Un monument du soccer haïtien a 100 ans

Le pape, la reine ainsi que tous les paliers du gouvernement canadien et celui d’Haïti ont écrit au centenaire qui habite Montréal-Nord depuis 30 ans pour le féliciter de sa longévité.

« Le nom de Paul Lamaute évoque la longévité et le sérieux pas seulement pour la communauté haïtienne, mais pour tout le monde. Il nous donne envie de nous tenir en forme », explique son ami Jean-Marie Julien qui le connaissait déjà en Haïti.

Ancien entraîneur de l’équipe de soccer de première division de l’Étoile haïtienne, M. Lamaute a aussi beaucoup donné au sport québécois.

« Ce dont je suis le plus content est d’avoir sauvé pas mal d’âmes parce que c’est à cet égard que j’ai voulu préparer des enfants de 7 et 8 ans à jouer au soccer pour les empêcher d’aller vers le mal et la cigarette, raconte M. Lamaute. Je suis un exemple à suivre parce que si les aînés se mettaient en tête de guider les jeunes, il y aurait bien moins de choses mauvaises ici-bas. »

Cents ans

M. Lamaute est né le 26 mars 1914 dans une famille aisée de Port-au-Prince. Les médecins qui l’ont examiné à l’époque n’auraient sûrement pas prédit sa longévité puisque le petit Paulo avait une santé fragile. C’est pour cette raison que sa famille avait dû déménager à Pétionville, lieu de villégiature surplombant la capitale.

Dès l’âge de 13 ans, M. Lamaute a commencé à pratiquer le soccer, mais aussi la course, la lutte et l’escrime. En 1938, il a fondé son premier club de soccer.

Diplômé en éducateur physique et entraîneur de l’équipe de soccer Volcano, en 1954, M. Lamaute a été recruté par l’équipe de deuxième division de l’Étoile haïtienne au début des années 1960. L’année suivante, il a été promu à l’équipe de première division.

Entre-temps, M. Lamaute a entraîné plusieurs équipes pour les jeunes. Trois de ses fils ont joué d’ailleurs pour la ligue de première division à Haïti.

Homme très religieux, M. Lamaute raconte avoir tenté de combattre les superstitions dans son pays d’origine.

En décembre 1978, alors âgé de 65 ans, l’homme décidé d’abandonner ses maisons et ses voitures en Haïti pour partir au Canada. Il venait rejoindre sa femme et ses enfants qui avaient fui les milices duvaliéristes des tontons macoutes qui terrorisaient les populations.

Même après avoir passé le cap des 80 ans, M. Lamaute a continué à partager son temps entre l’église Sainte-Colette de Montréal-Nord où il chantait pour la chorale et les terrains de soccer. Joueur invétéré, il a notamment participé aux Tournois des vétérans de Rosemont où il affrontait des joueurs parfois plus jeunes que lui d’une quarantaine d’années. Quand il ne jouait pas, il entraînait l’équipe de l’Association des ingénieurs haïtiens du Canada ou il arbitrait.

En 2008, un tournoi pour les joueurs de soccer de 50 ans et plus a même été nommé à son nom à Saint-Hyacinthe.

Rien ne semblait arreter M. Lamaute jusqu’à l’âge de 97 ans où il commence à perdre la vue, ce qui le force à prendre sa retraite. Resté vigoureux, M. Lamaute espère toujours qu’il pourra botter le ballon rond de nouveau.

« J’admets que je suis vieux, mais tout le monde est âgé à partir du premier jour au berceau. 100 ans, ça ne veut pas dire qu’on doit être gâteux. Moi, je ne suis pas un vieillard », affirme M. Lamaute qui a encore beaucoup de mémoire, assez pour citer les vers de Ronsard.

« Il a eu une vie bien remplie et j’espère qu’il reste encore longtemps. Il a un côté très blagueur lorsqu’on va le voir, on en ressort toujours avec un large sourire »

Ces dernières années, M. Lamaute s’est occupé de sa femme mourante et il a écrit ses mémoires et son parcours religieux. La rumeur reste à confirmer, mais M. Lamaute pourrait bien être impliqué dans les festivités du 100e anniversaire de Montréal-Nord.