Raïf Badawi devient citoyen d’honneur de Montréal
Après avoir obtenu ce statut des villes de Sherbrooke et de Hampstead, le blogueur Raïf Badawi, emprisonné en Arabie Saoudite depuis 2012, a été désigné citoyen d’honneur de la Ville de Montréal, lundi.
La mairesse Valérie Plante a officialisé la chose à l’hôtel de ville avant que s’amorce la séance du conseil municipal. «C’est un moment qui est important pour la démocratie et la liberté d’expression», a-t-elle lancé.
La femme de M. Badawi, Ensaf Haidar, n’était pas présente pour l’annonce officielle de la Ville. Elle aurait délibérément évité la séance, car elle préférait attendre le vote sur la motion, qui devait se tenir plus tard dans la journée et devait officiellement faire du blogueur un citoyen d’honneur de Montréal, selon le Huffington Post Québec.
En mêlée de presse, la mairesse s’est dite «embêtée» par la décision de Mme Haidar. «Nous lui avons donné le scénario [où nous présentions le certificat avant le vote] au préalable, et elle était d’accord.»
Plus tôt, lundi matin, le conseiller de Snowdon, Marvin Rotrand, accompagné de Mme Haidar, a confirmé le dépôt de la motion élaborée par l’opposition municipale. «Nous faisons cela pour déclencher un mouvement national dans les villes, qui vont ajouter leurs voix au réseau d’appui à Raïf», a-t-il expliqué.
Mme Haidar, visiblement émotive, a voulu rappeler la situation d’enfermement de son mari. «Raïf est un jeune homme, a-t-elle relativisé. Il a passé près de la moitié de sa vie en prison.»
Elle a invité d’autres villes québécoises et canadiennes à faire pression sur le gouvernement saoudien en imitant Montréal, Hampstead et Sherbrooke. Elle espère que ces annonces symboliques accéléreront le processus.
«Ça fait quatre ans que je travaille à la libération de Raïf, a-t-elle ajouté. J’ai beaucoup d’espoir, mais jusqu’à maintenant je ne reçois pas les bonnes nouvelles.»
Forcer la main de ben Salmane
Également présent en conférence de presse lundi matin, l’ex-ministre de la Justice et fondateur du Centre Raoul Wallenberg pour les droits de la personne, Irwin Cotler, a tenu à appuyer le statut de citoyen d’honneur de M. Badawi.
«Nous atteindrons le point de basculement dans ce dossier quand le gouvernement saoudien comprendra que c’est dans son propre intérêt de libérer Raïf», a-t-il affirmé.
«Nous voulons que l’Arabie Saoudite [et le prince héritier Mohammed ben Salmane] sachent que nous n’arrêterons pas, qu’il y aura un coût politique et que le mouvement ne pâlira pas», a renchéri M. Rotrand.
Implication des autres gouvernements?
Questionné à savoir si les gouvernements provinciaux et fédéraux emboîteraient le pas, M. Rotrand a assuré avoir reçu le soutien de certains députés des deux ordres de gouvernement.
Parmi les députés qui ont affirmé vouloir accélérer le processus aux niveaux provincial et fédéral, on peut compter la ministre québécoise des Relations internationales, Christine St-Pierre, et le député fédéral dans Ville-Marie-Le Sud-Ouest-Île-des-Soeurs, Marc Miller.
«Nous sommes des élus municipaux, mais une fois que nous agissons, ça a un impact au provincial, puis au fédéral, a poursuivi M. Rotrand. Nous pensons que le mouvement doit atteindre le niveau international.»
Mme Haidar a avoué avoir fait une demande de citoyenneté d’honneur pour M. Badawi au gouvernement du Canada il y a deux ou trois mois, une demande qui n’a toujours pas donné de réponse.
Celle qui passera son examen de citoyenneté jeudi a insisté sur l’urgence de la situation. «Six ans, c’est assez pour nous et assez pour Raïf», a-t-elle clamé.