Le cadre

Vendredi, 17 h 15, station du Collège, ligne orange, direction Montmorency. Il entre avec la désinvolture cégépienne de ses quelque 18 ans. Maintenant sorti de l’adolescence, il est occupé à se raffiner. Lui, ses grandes jambes et ses longs bras se déposent sur un banc, face à celui que j’occupe. Il tient dans ses mains un cadre vide, doré et ancien.

Il le pose bien droit sur ses genoux, ce qui donne l’impression qu’il est encadré de la taille à la cime de sa tête. On dirait un tableau anachronique. Une posture de la Renaissance servie par un sujet, des couleurs et un accoutrement complètement contemporains.

Pour le plaisir, je l’imagine au XVIe siècle. Il s’appelle Ambroise De-Bonniol-Du-Trémont. C’est un gentilhomme qui porte une toque ornée d’une plume et une cape de velours. Il habite un manoir austère et humide au beau milieu de la campagne française. Sa femme, Cassandre, âgée de 16 ans, brode sagement dans la pièce d’à côté. Il se demande si, pour tromper l’ennui, il n’irait pas à la chasse à courre. Quoique son chien préféré soit blessé.

Soudain, le tableau devant moi a le rhume et se met à tousser. Il se mouche. Regarde l’heure sur son cellulaire. Son anorak orange et sa tuque de laine molle me ramènent au temps présent. Le jeune homme s’appelle peut-être Philippe-Christophe Pothier Letendre. Il rentre probablement chez lui, dans son appartement urbain et bien chauffé où sa blonde, Pénélope-
Sidonie, l’attend.

À moins qu’il ne vive chez ses parents? Et pour se divertir ce soir, P.C. (c’est son surnom) se promet une séance intense de jeu sur sa PlayStation 3 avec sa promise et des amis.

Mais avant, il ira promener son chien. Il descend à la station Square-Victoria. Son cadre sous le bras.

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