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L’Allemagne s’enfonce dans une crise politique teintée par l’extrême droite

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Annegret Kramp-Karrenbauer quittera son poste de présidente dans quelques mois, le temps de trouver un successeur. Photo: Sean Gallup/Getty Images
Rédaction - Agence France-Presse

L’Allemagne s’est enfoncée lundi un peu plus dans la crise politique déclenchée par l’extrême droite, avec le retrait de la dauphine d’Angela Merkel et une interrogation croissante: la chancelière elle-même pourra-t-elle aller au terme de son mandat?

L’un des proches de la chancelière, le ministre de l’Économie Peter Altmaier, a parlé d’une «situation extrêmement grave» pour le parti conservateur allemand d’Angela Merkel, l’Union chrétienne-démocrate (CDU).

«Il en va de notre avenir», a-t-il dit. La dirigeante des écologistes a elle parlé d’une «situation dramatique» pour le pays.

Alliance inédite avec l’extrême droite

En cause: les effets collatéraux de la crise politique provoquée la semaine dernière par une alliance inédite scellée entre droite modérée et extrême droite de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) afin d’élire le dirigeant de la région de Thuringe.

Les élus locaux CDU de cet État régional de l’ex-RDA se sont ainsi affranchis des consignes de leur direction nationale. Mais ont surtout brisé un tabou politique dans l’Allemagne d’après-guerre: le refus de toute coopération avec la droite radicale de la part des autres partis traditionnels.

Affaiblie, accusée depuis plusieurs jours de ne pas tenir son mouvement, la présidente du parti, Annegret Kramp-Karrenbauer, en a tiré les conséquences lundi.

Celle qui est surnommée par ses initiales AKK a annoncé qu’elle ne briguait plus la succession d’Angela Merkel lors des élections législatives. Elles devraient avoir lieu au plus tard fin 2021. Elle a également annoncé quitter son poste de présidente dans quelques mois. Temps pour le parti de trouver un successeur, qui sera en même temps candidat à la chancellerie.

Elle a justifié son geste par la tentation d’une frange de son parti de coopérer l’Alternative pour l’Allemagne (AfD). Un mouvement anti-migrants et anti-élites.

«Une partie de la CDU a une relation non clarifiée avec l’AfD», a dit la ministre de la Défense lors d’une réunion interne, selon un participant. Le parti a en effet échoué à faire complètement rentrer dans le rang sa fédération rebelle de Thuringe.

Le mouvement est en effet de plus en plus tiraillé entre adversaires et partisans d’une coopération avec l’extrême droite, notamment dans l’ex-RDA où cette dernière est très forte et complique la formation de majorités. La Thuringe pourrait être ainsi ingouvernable pendant des mois.

Revers majeur pour le parti

«Je crains que ce qu’il s’est passé en Thuringe se passe dans quelques années au niveau national», a indiqué un élu CDU, Wolfgang Bosbach, à propos de l’alliance entre droite modérée et radicale.

Le départ annoncé d’AKK constitue un revers majeur aussi pour Angela Merkel. La chancelière avait placé en orbite cette femme partageant peu ou prou le même cap politique modéré.

«Il est possible que la fin de la chancelière se rapproche», juge le quotidien Süddeutsche Zeitung, alors que le dernier mandat en cours d’Angela Merkel, entamé en 2018, est rythmé par des crises incessantes, au sein de sa fragile coalition avec les sociaux-démocrates ou à l’intérieur de son propre parti.

«La question de savoir combien de temps encore elle restera en poste devrait dépendre de qui va être nommé comme président du parti (CDU) et candidat à la chancellerie», dit-il.

Si un rival en interne de la chancelière et de sa politique devait être porté dans les prochains mois à la tête de la CDU, il lui serait difficile de se maintenir jusqu’au bout.

Le départ annoncé d’AKK laisse notamment le champ libre à la CDU à ennemi juré d’Angela Merkel: Friedrich Merz.

Tenant d’un coup de barre à droite pour récupérer une partie des électeurs partis pour l’AfD — après le cap centriste mené par Angela Merkel au pouvoir ces dernières années — ce dernier n’avait déjà été battu que d’un cheveu pour la présidence du parti en décembre 2018.

Il vient récemment de renoncer à son emploi controversé pour un fonds d’investissement et de se dire disponible. Et il peut compter sur la quasi-rébellion en cours de l’aile la plus à droite de la CDU.

«J’ai le sentiment que cela ne va pas durer longtemps. Il y aura bientôt des élections», pronostique l’ancien ministre social-démocrate Sigmar Gabriel.

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