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Brexit et carnet de voyage londonien

Anti Brexit campaigners protest outside the Supreme Court in London after the third day of the Government's appeal against a ruling that the Prime Minister must seek MPs' approval to trigger the process of taking Britain out of the European Union, Wednesday, Dec. 7, 2016. (Victoria Jones/PA via AP) Photo: Victoria Jones/PA via Associated Press

Climat agréable. Soleil, même, parfois. Monde joyeux. Noël partout. Comme les pubs. Londres est heureuse. Manifestement.
Première chambre avec vue sur l’équivalent d’un boulevard Taschereau anglais. Tough luck. Une belle randonnée de taxi, ensuite, pour rejoindre l’ami Beaulac aux auditions de la Cour suprême portant sur le Brexit. Il attend en ligne, patiemment, afin d’entrer dans l’enceinte judiciaire sacrée. Vingt-cinq quidams, tout au plus, y auront accès. On en fera partie.

Petite salle de rien du tout, des juges souriants, des avocats détendus. Tout le contraire du palais de justice de Montréal, où les membres de la confrérie, gonflés à bloc par la testostérone de l’arrogance ou le simple stress, jouent fréquemment à qui-pisse-le-plus-loin. Ça ne se prend pas pour des 7up flat, dirait l’autre…

Ici? L’opposé. Aucune trace visible de la gravité du moment. On parle quand même, pourtant, de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Mais bon. Rien pour perturber le flegme, et l’apparente bonne humeur, britannique.

La décision de la Cour? À venir, et à voir. Mais risque de ne rien changer au résultat. La Chambre des communes a déjà signifié son intention d’autoriser le gouvernement à enclencher des négociations, avant la fin mars, avec l’Union. En bref, le jugement de la Cour deviendra probablement théorique. Au contraire du Brexit.

Départ le lendemain pour l’université de Cambridge, où nous aurons la chance de prononcer une petite conférence. Invités, le soir même, à un festin, sur le campus de celle-ci. Décor du XIV-XVIe siècle. Breathtaking, my dear.

Habillé en quasi-pingouin, je joue sûrement, à mon insu, dans le prochain Harry Potter. Je cherche Lord Voldemort, sans succès.

Qu’importe. On se bourre comme des rois, passant d’une salle à l’autre. Le faste de l’aristocratie intellectuelle britannique.
Quelques discussions avec nos hôtes. Pourquoi, le Brexit, messieurs?

«Erreur stupide, de dire Paul. On a joué le jeu des racistes en souhaitant les écraser par voie référendaire. Jamais on ne devrait excuser un tel discours, lui permettre de s’exprimer si facilement.»

Lendemain, au pub avec le vieil ami Adam. Pas encore 30 ans. Qu’on fait les jeunes, Adam? Pourquoi n’ont-ils pas été voter (66% des 18-24 ans souhaitaient demeurer dans l’Union, mais leur participation au vote a été des plus anémiques)?

«Sais pas pourquoi, répond Adam. Mais on le regrette, maintenant. Londres est une ville bancaire. L’économie va planter. Le discours anti-élite a gagné. Et ce sera le bordel.»

Trump. Le Pen. Autriche. Brexit. Rambo. «Le monde sont écœuré d’être écoeuré», clame ce dernier. Un cocktail de ressentiments, où tout se confond, mais se boit quand même aisément : immigration, inégalités sociales, gouvernement des juges. La faute de l’élite, quoi.

Le dilemme: ignorer ces cris du coeur ou essayer de comprendre. Dans le deuxième cas, faudra tenter de comprendre, de dialoguer. Le courage sera nécessaire (surtout pour s’obstiner avec Rambo).

Parlant de courage, je vous laisse. À Londres, faut aller chercher soi-même sa bière au bar. Maudite élite.

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