Garderies : Une distanciation physique compliquée dans les garderies
Les services de garde montréalais, tout comme les écoles, pourront reprendre leur activités progressivement et à effectif réduit, dès le 19 mai. À Rivière-des-Prairies – Pointe-aux-Trembles, cela ne se fera pas sans angoisse et incertitudes du côté des parents, des Centres de la petite enfance et des garderies. Mais une chose est sûre selon des éducatrices: la distanciation physique sera impossible.
Plusieurs parents s’indignent de la décision prise «trop rapidement» par le gouvernement de rouvrir les garderies et refusent pour le moment de renvoyer leurs enfants dans ces établissements.
C’est notamment le cas d’Elisabeth*, éducatrice dans une des garderies de Rivière-des-Prairies et maman d’une petite fille de 22 mois.
«Ma fille était nouvelle cette année à la garderie, son système immunitaire n’était pas stable, elle était souvent malade, donc avec le coronavirus, je ne prendrais jamais de chance», explique-t-elle.
Même son de cloche pour Antonella Ottavani, mère de deux enfants.
«Je ne prendrais pas le risque qu’ils attrapent le virus à la garderie et le transmettent à la maison», indique-t-elle.
Une distanciation compliquée
Au CPE La Flûte enchantée, service d’urgence depuis le début de l’épidémie, ce retour à la presque normalité ne se fera pas sans mesures sanitaires accrues.
Sylvie Bilodeau, directrice adjointe, assure que tout sera mis en place pour l’arrivée des enfants supplémentaires, le 19 mai. Des mesures d’hygiène, comme la désinfection des jouets, sont de mise depuis le début de l’épidémie et seront renforcées.
«Nous suivons les consignes du gouvernement, espaçons les emplacements de siestes, offrons des jeux aux enfants dans différents coins de l’établissement. Les enfants ne sortiront pas dans la cour en même temps», énumère Mme Bilodeau.
Elle ne le cache toutefois pas : «Cela va être difficile». D’autant que la distanciation physique entre les enfants sera compliquée.
Selon Elisabeth*, qui s’occupe des 2 à 3 ans, la distanciation sociale sera quasiment impossible principalement parce que leur niveau de langage n’est pas encore assez développé pour comprendre qu’ils doivent garder une distance entre eux.
«En plus, les enfants touchent tout, ils éternuent et toussent sans forcément avoir le réflexe des mesures d’hygiène», ajoute-t-elle.
Utilisation des masques
Isabelle Boucher, directrice de la garderie non-subventionnée La Marelle se demande pour sa part comment «dealer» avec le port des visières et des masques avec les enfants, comme recommandé par le gouvernement.
«Tout passe par l’expression faciale avec les enfants», pense-t-elle.
«Et les visières risqueraient d’être arrachées par les enfants», soutient la directrice de La Marelle.
Au CPE Palou la coccinelle, Stéphane Laroche, partage toutes ces opinions et ajoute qu’il faudra «trouver un équilibre entre la sécurité et notre mission éducative et pédagogique». Il ne voudrait pas «inculquer une peur irrationnelle aux enfants, car il faut rester un milieu ludique et agréable». Dans tous les cas, il affirme faire «confiance au gouvernement» cela même si «on fait tous face à quelque chose qu’on ne connaît pas».
Ultimement, le choix reviendra aux parents
« S’ils sont à l’aise, s’ils n’ont pas peur. Certains vont préférer garder leur enfant à la maison. On ne peut pas forcer les parents», conclut Anna Sama, directrice du CPE La Grenouille rose.
Plus petits ratios, plus grand nombre de personnel
À la suite de l’ordonnance du gouvernement, les CPE sont devenus des services de garde d’urgence pour les enfants dont les parents travaillent dans les services essentiels. Pour la réouverture, ils devront continuer de respecter un taux d’occupation de 30%, ainsi qu’un ratio éducatrice-enfant à 50%, instauré depuis le 13 mars.
Les dirigeants de ces CPE et de La Marelle s’accordent à dire que la charge de travail, même à effectif réduit, sera énorme pour les éducatrices des garderies.
«C’est aussi à nous de nettoyer les salles, on n’a pas de personnel d’entretien, ce sont les éducatrices qui font ça. Donc maintenant on doit surveiller les enfants et nettoyer presque toute la journée», soutient Elisabeth*, éducatrice dans une garderie de Rivière-des-Prairies.
Certains établissements pensent d’ailleurs faire revenir l’essentiel de son personnel pour assurer toutes ces tâches.
Des éducatrices pourraient toutefois manquer à l’appel, car leur condition de santé ne leur permettent pas un retour au travail en toute sécurité. Et cela ne saurait éponger la pénurie de personnel déjà présente dans les services de garde, selon Stéphane Laroche.
*Nom fictif.