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Dead Obies: Dead. pour mieux renaître

Collaboration spéciale Photo:
Benoit Valois-Nadeau - Métro

«Remise en question», «sagesse», «authenticité», «maturité», «instinct» : les mots ne viennent pas d’un livre de croissance personnelle à la mode, mais bien de la bouche des Dead Obies lorsqu’ils parlent de DEAD., leur troisième album. Car après avoir perdu un de leurs frères d’armes, les désormais «Fabulous Five», telles des Marie Kondo du rap queb, sont revenus à l’essentiel.

Cette introspection collective s’est amorcée en mai dernier, lorsque Yes Mccan (alias Jean-François Ruel, alias Damien dans Fugueuse) a annoncé qu’il quittait le groupe qu’il avait contribué à fonder en 2011 pour poursuivre ses projets en solo.

Si la rupture entre Yes et ses anciens comparses s’est faite en bons termes («il n’y aucun beef entre nous; j’étais en studio avec lui la semaine dernière», assure VNCE Carter, beatmaker du groupe), son départ a tout de même ébranlé les fondements de la formation, qui est passée de six à cinq joueurs.

«Quand quelqu’un s’en va, par réflexe, on se demande nécessairement si c’est la fin, expose 20Some, l’un des quatre MC restants. Ç’a ébranlé ce qu’on croyait être super solide. On s’est regroupé et on s’est demandé si c’était la fin. Mais non, ça ne l’était clairement pas! Ç’a plutôt été une occasion pour nous de se retrouver ensemble et de parler de ce qu’on voulait faire.»

«Renaître de ses cendres, la métaphore du feu de forêt, c’est quétaine, mais c’est ça quand même. Après avoir eu l’impression d’avoir tout tué ce qu’il y avait devant nous, il reste quoi, maintenant?»

Pour avoir la réponse, les Dead Obies ont écrit beaucoup, beaucoup de nouveaux morceaux dans la dernière année. Plus que jamais, en fait. «Cent tounes en une année», s’enflamme VNCE Carter. Bon, O.K., plus 60-65…»

«On ne peut pas prendre les choses pour acquis. C’est notre troisième album, mais on a tout à prouver. À nous-mêmes, aussi. En ce sens, c’est toujours un renouveau.» – Joe Rocca, membre des Dead Obies

Bref, un gros paquet de chansons qui allaient dans toutes les directions et dans lequel les gars ont pigé avant d’aller enregistrer leurs 11 préférées dans un chalet.

«On a fait tout l’éventail des couleurs de notre palette et celles qu’on a choisies, [ce sont] celles qu’on a le mieux réussies. Il y en a qui ont plus une vibe du début des années 2000; d’autres qui sont plus dans le courant actuel, illustre 20Some. Ça montre que chacun des gars peut amener une influence différente. Le fait qu’on réussisse bien à achever toutes ses propositions montre qu’on a une bonne connaissance de notre musique. On “truste” nos instincts; on n’essaie pas de reproduire ce qui marche en ce moment; on revient à ce qui nous fait vraiment tripper depuis toujours.»

«On a commencé dans la musique en étant très naïfs. Mais après deux albums et une couple de mixtapes, et des voyages en Europe, on a confiance en ce qu’on fait. Ça nous libère et ça nous permet d’être plus directs, plus francs, plus honnêtes. On prend moins de détours pour y arriver.»

«Et on laisse la musique parler d’elle-même», insiste Joe Rocca, qui, entre deux disques de DO, a lancé son propre opus solo (French Kiss, en 2017).

Simplicité
DEAD. serait donc l’album de la renaissance, mais aussi une forme de retour aux sources.

La simplicité était de mise après l’éclectique Montréal $ud (2013) et surtout Gesamtkunstwerk (2016), album inspiré par l’essai La société du spectacle, de Guy Debord (rien de moins!), et enregistré en direct avec des musiciens.

«DEAD. est beaucoup en réaction avec ce qu’on a déjà fait, admet Snail Kid, son paquet de cartes Magic à la main. On est rendu là, à explorer ce côté plus épuré, à schématiser le message. Ce qu’on veut dire, c’est ça, puis on va dans la musique à 100%.»

«Les deux albums précédents étaient plus conceptuels, avec une trame narrative. Cet album, au contraire, c’est un retour à ce pourquoi on se rassemblait au début, pourquoi on faisait des mixtapes: enregistrer, faire de la musique, retourner vers le fun du studio. C’est dans l’action plus que dans la justification conceptuelle de quoi que ce soit», explique de son côté VNCE Carter.

«C’est un album qui est très honnête. Il parle de trucs vrais. Il n’y a pas de grand concept explicatif. Il y a des propos réels et des thèmes qui nous touchent tous, et qu’on avait envie d’exprimer à l’âge qu’on a.»

Maturité
Mine de rien, les membres des Dead Obies ont maintenant entre 26 et 31 ans, et ça se sent dans ce nouvel opus – et ce, tant dans la musique que dans les paroles.

Par moments, le groupe montre une sensibilité qu’on ne lui connaissait pas (High et son loop composé de quelques accords de guitare folk, ou la très R’n’B 2Gether), ou encore explore des zones plus proches de la pop actuelle (dans Run Away et Big Girl).

«Il y a une vulnérabilité qu’on n’avait jamais amenée avant, concède Joe Rocca. Il y a une sensibilité dans High, mais il y a la même authenticité dans la froideur d’une toune comme C’est bon. On va à fond dans l’une, puis dans l’autre.»

«Un mix d’impulsivité et de sagesse», décrit VNCE Carter. Une preuve de maturité, également?

«Ça vient aussi avec l’âge de commencer à se poser ces questions à voix haute: c’est quoi l’identité du groupe? Est-ce que je veux vraiment faire ça de ma vie? C’est l’espèce de crise identitaire de la fin vingtaine, début trentaine», croit Snail Kid, qui forme avec son frère Jam et son père, Robin Kerr, le groupe Brown.

«Ce sont des questions plus matures que celles qu’on se posait au début, quand le core du band avait 21 ans. Ça vient avec plein d’angoisses, mais ça se reflète vraiment sur nos décisions artistiques. Je ne peux pas me prendre pour un autre: c’est ça, ma vie. Autant croire en ce que je fais, en mon art. Il n’y a plus rien qui [a] du sens si j’essaie d’imiter quelqu’un.»

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