaux émis par le cerveau peuvent être exploités de façon qu’on puisse exécuter n’importe quelle tâche motrice par la pensée. Ces signaux peuvent être contrôlés de manière à induire le désir dans un sujet en stimulant des neurones spécifiques.

Toutes ces possibilités soulèvent toutefois des inquiétudes sur le plan niveau éthique. «Les employeurs pourront trier leurs employés, et les écoles pourront repérer les vandales ou les tricheurs», s’inquiète Paul Root Wolpe, professeur de bioéthique. Il y aurait d’ailleurs déjà eu des tentatives pour légiférer contre les abus auxquels pourrait mener l’émergence de cette technologie.

Remue-méninges

  • Prothèses contrôlées par la pensée. En 2012, des essais entre le cerveau et une machine ont été réussis; des personnes souffrant de paralysie ont été capables d’utiliser cette technologie.
  • Tatouages électroniques. On surveille les réactions du cerveau avec une «seconde peau» portable qui a été mise au point par des scientifiques américains.
  • Zèbracadabra. La première carte complète du cerveau d’un organisme a été faite sur un poisson-zèbre. La carte, terminée en mars dernier, pourrait expliquer bien des choses, de l’épilepsie à la calvitie.

Cartographie du cerveau. La nouvelle course à l’espace

US President Speaks On American Recovery Act
(Le président Obama croit que la compréhension exhaustive du cerveau aura des retombées majeures, comme les recherches qui ont servi à identifier le génome humain. / Getty)

Insistant sur l’importance de cartographier le cerveau, Barack Obama a évoqué la fameuse course à l’espace entre les États-Unis et l’URSS pendant la guerre froide.

L’engagement du président a été en partie forcée par les plans de l’Union européenne. Cette dernière a déjà dépensé de fortes sommes sur un projet similaire qui a attiré les meilleurs scientifiques américains.

La cartographie du cerveau est au cœur des stratégies d’expansion technologique et économique. Comme l’armée est un grand investisseur, cela ajoute aux similarités avec la guerre froide.

***
Analyse
À quel point la technologie de lecture du cerveau est-elle avancée?

C’est maintenant possible de localiser l’activité. Nous pouvons détecter des réactions qui correspondent aux animaux, aux humains ou aux couleurs.

Jusqu’où sommes-nous capables d’interagir avec les informations sensorielles?
Les signaux électriques ont bien fonctionné avec les prothèses, mais attacher des électrodes au cerveau est douloureux et dangereux. L’optogénétique est cool, mais il y a des millions de connections à contrôler. Dans 10 ans, un laser pourrait être utilisé.

Quelle est la perspective la plus excitante pour l’amélioration du cerveau?
Tout le monde parle de l’alzheimer, mais je trouve que le plus excitant est la possibilité d’ajuster nos paramètres. Tout le monde a un poids naturel biologique, mais il est souvent trop élevé. Nous pourrions l’ajuster. Il serait également utile de programmer des périodes où la concentration est élevée.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.