Nathalie Garceau, artiste-peintre qui a son atelier et son école d’art pour adultes à Ahuntsic, a participé au documentaire La seizième de monsieur Nagano de Michel Barbeau. Le film, qui sera diffusé à la fin de l’année, retrace la dernière saison de Kent Nagano à la tête de l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM). Mme Garceau a réalisé par synesthésie une œuvre originale inspirée par la symphonie numéro 9 de Beethoven.
Comment en êtes-vous arrivés à participer à ce documentaire?
Le réalisateur était à la recherche de personnes pour qui la musique classique a un impact dans la vie de tous les jours. J’ai indiqué que je faisais de la peinture en synesthésie avec de la musique classique. Il faut savoir que maestro Kent Nagano connait la synesthésie parce que celui qui l’a formé était un synesthète inné. Il lui a appris à diriger les orchestres en utilisant de la coloration dans la musique.
Qu’est-ce que la synesthésie en quelques mots?
C’est le processus par lequel deux sens sont liés. Dans le cas d’un peintre, la musique va influencer la couleur, la touche et le rythme dans la composition de son œuvre.
Chez certaines personnes, c’est inné, mais ce n’est pas mon cas. C’est plus un processus créatif que j’ai développé. C’est une forme d’improvisation en peinture. Cela fait quelques années que je crée en synesthésie. À force de peindre des orchestres depuis de très nombreuses années, la synesthésie est venue naturellement à force de m’imprégner des ambiances musicales. Aujourd’hui, toutes mes œuvres abstraites sont créées en synesthésie.
Est-ce rare en peinture de faire de la synesthésie?
Je ne suis pas la première à le faire. Quand Kandinsky a commencé à peindre en abstrait au début du 20e siècle [artiste russe considéré comme le fondateur de la peinture abstraite décédé en 1944, NDLR], il s’inspirait de la musique classique. C’était un synesthète inné. Il allait écouter des concerts et peignait en synesthésie en revenant chez lui, car il gardait en mémoire ce qu’il a écouté et ce qu’il a vu dans sa tête.
Quel lien a été fait entre votre œuvre et le documentaire sur Kent Nagano?
Le documentaire est basé sur la Symphonie numéro 9 de Beethoven. C’est l’œuvre préférée de maestro Nagano qu’il joue dans les tournants de sa vie. La toile que j’ai peinte en direct pour le documentaire, je l’ai réalisée en écoutant un enregistrement joué par OSM.
Est-ce que vous avez considéré cela comme une consécration pour une artiste peintre de participer à un tel projet?
J’ai été très touchée qu’on fasse appel à moi. Je pense que j’apporte une dimension artistique qui est très complémentaire à la musique. J’ai bien hâte de voir comment cela va sortir à l’écran.
Vous deviez être dans vos petits souliers quand vous avez présenté votre peinture en disant; ‘‘voilà ma vision de la Symphonie numéro 9 de Beethoven’’?
Il y avait une certaine pression, mais le fait de me mettre dans une situation inconfortable fait partie de mon processus créatif. Un artiste qui reste dans ses pantoufles et qui reproduit indéfiniment la même chose devient un peu figé.
Est-ce que dans votre école vous formez les gens à la synesthésie?
J’aborde la synesthésie au moins une fois par session parce que ce n’est pas tout le monde qui a les mêmes goûts musicaux. Je leur fais entendre diverses ambiances musicales pour voir ce que cela leur fait. Ce qu’ils aiment, ce qui les inspire et les amène à avoir du plaisir à créer.
Première diffusion du documentaire La seizième de monsieur Nagano de Michel Barbeau, le 30 décembre sur Radio-Canada. L’école de Nathalie Garceau est au 1417, rue Fleury Est, à Ahuntsic.