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Une garantie prolongée? Non merci!

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Émilie Laurin-Dansereau - Collaboration spéciale

Le 15 mars 1962, John Fitzgerald Kennedy tenait un discours historique au Congrès américain lors duquel il énonça pour la première fois les quatre droits fondamentaux du consommateur: le droit à la sécurité, le droit à l’information, le droit de choisir et le droit d’être entendu. Depuis 1983, le 15 mars est devenu la Journée mondiale des droits des consommateurs en souvenir de cette déclaration historique. Si les droits des consommateurs ont bien progressé depuis 1962, il reste du travail à faire. Particulièrement dans le domaine des garanties!

Les garanties prolongées : une source de profit considérable pour les commerçants

Dans les dernières années, le marché des garanties prolongées a connu une véritable expansion. En 2006, il représentait 29 milliards de dollars aux États-Unis. Dix ans plus tard, il était de 42 milliards de dollars, une augmentation de 45%. Pourquoi? D’abord parce que les garanties prolongées sont beaucoup plus rentables pour les commerçants que la vente du bien lui-même. Les taux de profit sur les garanties prolongées varient de 40% à 80%. C’est pourquoi les vendeurs insistent autant pour en vendre.

Ensuite, parce que les consommateurs veulent que leurs biens durent le plus longtemps possible. Avec la crise climatique qui sévit, les consommateurs sont de plus en plus sensibilisés aux enjeux environnementaux et souhaitent prolonger la durée de vie de leurs biens. En France, des études ont démontré que plus on étend la durée de la garantie, plus les marchandises sont réparées et plus leur durée de vie est longue.

Une fausse solution qui apporte peu d’avantages aux consommateurs

Alors, si on dit que les garanties prolongées sont payantes pour les commerçants et prolongent la durée de vie des biens, ne devrait-on pas se réjouir qu’il s’en vende de plus en plus? Et bien, non! Parce que des problèmes, il y en a et ils sont nombreux!

D’abord, peu de consommateurs savent que leurs biens sont déjà protégés par la garantie légale qui, elle, est gratuite et s’applique automatiquement lors de l’achat ou de la location d’un bien.

Ensuite, de nombreuses études ont démontré que la très grande majorité des appareils ne brisent pas pendant la période couverte par la garantie prolongée.

De plus, le coût de la garantie prolongée dépasse souvent les frais des potentielles réparations.

Finalement, les garanties prolongées contiennent de nombreuses exclusions qui sont très rarement expliquées aux consommateurs et qui les rendent difficiles à faire appliquer.

Renforcer la garantie légale, c’est urgent!

Dans les faits, les garanties prolongées sont chères et pas très utiles. Pourquoi alors les consommateurs en achètent-ils autant? Comme on le disait, les consommateurs ignorent souvent l’existence de la garantie légale. C’est étonnant puisque les commerçants ont l’obligation, avant d’offrir une garantie prolongée, d’informer le consommateur oralement et par écrit que le bien qu’il souhaite acheter est déjà protégé par une garantie légale. Étonnant, dit-on? Pas tant que ça, car de nombreux commerçants ne respectent pas la loi. En 2011, l’Office de la protection du consommateur a réalisé une enquête sur la question. Résultat: 60% des commerçants ne respectaient pas correctement l’obligation qu’ils ont de bien expliquer la garantie légale à leurs clients. Près de dix ans plus tard, la situation ne s’est pas vraiment améliorée. Encore aujourd’hui, plusieurs commerçants ne parlent pas de la garantie légale qui s’applique à tous les biens acquis au Québec ou, lorsqu’ils en parlent, n’informent pas adéquatement leurs clients.

Pour les consommateurs qui connaissent la garantie légale et qui essaient de la faire appliquer, c’est bien souvent une véritable course à obstacles qui commence. Le commerçant renvoie la balle au fabricant qui la renvoie au commerçant. Finalement, c’est un juge qui tranchera si le consommateur n’a pas baissé les bras entre-temps devant la complexité de la démarche. Ainsi pour être plus tranquilles, plusieurs personnes font le choix d’acheter une garantie prolongée. Toutefois, cette paix d’esprit n’est qu’illusion. En raison des nombreuses exclusions, la garantie prolongée ne protège pas les biens autant qu’on pourrait le penser. Et, comme la majorité des biens ne brisent pas pendant qu’ils sont protégés par la garantie prolongée, celle-ci s’avère bien souvent inutile.

Par conséquent, nous pensons qu’il est grand temps que le gouvernement se penche sur la question et pose des actions pour réellement protéger les consommateurs. La loi est claire : tout bien acheté ou loué au Québec, même s’il provient de l’étranger, est accompagné d’une garantie légale. Qu’attend-t-on pour la faire respecter?

Émilie Laurin-Dansereau, Conseillère budgétaire à l’ACEF du Nord de Montréal

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