Laïcité: cessons de diviser le Québec (1re partie)
Le débat vital sur la laïcité au Québec pâtit de son instrumentalisation politique. En jouant avec le feu, libéraux, péquistes et caquistes ne cessent de diviser les Québécois.
La commission parlementaire, qui étudie le projet de loi 62 sur la neutralité de l’État, tient ses audiences depuis le 18 octobre dernier jusqu’au 9 novembre prochain. Le discours de sourds est reparti pour une autre ronde, comme c’est le cas au Québec, depuis 10 ans.
En 2007, après de tumultueux débats sur les accommodements raisonnables, pour gagner aux élections générales, notre premier ministre à l’époque, Jean Charest, a sorti de son chapeau une commission pour étouffer dans l’œuf cette controverse qui a mis le vent dans les voiles de l’Action démocratique du Québec (ADQ) de Mario Dumont.
La Commission Bouchard-Taylor nous a coûté collectivement plus de trois millions de dollars en plus d’un mélodrame national quotidien pendant un an, mais elle a été efficace. Non seulement elle s’est associée à un comité-conseil formé de 15 éminents spécialistes québécois, mais elle a commandé 13 recherches, tenu 31 groupes-sondes, 59 rencontres avec des experts et 4 forums nationaux avec plus de 800 participants.
Les commissaires Gérard Bouchard et Charles Taylor ont donc siégé dans 16 régions du Québec pendant un total de 31 jours d’audiences. Ils ont reçu et discuté avec les auteurs de 900 mémoires au cours de 328 audiences. Ils ont aussi entendu 241 témoignages, lors de 22 forums de citoyens ouverts sans restriction au public qui ont attiré, au total, 3 423 personnes. Entre août 2007 et janvier 2008, cette commission a également exploité un site internet proposant diverses activités d’échanges avec le public (plus de 400 000 visites).
Or, dès sa sortie, Jean Charest a enterré le rapport Bouchard-Taylor. Les péquistes n’ont pas fait mieux, ils l’ont jeté à la poubelle.
Presque six ans après, alors que les péquistes étaient au pouvoir, ils ont instrumentalisé le débat sur la laïcité avec leur charte qui avait pour principal objectif l’indépendance du Québec.
Qu’on se le tienne pour dit, la légitimité de faire du Québec un pays n’est pas en cause ici, mais la volonté d’y arriver sur le dos d’un débat de société vital l’est.
Dans cette lignée, depuis 2014, François Legault, le chef de la Coalition avenir Québec (CAQ),anciennement l’ADQ, s’est joint avec verve à ce concert d’instrumentalisation du débat sur la laïcité à des fins électoralistes.
Quant à Philippe Couillard, notre premier ministre, au lieu de trancher ce débat, il tergiverse lamentablement. Ça fait deux ans que son parti est majoritaire à l’Assemblée nationale, mais tout ce qu’il propose à ce sujet est en deçà même des recommandations du rapport Bouchard-Taylor.
Justement, il y a huit ans, le rapport Bouchard-Taylor a livré des recommandations qui, avec le temps, ont fini par rejoindre une majorité confortable de Québécois. Plusieurs de ces recommandations auraient mérité d’être appliquées sur-le-champ.
La première est ce fameux livre blanc recommandé par la commission qui définirait la laïcité. Un préalable qui aurait mis l’ensemble des Québécois d’accord sur ce qu’on veut défendre, mais aussi comment le défendre avec des méthodes du monde civilisé: le respect, la conciliation, la solidarité, l’égalité et la réciprocité. Mais en vain!
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