On mérite mieux
Les publicités négatives sont à l’arrivée d’un nouveau chef à Ottawa ce que les hirondelles sont au printemps. Les conservateurs sont passés maîtres dans l’art de définir leurs adversaires. Stéphane Dion et Michael Ignatieff ont été les cibles de publicités négatives qui ont laissé leur trace. Après une campagne contre Thomas Mulcair, la cible est cette fois la nouvelle star de la politique à Ottawa : Justin Trudeau.
Sans être une science exacte, la publicité négative tire son efficacité de la capacité à cibler les lacunes perçues ou réelles d’une personne et à les tracer à gros traits. Dans le cas de Justin Trudeau, on met beaucoup d’efforts à le dépeindre comme inexpérimenté. Et c’est bien la faille identifiée dans les récents sondages.
Si le nouveau chef libéral se trouve dans une position favorable comme meilleur premier ministre (33 %, contre 31 % pour Harper), un doute persiste quant à son expérience et à son jugement. Le récent sondage Harris Décima place effectivement l’actuel premier ministre en avance sur ces deux éléments. En présentant Justin Trudeau comme un enfant un peu excentrique, enlevant sa chemise devant la caméra, les conservateurs tentent de renforcer ces doutes.
Tout comme le chef néo-démocrate l’avait fait avec son «On continue», Trudeau contre-attaque et se définit lui-même dans une publicité empreinte de positivisme. Il se présente comme un père de famille, un professeur debout devant une classe. Si le format n’est pas aussi percutant que celui utilisé par le NPD, la pub libérale marque des points. Elle met en lumière la capacité du chef libéral à être près des gens. Est-ce que cela sera suffisant?
Les conservateurs ne lésinent pas sur les moyens pour faire entendre leur message. Eux qui avaient pris l’habitude de payer leurs attaques à même les fonds de leur parti utilisent maintenant les dépliants réservés aux députés. Il se pourrait pourtant que, dans ce cas bien précis, ils ratent la cible. Les Canadiens ont vu grandir Justin Trudeau. Ils ont le sentiment de le connaître. Ce sera donc plus difficile de faire coller le message. Il y a aussi l’usure du temps, qui affecte inévitablement un gouvernement en poste depuis sept ans.
Cela ne veut pas dire pour autant que le chemin sera facile pour celui qui trône au sommet des sondages. Il devra mettre de la chair autour de l’os. Son parcours ne sera pas facile, mais il jouit pour l’instant de l’écoute. Ses premières interventions étaient d’ailleurs loin de la perfection. Par ailleurs, tranquillement mais sûrement, Thomas Mulcair positionne son parti comme une solution de rechange crédible
au gouvernement actuel.
L’arrivée d’un nouveau chef a toujours un effet sur les sondages. On verra si le ballon se dégonflera. D’ici là, vivement un retour sur le terrain des idées.
Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.