La valeur des convictions

Ainsi donc, Louise Beaudoin a décidé de retourner au PQ. C’est dommage. Pierre Curzi a lui aussi essayé, mais Pauline Marois lui a fermé la porte.

On peut comprendre ce qui les a motivés à vouloir rentrer au bercail. Mais on ne peut voir rien d’autre, dans l’aboutissement en queue de poisson de leur démarche, que le cul-de-sac dans lequel est actuellement promis toute tentative de « faire de la politique autrement », pour reprendre le cliché.

Leurs raisons de quitter le PQ, il y a un peu moins d’un an, étaient pourtant légitimes. Ça vaut la peine de rappeler le contexte.

Le gouvernement libéral avait annoncé qu’il supportait à coup de 200 millions le financement du l’amphithéâtre à Québec, donnant la garantie qu’il manquait au duo Labeaume-Péladeau. Quelques voix se sont élevées sur le processus par lequel l’entente a été conclue entre la Ville de Québec et son partenaire privé.

La réponse de l’opposition officielle n’a pas été de poser des questions sur la légalité ou la légitimité de l’affaire. Plutôt, le parti québécois a décidé d’en rajouter une couche : Agnès Maltais déposait le projet de loi 204, qui demandait à l’Assemblée nationale de mettre l’équivalent d’un cadenas sur les tribunaux, afin d’être certain que personne ne conteste l’entente entre la Ville et Quebecor.

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On peut être d’accord ou pas avec le projet, et avec son financement par le gouvernement (transparence : j’ai beau avoir été un gros fan de Joe Sakic, je trouve personnellement que c’est une très mauvaise idée, j’aurai l’occasion d’y revenir). On peut même comprendre un partisan des Nordiques d’être plus préoccupé par le retour à court terme de « son » équipe que du bon fonctionnement de nos institutions.

Mais ce n’est jamais une bonne chose quand on tente d’empêcher les mécanismes démocratiques normaux d’opérer. Du point de vue de quiconque comprend le moindrement les nécessités des contrepouvoirs, c’est une abomination.

N’importe quel parlementaire digne de ce nom aurait dû sauter au plafond devant une manœuvre aussi bassement populiste, et qui crée en plus un dangereux précédent. Même si c’est parfois irritant, une démocratie en santé a besoin de tribunaux indépendants. Ça inclut de courir le risque qu’un casseux de party décide d’aller en cour afin de contester un partenariat qui pourrait ultimement ramener les Nordiques.

L’alternative est de donner un chèque en blanc à nos élus pour conclure des ententes avec qui ils veulent, en tout temps, à toute condition. Ça vous tente vraiment?

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Peut-être que ça n’était pas leur seule motivation, mais Louise Beaudoin, Pierre Curzi et Lisette Lapointe ont tout de même eu raison d’être mal à l’aise et de claquer la porte du PQ en juin dernier. Malheureusement, les sondages récents ont eu raison de leurs convictions, dans les deux premiers cas, et l’absence d’un véhicule de rechange dans le troisième.

Ce n’est pas sain, et ça envoie de très mauvais messages.

Un, qu’en-dehors d’un grand parti, point de salut, parce que notre système électoral actuel – dont les fondements remontent au Moyen-Âge – donne la grosse part aux deux premiers partis. Sauf rare exception, le troisième ne ramasse que les miettes, et les autres des poussières, et encore, et ce même s’ils ont obtenu des parts appréciables des voix, comme c’est arrivé à Québec solidaire et à l’ADQ. Bref, soit on rentre dans les rangs, soit on disparait. Louise Beaudoin est retournée au PQ. Pierre Curzi a bien essayé. Lisette Lapointe a passé « go » sans réclamer 200 $.

Deux, que les principes, les idéaux et les convictions, dont on a au moins besoin d’un minimum en politique, n’ont plus vraiment d’importance quand le pouvoir est à portée de main. Et que ceux qui ont des convictions en paient le prix. Avis aux esprits libres qui auraient le goût de retenter l’expérience…

Ça donne de la très petite et très poche politique.

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