Violaine Cousineau déplore l’abolition des commissions scolaires pour les démunis
À peine 48 heures après l’adoption sous bâillon du projet de loi 40 abolissant les commissions scolaires au Québec, la commissaire indépendante à la Commission scolaire de Montréal, Violaine Cousineau, est sous le choc. À l’instar, des autres commissaires de la province, elle n’est plus officiellement en fonction. L’impact de cette nouvelle législation touchera les questions liées à la lutte à la pauvreté, craint-elle.
«Cela m’arrache le cœur, confie la commissaire, en ravalant ses larmes. Ce sont les plus fragiles qui vont payer le prix de cette loi.»
Mme Cousineau se dit inquiète pour le sort des plus démunis qui a toujours été sa priorité depuis les sept dernières années. Elle se demande ce qu’il adviendra des dîners à 1$, une mesure transitoire adoptée en septembre par le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, qui se termine le 30 juin.
La commissaire indépendante de Saint-Henri, Petite-Bourgogne et Pointe-Saint-Charles estime que les élus étaient bien placés pour mener des batailles, dont la sauvegarde des centres d’éducation populaire.
«Qui va assurer leur survie et se porter à leur défense? Même chose pour le Centre de petite enfance (CPE) qui est logée dans une école de notre secteur. Je me suis battue pour qu’on ne leur impose pas de loyers faramineux», souligne-t-elle.
Répondre aux appels
Depuis les dernières années, Mme Cousineau cumulait une tâche d’enseignante à temps partiel dans un cégep et l’autre partie de son temps à son travail de commissaire. Elle a passé de nombreuses heures avec des gens au téléphone le dimanche soir ou les fins de semaine.
«On me rapportait des cas d’enfants de la DPJ transportés d’un bord et de l’autre ou une maman monoparentale aux prises avec des problèmes de transport. Les gens vont téléphoner où maintenant? Les directeurs d’école ne vont pas donner leur numéro de cellulaire aux parents», illustre-t-elle.
Depuis le 8 février, les pouvoirs ont été confiés aux directeurs généraux des nouveaux centres de service. «Ils sont tous sous les ordres des sous-ministres et du ministre. Ce sont des fonctionnaires. Le ministre voulait débureaucratiser le système. Il vient de faire le contraire», s’insurge Mme Cousineau.
Coquille vide
Elle estime que les futurs conseils d’administration qui seront mis en place sans aucune rémunération ressembleront à une coquille vide.
«Ces gens-là auront un devoir de réserve, croit-elle, et ils ne s’exprimeront pas comme nous, les élus, sur les maternelles de 4 ans ou les dîners à 1$. On entre dans un système plus opaque que jamais alors que nous étions un contre-pouvoir important pour faire entendre la voix des plus faibles et celles des régions.»
Mme Cousineau déplore le manque d’écoute et de consensus de M. Roberge qu’elle compare même à Gaétan Barrette, l’ex-ministre de la Santé.
«J’ai l’impression d’être face à des idéologues. Des gens croyant avoir les réponses aux problèmes et qui travaillent de Québec dans une tour d’ivoire», illustre-t-elle.
Le plus triste, selon elle, c’est l’impact qu’aura l’adoption de la loi 40 dans les classes, car elle porte atteinte à l’autonomie professionnelle des enseignants. «Je vois des enseignants démobilisés et démotivés qui se remettent en question», mentionne Mme Cousineau.
L’abolition des commissions scolaires entraîne une économie de 45 M$ sur quatre ans, dont 10,2 M$ en salaires pour les élus. Mme Cousineau était payée environ 16 000$ par année pour servir ses concitoyens.
La commissaire sera rémunérée jusqu’au 30 juin. En septembre, elle reprendra son travail d’enseignante à temps plein.