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Tempête sur l’autoroute 13: le rapport Gagné blâme le système

Le Service de sécurité incendie de Montréal (SIM) a pris l’initiative vers 4h30 de dépêcher des unités de la caserne 64 pour venir en aide aux automobilistes coincés sur l'Autoroute 13. Photo: Félix O. J. Fournier/TC Media
Vicky Fragasso-Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — Le cafouillage sur l’autoroute 13 lors de l’importante tempête de neige du mois de mars a été causé par des défaillances du «système» de communications de la Sûreté du Québec (SQ) et du ministère des Transports (MTQ), selon le rapport de Florent Gagné, qui refuse de montrer du doigt qui que ce soit pour les problèmes majeurs qui ont forcé des centaines d’automobilistes à passer la nuit dans leur voiture.

M. Gagné, ancien sous-ministre du MTQ et ancien directeur de la SQ, a dévoilé vendredi son rapport sur les événements des 14 et 15 mars dernier survenus dans la région de Montréal. Il en vient à la conclusion que les organismes responsables ont sous-estimé l’ampleur de la situation et ont mal communiqué à l’interne et entre eux.

Dans son rapport, il écrit que le MTQ a «lamentablement failli à sa tâche» et que la SQ a éprouvé «des lacunes importantes», en plus d’avoir fait preuve d’un «manque d’initiative».

«Ce sont les systèmes de vigie et d’alerte qui n’ont pas fonctionné, ce n’est pas un manque de ressources, ce n’est pas en raison du fait que ces organisations n’ont pas les politiques et les procédures en place. Ils ont tout; mais le système de vigie et d’alerte, dès de départ, n’a pas fonctionné», a-t-il expliqué en conférence de presse.

Selon l’enquêteur, le ministre des Transports, Laurent Lessard, n’aurait pas pu en faire davantage puisque les informations ne s’étaient pas rendues jusqu’à lui. Même en voyant les images à la télévision ce soir-là, «il aurait été impossible pour le ministre de faire quoi que ce soit», a estimé M. Gagné.

«Les gestionnaires du ministère ont tardé à être informés et lorsqu’ils ont été informés, il ne s’est rien passé», a-t-il expliqué.

«L’information ne s’est jamais rendue là, et même si elle s’était rendue là, on voit mal au fond comment le déneigement, de façon pratico-pratique, les choses auraient pu se faire», a-t-il ajouté.

Selon M. Gagné, c’est à la base qu’il y a eu des lacunes, mais c’est d’abord un problème de «système» et pas d’individus en particulier.

«Il ne s’agissait pas ici de donner une liste de noms: est-ce qu’untel est plus coupable qu’untel? C’est un système qui n’a pas fonctionné», a-t-il martelé, ajoutant que cela ne «servirait absolument à rien» de pointer les coupables.

Problèmes d’organisation et de communications

Le Centre intégré de gestion de la circulation (CIGC) du MTQ, qui était responsable de surveiller la situation sur les routes, avait six employés au travail ce soir-là, ce qui est normal pour l’organisme. Mais c’était manifestement trop peu pour gérer une telle crise, d’autant plus qu’il n’y avait aucun responsable sur place.

Le CIGC était donc débordé ce soir-là, et n’arrivait pas à dresser un bon portrait de la situation puisque les travailleurs du MTQ étaient surchargés sur le terrain et que les caméras de surveillance ne leur permettaient pas de bien savoir ce qui se passait.

Des messages ont été envoyés aux responsables, mais en vain, et il a fallu attendre aux petites heures de la nuit pour que les autorités interviennent.

Du côté de la SQ, l’un des agents responsables était lui-même pris sur l’autoroute 13 et la visibilité nulle ne lui permettait pas de bien apercevoir l’état de la route.

D’autre part, le Centre de gestion des appels (CGA) de la SQ Mascouche avait ouvert un dossier sur la situation avec le libellé: «Collision matérielle», ce qui n’est pas assez grave pour déclencher une alerte sur les appareils téléphoniques des policiers.

M. Gagné recommande ainsi de procéder à une «revue exhaustive» de l’organisation au Centre intégré de gestion de la circulation.

Il demande aussi de privilégier les appels téléphoniques plutôt que les messages textes, qui ont été largement utilisés par les autorités pendant la tempête — un moyen qui ne permet pas de détecter si le message a été lu ou non.

Il suggère également au MTQ de se doter d’un système de catégorisation des tempêtes et d’établir un plan d’action selon le niveau de gravité.

Rapport Doré

Un autre rapport qui avait été commandé quant aux événements du mois de mars — celui-ci pour analyser la sécurité civile au sein du ministère des Transports — a été publié vendredi.

Le document, beaucoup plus technique, a été rédigé par le professeur de gestion en risques majeurs à l’UQAM Michel C. Doré, qui a été assisté d’Ursule Boyer-Villemaire, spécialiste en gestion des risques et en adaptation en changements climatiques.

Le rapport note «la nécessité pour le ministère d’améliorer sa capacité à répondre aux prochains événements exceptionnels afin d’optimiser sa contribution à une société québécoise résiliente aux catastrophes de toutes natures».

«Les accidents, tous modes de transport confondus, les risques géomorphologiques, les changements climatiques et les menaces terroristes justifient une révision stratégique de la culture de gestion des risques et de la sécurité civile au ministère», est-il écrit en conclusion.

Les principaux intervenants prennent acte du rapport

Le ministre Laurent Lessard a parlé d’un rapport «accablant» et a assuré que son ministère reconnaissait sa responsabilité dans la crise. «Comme ministre, j’ai la ferme volonté de m’assurer que nous retenions des leçons précises et concrètes de cette crise», a-t-il déclaré dans un communiqué.

«J’entends mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour améliorer la capacité d’intervention du ministère en situation d’urgence afin qu’une telle situation ne se reproduise plus», a-t-il ajouté.

La SQ a rappelé qu’elle avait déclenché une enquête interne et mis en place des mesures additionnelles à la suite des événements.

«La Sûreté du Québec procédera maintenant à une analyse rigoureuse du rapport de M. Gagné, afin de voir si des éléments qui y seraient identifiés pourraient avoir une incidence sur l’enquête administrative en cours. La Sûreté du Québec poursuit son enquête et pourrait introduire de nouveaux processus ou amélioration», a indiqué le corps de police.

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