Baltimore, le feu aux poudres

Photo: AP

Langston Hughes, poète afro-américain, avait écrit ceci avant de mourir en 1967 : «Les Nègres, tendres et dociles, doux, humbles et gentils. Attention au jour où ils changeront d’avis.» Ce jour est-il venu avec les émeutes de Baltimore?

Martin Luther King, s’inspirant de Gandhi, s’est toujours refusé à répondre à la violence par la violence et il aurait sûrement désapprouvé les affrontements de ces derniers jours dans la 26e ville américaine, qui s’était d’ailleurs embrasée lors de son assassinat en 1968.

Mais, aimait rappeler le prix Nobel de la paix, une émeute, «c’est le langage de celui qui n’est pas entendu». Sur ce point, les Afro-Américains ont une longue histoire de rébellion. Contre l’esclavage, la ségrégation et les inégalités de toutes sortes.
«L’Amérique blanche est amnésique quand il s’agit des Noirs à l’origine de mouvements sociaux, parfois violents», précise, dans un échange de courriels, Charles Gallagher, sociologue à l’université La Salle de Philadelphie.

Aujourd’hui, les États-Unis ont un président noir, 44 Afro-Américains au Congrès et un demi-millier de maires issus de la seconde minorité. Mais l’arbre cache la forêt.

La ségrégation résidentielle est plus forte que jamais, et le pays le plus riche de la planète est le champion occidental des injustices sociales et économiques, surtout depuis la crise financière de 2007-2008.

La probabilité d’être au chômage pour un Noir est toujours deux fois plus élevée que pour un Blanc. À chaque fois, il suffit d’une étincelle pour mettre le feu aux poudres. À une petite heure de Washington, Baltimore est une bombe à retardement sociale. Comme d’ailleurs toutes les zones défavorisées à majorité noire des grandes villes américaines.

À chaque embrasement, une bonne partie de l’Amérique blanche voit dans les émeutiers des «voyous». Tout jeune Noir est un criminel en puissance, et la prison est la seule solution pour endiguer la violence.

Elle n’est pas «gratuite», cette colère sporadique, rétorque l’Amérique noire et pauvre. C’est une prise de parole contre les brutalités policières et les injustices de tous les jours, même si la plupart des Afro-Américains de la classe moyenne ne se reconnaissent pas dans les émeutes de Baltimore.

La question raciale va se retrouver en toile de fond de la prochaine campagne présidentielle.

«Quand serez-vous satisfaits?» demandait dans I Have a Dream Martin Luther King à ses «frères» et «sœurs». La réponse était celle d’un visionnaire : «Nous ne pourrons jamais être satisfaits tant que le Noir sera victime des indicibles horreurs de la brutalité policière.»

Ce discours d’il y a un demi-siècle n’a pas pris une seule ride.

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