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Envoutantes retrouvailles avec Godspeed

Photo: Guillaume Ledoux / Métro

Le post-rock mélancolique et envoutant de Godspeed You! Black Emperor a fait vibrer les planches du MTELUS cette semaine. Ce fut la première escale dans la ville d’origine du mythique regroupement musical depuis le départ de sa tournée G_d’s Pee at State’s End! au printemps 2021, laquelle est éponyme de son septième album.

Sur scène, Godspeed ne communique que par l’art. Sans salutation, les musiciens ouvrent avec Hope drone et nous emportent dans une expérience esthétique à double niveau, musicale et filmique, alors que sont projetées, derrière les musiciens, des images aux allures expérimentales d’industries immolées, de nature colorée, d’avion de chasse tombant au combat, de manifestations politiques décontextualisées ou encore de tours en construction qui sont physiquement vides d’humains et symboliquement vides de sens.

Photo: Guillaume Ledoux / Métro

Musicalement, c’est une prestation à la puissance lourde qui ne se libère qu’après de langoureuses minutes de douceur mélancolique et méditative, lesquelles nous préparent à subir la férocité artistique dont savent faire preuve les huit musiciens d’expérience.

On poursuit avec Gathering storm, la deuxième portion de la monumentale Storm de l’album Lift Your Skinny Fists Like Anthenas to Heaven et inévitablement, la complexité, l’immensité et la beauté de l’œuvre qui a fait ses preuves porte le public en transe.

«Chez d’autres plus heureux encore, poésie et pensée ont pu se mêler en une seule forme d’expression», disait Maria Zambrano dans Philosophie et Poésie. Impossible de ne pas y penser en vivant ce que propose l’octet montréalais. Outre l’ineffable extase imposée par l’art qui se vaut d’un point de vue esthétique, Godspeed, c’est aussi un propos social, bien précis, quoiqu’abstrait.

Sans verbe qui évoquerait une prise de position claire, la voix de l’œuvre passe par ses cordes à la fois musclées et mélodiques, ses batteries puissantes et machinales et ses films qui évoquent la corruption, la destruction et la régénération de la civilisation et de la nature. On vit la laideur de l’oppression, de l’exploitation, de l’absence d’humanité dans les institutions sans âmes, le tout sans association à une cause sociale précise. Cette critique indicible ne peut être que vécue et on la vit tout au long du concert à travers les autres classiques qui ont été joués, dont First of the Last Glaciers, tirée du dernier album. C’est avec Sad mafioso de F♯ A♯ ∞, que se clôt la performance qui ne laisse personne indifférent.

De manière aussi poignante qu’à ses débuts et avec ses mélodies mélancoliques pleines d’optimisme et avec ses silences qui ne présentent aucun vide, GY!BE nous a forcés à contempler l’existence humaine contemporaine, à la fois horrible et magnifique.

Moor Mother en première partie.
Photo: Guillaume Ledoux/Métro

Si la perspective sociale proposée par Godspeed est quelque peu évasive, on ne peut pas dire la même chose de la prestation de Moor Mother qui était en première partie. Des positions féministes et anti-colonialistes étaient explicitement ancrées dans sa musique saisissante, expérimentale et complexe.

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