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Révolution féministe en Iran: plus unis que jamais à Montréal

Des Irano-Montréalais, faisant partie du mouvement «Femmes, vie, liberté», soutiennent de diverses façon le soulèvement populaire dans leur pays d'origine.
Des Irano-Montréalais, faisant partie du mouvement «Femmes, vie, liberté», soutiennent de diverses façons le soulèvement populaire dans leur pays d'origine. Photo: Patricia Miotto/Métro

«Chaque seconde compte, on perd des enfants dans les rues», avertit Yas Naderi, Iranien vivant à Montréal, quant à la répression des autorités iraniennes des révoltes qui se déroulent un peu partout au pays depuis la mort en détention de Mahsa Amini le 16 septembre dernier.

Rappelons que la jeune femme de 22 ans avait été arrêtée à Téhéran par la police morale parce que sa tête n’était pas couverte adéquatement.

Un soulèvement populaire qui vise beaucoup plus large que la question du port du voile, selon Maryam Azimzadehirani, journaliste irano-montréalaise. Pour elle, c’est le pouvoir des femmes, et même des hommes, «de choisir le mode de vie qui leur convient» qui est en jeu.

C’est dans le local de l’Association des étudiants iraniens de l’Université Concordia que Métro est allé à la rencontre de sept Montréalais et Montréalaises d’origine iranienne qui se mobilisent à partir d’ici pour appuyer leurs compatriotes dans leur révolution contre le régime islamique.

«Femmes, vie, liberté»

C’est ce slogan, désormais scandé partout à travers le monde en soutien aux Iraniennes, qu’a choisi le groupe pour désigner son mouvement, qui rassemble des Montréalais de tous les horizons, explique le président de l’Association des étudiants iraniens de Concordia, Shayan Asgharian.

«Ce mouvement, pour et par le peuple iranien à Montréal, se coordonne avec d’autres activistes ailleurs au Canada et en Europe», ajoute-t-il.

«On n’a pas besoin de la pitié du monde entier, explique Shima Shirkhodaei, conseillère en immigration. Ce dont on a besoin, c’est la prise de position [du gouvernement canadien].»

Le regroupement demande principalement la fin des relations diplomatiques et des relations d’affaires entre le Canada et l’Iran.

De nombreuses manifestations ont été organisées en ce sens dans les dernières semaines. Une grande marche est prévue le samedi 22 octobre à Montréal.

Darya Almasi et Mohammad Mohajerani dans le local de l’Association des étudiants iraniens de l’Université Concordia. Patricia Miotto/Métro.

Les réseaux sociaux, sources d’espoir

«Je vous jure que ça va être la plus grande révolution de femmes au monde», déclare Yas, dont l’optimisme est partagé par les autres membres.  

Pour Shima, ce sont les moyens de communication disponibles aujourd’hui qui différencie les révoltes actuelles des manifestations précédentes. Le soulèvement étant principalement mené par les jeunes, leur présence sur les réseaux sociaux leur permet d’être connectés en tout temps avec le reste du monde. 

Ainsi, selon elle, les réseaux sociaux, en permettant la diffusion des images des révoltes partout dans le monde et sans délai, permettraient le succès et la propagation du soulèvement.

Les voix [des jeunes iraniens] ne vont pas rester muettes.

Shima Shirkhodaei

Darya Almasi, doctorante en sociologie, abonde dans le même sens. Elles expliquent que les membres du groupe sont toujours en contact avec leurs proches en Iran. Lorsque ceux-ci sont en mesure de contourner les mesures du régime iranien pour limiter l’accès à Internet et de leur envoyer des images de la répression subie, Darya et les autres se font un devoir de les partager.

La force du mouvement réside dans son ampleur généralisée, selon l’ingénieur Mohammad Mohajerani. «Il s’étend dans tout le pays à travers les générations, la sexualité et les religions», explique-t-il.

Une mobilisation teintée par des expériences personnelles

Les femmes rencontrées affirment toutes avoir été victimes d’humiliation et d’intimidation en raison de leur apparence «trop féminine», et ce, dès leur petite enfance.

Darya relate même que sa sœur, dont les cils étaient particulièrement longs et délicats, se voyait fréquemment forcée de les laver au savon à l’école, les autorités croyant qu’elle se mettait du mascara.

«Ils m’ont battu sept, huit heures d’affilée», laisse tomber Mohammad. Des policiers l’ont arrêté à Téhéran en 2009 puisqu’il portait un chandail vert, couleur du mouvement populaire s’opposant au gouvernement récemment élu lors d’élections controversées. Après avoir été rué de coups et reçu des décharges électriques, les policiers l’ont abandonné à l’extérieur de la ville en plein milieu de la nuit, dépouillé de ses objets personnels.

Parce que j’ai vécu cette expérience, lorsque je vois quelqu’un qui se fait battre dans la rue, je peux imaginer ce qui lui arrive […] je peux voir à quel point les autorités sont brutales.

Mohammad Mohajerani

Fatima Nikravesh a pour sa part été arrêtée puisqu’elle marchait avec Yas dans un parc sans qu’ils détiennent un certificat de mariage. Elle a été détenue pendant 24 heures dans une cellule complètement noire, les autorités exigeant qu’elle définisse sa relation avec Yas.

«J’entendais les cris provenant de l’autre côté de la prison», ajoute-t-elle.

Ces répressions violentes peuvent avoir des répercussions à long terme. «Toutes les femmes de ma famille, chaque fois qu’elles entendent des sirènes de police, même à Montréal, leur premier réflexe est de mettre leur main sur leur tête pour voir si elles sont bien couvertes», témoigne Shayan.

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