Être ou ne pas être dans l’Union européenne
Dans quelques heures, avec le référendum sur le «Brexit», les Britanniques donneront ou non raison à Winston Churchill. «Chaque fois qu’il nous faudra choisir entre l’Europe et le grand large, nous choisirons toujours le grand large», aimait répéter le Vieux Lion.
Si les sujets de Sa Majesté votent en se basant sur des arguments rationnels, ils voteront pour le maintien dans l’Union européenne (UE) afin de ne pas précipiter leur pays dans la récession, comme le prédit la City, première place financière mondiale. Après tout, super zone de libre-échange avec ses 508 millions d’habitants, l’UE absorbe 44 % des exportations britanniques. Mais…
Le Brexit (contraction de «british» et d’«exit») l’emporterait haut la main si les Britanniques devaient voter avec leurs tripes. Ils sont en dehors de l’euro et n’ont que peu d’intérêt dans la construction d’une Europe politique, militaire et diplomatique.
Boris Johnson, l’ancien maire de Londres qui a fait campagne en faveur de la sortie de l’UE, n’a d’ailleurs pas cessé de répéter ceci : «Napoléon, Hitler, plusieurs personnes ont essayé de faire un super État européen, et cela s’est terminé de manière tragique. L’Union européenne est une autre tentative, avec des méthodes différentes.»
Ces méthodes, affirment les partisans du Brexit, sont aujourd’hui basées sur une «dictature technocratique» gérée par les 40 000 fonctionnaires de la Commission européenne, l’organe exécutif de l’UE.
Si les partisans du divorce devaient l’emporter, cela pousserait les Écossais à tenir un deuxième référendum sur leur indépendance. Cette fois, il risquerait d’être gagnant, car au pays du kilt et du whisky, on tient vraiment à l’UE. Bref, le Brexit pourrait entraîner le Scoxit.
Non seulement une sortie de l’UE affaiblirait l’édifice européen (la Grande-Bretagne représente 15 % de la richesse des 28 États membres), mais elle pourrait aussi donner des idées à deux pays eurosceptiques : la Suède et la Hongrie. Sans compter la Grèce qui, à cause de son endettement himalayen, flirte avec le Grexit.
On le voit, d’autres germes de division guettent l’Europe, qui pourrait vite devenir un château de cartes.
Dans tous les cas, depuis leur arrimage au Vieux Continent, en 1973, les Britanniques ont toujours voulu une Europe à géométrie variable. Ce qui les intéresse avant tout, c’est son riche marché de consommation, le plus grand au monde.
Jamais conquis depuis Guillaume le Conquérant en 1066, jaloux de leur souveraineté, fiers d’avoir inventé la démocratie moderne, ils estiment être une société distincte, et s’ils doivent choisir de rester en Europe, ils ne le feront pas aussi massivement qu’en 1975, année où le «oui» l’emporta à 67 %.
Ce deuxième référendum sur la place de la «perfide Albion» dans la maison européenne montre bien que même en y demeurant, elle continuera à mettre des bâtons dans les roues de la construction politique de l’UE.