Quand Marie-Christine Bergeron a annoncé son départ de TVA, en décembre 2020, plusieurs ont cru que la journaliste passait dans le camp ennemi, chez Bell Média, qui s’apprêtait à inaugurer la salle de nouvelles et les bulletins d’information tout neufs de Noovo, au printemps 2021.
Il n’en était pourtant rien. Après 22 ans à occuper à peu près toutes les chaises imaginables à TVA et LCN (reporter terrain, lectrice de nouvelles, animatrice du Québec Matin, de Histoires en cour, de J.E., alouette – «Tu devrais plutôt me demander ce que je n’ai pas fait», rigole-t-elle), Marie-Christine Bergeron, aujourd’hui âgée de 44 ans, avait des envies de temps de qualité en famille (ses ados commencent leur première et quatrième secondaire) et d’autres projets, comme des documentaires. Elle sentait qu’elle avait fait le tour d’un jardin qu’elle connaissait par cœur, et avait envie d’aller voir ailleurs si elle y était.
La pandémie lui était aussi entrée dedans de plein fouet; elle avait attrapé la COVID-19 en octobre 2020, au plus fort de la deuxième vague, et l’épisode n’a apparemment pas été un pique-nique au parc. Son amoureux a lui aussi chopé le virus et a dû être transporté à l’urgence.
«Je ne suis pas partie de TVA en claquant la porte, je ne suis pas partie en mauvais termes, assure Marie-Christine en conversation avec Métro. J’étais fatiguée et je voulais prendre une pause. Je ne suis pas quelqu’un d’ultra-carriériste. Je me suis demandé ce que j’avais le goût de faire.»
Au travail, le contexte de la COVID-19 les avait aussi forcé.e.s, ses collègues et elle, à se retirer dans des bureaux distincts, et l’énergie caractéristique d’une salle de nouvelles bourdonnante lui manquait.
«Ça ne me ressemblait pas. Mais je n’ai pas quitté TVA à cause de la COVID non plus. C’est un mélange de plein de choses. Ça faisait un petit bout que je réfléchissais à mon avenir. J’avais 20 ans quand j’ai commencé à TVA…! (Rires.) J’avais envie de me mettre en danger et de connaître autre chose.»
Foi en l’avenir
Dans la dernière année, alors qu’on croyait qu’elle s’offrait une sabbatique méritée pour se la couler douce, la communicatrice a mitonné et signé deux séries documentaires qu’elle anime et réalise, dont elle garde les sujets secrets pour l’instant. La première sera disponible sur Crave en novembre, et la seconde atterrira en 2023 sur… Vrai, plateforme de Vidéotron, donc de Québecor. Preuve, signale Marie-Christine, que ses rapports avec son ex-employeur sont demeurés cordiaux.
Et ce n’est qu’au printemps dernier que l’entente s’est finalisée avec Bell et Noovo, en vue de son entrée en ondes à la barre de Le Fil 17, le 29 août. Une offre qu’elle ne «pouvait pas refuser», soutient-elle.
«J’ai encore de l’énergie, j’ai encore la fibre des nouvelles. Le bulletin de 17h, on peut prendre la journée pour le préparer et le concevoir, alors que moi, j’étais habituée à l’actualité en boucle, en continu, à LCN. C’est un produit fignolé qu’on prend le temps de bien faire. Parler aux gens à l’heure du souper, c’est un moment privilégié et important.»
Le ton de Marie-Christine Bergeron, à Noovo, en sera un «proche des gens» et «collé sur la nouvelle». Elle est restée, pendant son séjour loin des projecteurs, la «freak de nouvelles» qu’elle a toujours été, constamment branchée à toutes les sources de manchettes. Même si sa progéniture croyait qu’elle «décrocherait» temporairement. En vain.
«Peu importe le réseau où je vais travailler, je ne changerai pas de ton, de personnalité ou de look, spécifie-t-elle. Je reste la fille d’Alma avec son accent, qui prononce étrangement des mots en anglais (rires). Quand c’est drôle, je ris. Je suis une fille transparente, sans filtre. On est à une ère où les lecteurs de nouvelles ont le droit d’avoir de l’émotion, de s’insurger, s’attrister ou se réjouir d’une situation. Pour moi, ç’a toujours été comme ça. Il n’y a rien de plus payant que l’authenticité.»
Oui, nous sommes bombardé.e.s d’informations de toutes parts, sur tous nos appareils et à tout instant de la journée, et la dame concède qu’actuellement, «c’est un peu plus dur d’aller chercher les jeunes», mais la moyenne d’âge de l’auditoire de Noovo se situe dans la mi-quarantaine, signale-t-elle. Des données qui lui donnent foi en l’avenir, souvent remis en question, de la télévision dans nos habitudes de consommation de grands titres.
«Dans un bulletin de nouvelles, il y a une chaleur, une discussion, un échange, une proximité avec le public. Je pense que les bulletins de nouvelles ont encore vraiment leur place au Québec. C’est sain, pour une société, d’avoir différentes options, en termes de bulletins de nouvelles, d’offres d’actualité, et il faut s’en réjouir.»
Marie-Christine Bergeron s’emballe d’avance pour la soirée électorale qu’elle coanimera avec son collègue Michel Bherer le 3 octobre, et qui mettra à contribution plusieurs forces vives de Noovo. Celle qui «tripe» sur les affaires policières et s’intéresse aux drames humains derrière les enquêtes est aussi heureuse de pouvoir compter sur la collaboration de la journaliste Marie-Michelle Lauzon, qui vient de quitter Radio-Canada pour relever ce nouveau défi, et qui a largement couvert ce créneau dans le passé.
Vis-à-vis Sophie Thibault
Heureux hasard, Marie-Christine Bergeron s’installe au pupitre du Fil 17 alors que son ancienne consœur Sophie Thibault s’empare de la même case horaire à TVA, en succession à Pierre Bruneau, parti à la retraite en juin.
Les yeux braqués sur sa propre mission – «Je dis toujours à mes enfants de se concentrer sur eux-mêmes, et de pas se préoccuper de ce que les autres font» –, Marie-Christine ne compte pas beaucoup zieuter la compétition et s’affaire surtout à fabriquer une émission «le fun à écouter». Elle est néanmoins contente de voir la gent féminine s’imposer particulièrement en information cette année, sur différents réseaux.
«J’ai toujours été entourée de modèles féminins exceptionnels, et je n’ai jamais souffert du fait d’être une femme dans mon contexte de travail. Sur les trois bulletins de 17 heures au Québec, deux femmes ont quand même été nommées. C’est réjouissant de voir ça», souligne-t-elle fièrement… et refusant toutefois d’aborder le sujet du congédiement controversé de Lisa LaFlamme de CTV par Bell Média, rendu public la semaine dernière, et qui a dégagé de forts effluves d’âgisme.
Et Marie-Christine Bergeron se souvient d’une Sophie Thibault généreuse qui lui avait passé un coup de cellulaire à 23h lorsque, à 20 ans, elle venait de terminer l’un de ses premiers «directs» au bulletin de 22 heures, à partir de Trois-Rivières.
«Je pensais que c’était ma mère. Mais, non, c’était Sophie Thibault qui m’appelait pour me dire: “Marie, tu es excellente, tu as vraiment de l’avenir!” Ça m’avait donné des ailes!»
Le Fil 17 avec Marie-Christine Bergeron entrera en ondes le lundi 29 août, à 17h, à Noovo.