Ces méchants «istes»!

Quebec Deputy Premier Lise Theriault responds to reporters' questions before entering a party caucus meeting, Tuesday, February 23, 2016 at the legislature in Quebec City. THE CANADIAN PRESS/Jacques Boissinot Photo: Jacques Boissinot/LA PRESSE CANADIENNE

Vous le verrez partout demain à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes. Le mot «féministe» vous met-il mal à l’aise? Demandez à des femmes si elles sont féministes et certaines s’empresseront de se dissocier de ce vocable. Puis, rapidement, elles se voudront rassurantes: oui, oui je suis pour l’égalité entre les hommes et les femmes… mais j’aime les hommes! Comme si être féministe signifiait  détester les hommes ou vouloir les subordonner aux femmes. Moi non plus, je ne voudrais pas m’associer à une telle conception des choses.

Heureusement, la majorité des Québécois comprend que le féminisme n’est pas contre les hommes, mais pour l’égalité des sexes. Mais quand la ministre Thériault dit qu’elle n’est pas féministe, elle conforte cette image stéréotypée d’un féminisme anti-hommes.

Se dire féministe, c’est reconnaître, dénoncer et agir contre les injustices qui perdurent dans notre société. C’est admettre que notre société n’est pas une pure méritocratie, et que nous avons la responsabilité de créer les conditions de l’égalité. Elles ne jailliront pas du vide, ces conditions. Elles sont le fruit d’un long travail de progrès social.

Mais le mythe de la réussite personnelle est tenace. La prescription de Lise Thériault aux femmes – le «Vas-y, t’es capable!» – fait reposer la responsabilité de leur bien-être entièrement sur les épaules des individus. Comme si la société, avec ses rapports de pouvoir, ses systèmes, ses hiérarchies, ses normes, n’existait pas; comme s’il y avait seulement un ensemble d’individus vivant indépendamment les uns des autres et étant récompensés en fonction de leurs efforts personnels.

Notre société est plutôt un grand jeu de pouvoirs qui défavorise certaines catégories de la population. Et dès lors qu’on reconnaît qu’il y a de la discrimination systémique, pas toujours volontaire ou malveillante, mais bien réelle néanmoins, on doit aussi reconnaître la légitimité et l’importance des mouvements de solidarité qui s’acharnent à contrer ces iniquités, que ça prend des efforts de groupe pour faire avancer la liberté des individus.

Mais notre époque se méfie du collectif, de tout ce qui ressemble de près ou de loin à un regroupement de gens animés par un projet social. On les regarde avec suspicion, on les imagine être des agents d’endoctrinement ou de limitation de la liberté de pensée.

Pourtant, les mouvements sociaux sont mouvants, pluriels et bigarrés. Si vous êtes féministe ou écologiste ou syndicaliste, personne ne viendra cogner à votre porte pour exiger que vous renonciez à votre individualité, à vos convictions ou à votre esprit critique. Les mouvements sociaux sont des espaces de rencontre de points de vue et d’actions pour faire progresser la société. Et le féminisme n’est rien d’autre que cela. Il y a 1001 façons de comprendre, d’argumenter et de vivre le féminisme, et à l’intérieur du mouvement féministe, il y a une très grande diversité de croyances et d’opinions. Je suis en désaccord avec certains de ces points de vue, mais je ne rejetterai pas l’étiquette pour autant. Au contraire, je la célébrerai, parce qu’elle me rappelle tous les efforts qui ont été faits et doivent encore être faits pour construire une société juste.

Le 8 mars et les 364 autres jours de l’année.

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