Le bilan s’alourdit au CHSLD Notre-Dame-de-la-Merci. Depuis le début de la crise sanitaire, sept résidents y ont perdu la vie après avoir contracté le coronavirus. Vingt-quatre autres en sont actuellement infectés. La crainte s’amplifie chez le personnel soignant de cet établissement de santé qui est devenu l’un des importants foyers de contagion d’Ahuntsic-Cartierville.
Actuellement, les résidents qui sont atteints de la COVID-19 ont été isolés dans une aile du CHSLD. Des gardiens de sécurité veillent aux portes d’accès afin d’éviter le va-et-vient.
«Ce que nous disent nos membres, c’est qu’il y a des cas qui se sont déclarés ailleurs au CHSLD Notre-Dame-de-la-Merci et qu’on risque d’en avoir partout», prévient Kathleen Bertrand, présidente du Syndicat des professionnelles en soins du Nord-de-l’Île-de-Montréal (SPSNIM-FIQ)
Actuellement, 34 membres du personnel au CIUSSS du Nord-de-l’île-de-Montréal sont atteints de la COVID-19. Combien travaillaient au CHSLD Notre-Dame-de-la-Merci ? Les représentants syndicaux ne le savent pas.
«L’employeur nous dit qu’il ne peut pas nous donner cette information sous prétexte qu’il n’y a pas accès», indique Benoit Taillefer, vice-président au syndicat de la Fédération de santé et de services sociaux-CSN du CIUSSS.
Les représentants des travailleurs avouent avoir du mal à rassurer les travailleurs de la santé, bien qu’il y ait maintenant assez de masques et de visières pour tout le monde
«Cela a pris beaucoup de temps avant que ces protections arrivent et qu’on mette un protocole, soutient M. Taillefer. Au moment où étaient déclarés les premiers cas, il n’y en avait pas.»
Mais au-delà de la gestion d’équipements, M. Taillefer constate encore beaucoup d’incertitudes chez les membres.
«Est-ce que les chariots de la cuisine qui viennent de l’étage où il y a des contaminations sont soigneusement désinfectés ? Est-ce que les gens de la cuisine devraient porter des masques ? Les protocoles ne sont pas clairs; il y’a beaucoup de questions et nous n’avons pas encore de réponses.»
Par ailleurs, le personnel soignant doit aussi vivre des deuils. «Il y a le côté humain, rappelle Mme Bertrand de la SPSNIM-FIQ. Il y a des gens là-dedans qui sont hébergés depuis des mois, soignés par les infirmières. On sait qu’il faut savoir vivre avec la mort, mais dans un CHSLD, il y a un décès une fois de temps en temps, pas sept en trois jours.»
Récemment, les appréhensions du personnel ont été suffisamment fortes pour que nombre d’entre eux refusent d’aller travailler il y a une semaine. «L’employeur a pris des gens de l’hôpital Sacré-Cœur pour aller à Notre-Dame-de-la-Merci parce que des membres ont eu peur ont fait valoir leur droit de refus», souligne M. Taillefer.
Les divers syndicats avaient aussi fait valoir la possibilité de retirer les femmes enceintes et les personnes immunodéprimées des établissements. Une démarche commencée vers le 15 mars et dont la conclusion n’a eu lieu que deux semaines plus tard.
«Une de nos membres enceintes avait demandé son retrait du milieu le 23 mars, mais elle était toujours au travail à Notre-Dame-de-la-Merci le 27», relève David Routhier, président du syndicat local de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS). Elle a demandé à exercer son droit de refus.
«Il a fallu aller jusqu’au droit de refus pour faire bouger le CIUSSS», souligne-t-il. Aujourd’hui, les femmes enceintes ont été retirées des foyers d’infection.
Les représentants syndicaux ne constatent toutefois pas encore de pénurie de personnel.
Contacté dans le cadre de ce reportage, le CIUSSS du Nord-de-l’île-de Montréal n’a pas voulu commenter, mais a promis de revenir avec des réponses dès que possible.