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2018, une autre année de crises migratoires à prévoir

Migrants from Syria walk towards a refugee camp at Kokkinotrimithia, outside of the capital Nicosia, in the eastern Mediterranean island of Cyprus, on Sunday, Sept. 10, 2017. Cyprus police say a 36-year-old man has been arrested for allegedly driving one of a pair of boats that brought 305 Syrian refugees to the island's northwestern coast. (AP Photo/Petros Karadjias) Photo: The Associated Press

Mon souhait pour l’année 2018: pour un pacte global et juste de la migration internationale.

Selon le rapport de ACAPS¹, l’année 2018 s’annonce pire encore que l’année 2017 en matière de crises migratoires. Les crises dans six pays (Éthiopie, Irak, Nigéria, Palestine, Soudan et Syrie) vont demeurer critiques sans nécessairement s’aggraver, prévoit le rapport. Par contre, le rapport documente douze autres crises qui risquent de s’aggraver en 2018. Six sont en Afrique (Centrafrique, République Démocratique du Congo, Libye, Mali, Congo, Somalie et Soudan du Sud). Les autres pays en crise sont l’Afghanistan, le Bangladesh, le Myanmar, le Yémen et le Venezuela. À cette liste, il faudra peut-être rajouter l’Iran où se déroulent présentement d’importantes révoltes sociales.

Il n’est plus possible de faire face aux nombreux déplacements forcés de population dus à ces crises politiques et sociales avec les outils développés au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale. Nous assistons à une nouvelle réalité migratoire mondiale gérée avec des outils provenant d’un autre siècle. Il est grand temps de renouveler nos approches et nos perceptions. Il ne s’agit pas uniquement de solidarité et d’humanitarisme mais aussi et surtout de respect des droits fondamentaux des populations prises dans l’engrenage de la fuite. Les défis sont globaux, les réponses doivent être globales.

Que faire alors? Voici mes souhaits pour 2018.

1. Il faut d’abord cesser de considérer les migrants et les migrantes comme des menaces à la sécurité. L’obsession sécuritaire fausse complètement les réalités migratoires et les mesures restrictives et répressives mises de l’avant pour «contrôler» les flux migratoires donnent une fausse impression de sécurité. En plus d’être inefficaces, ces mesures mettent en danger de nombreux migrants qui se retrouvent souvent aux prises de réseaux maffieux.

2. Il faut revoir la définition de la migration de refuge. La définition prévue dans la Convention de Genève de 1951 ne correspond plus au monde actuel et s’avère trop restrictive dans un nouveau contexte mondial où les migrations de fuite augmentent en fonction des nombreux conflits violents. Il faut substituer la notion de persécution individuelle par celle de migrations forcées.

3. Il faut éliminer les nombreuses mesures qui contournent de façon hypocrite le principe de refoulement, que ce soit en interceptant les migrants avant leur arrivée aux frontières ou en signant des accords avec des pays tiers qui ne sont pas sécuritaires. On pense entre autres aux accords de l’Union Européenne avec la Libye où de nombreux reportages ont dénoncé l’exploitation, voire la mise en esclavage des migrants africains.

4. Il faut cesser de considérer les migrants comme des criminels potentiels et mettre fin à la détention comme outil de gestion et de dissuasion contre les migrants.

5. Il faut miser sur les nouveaux pactes migratoires prévus dans la Déclaration de New York qui ouvre la voie à deux nouveaux traités mondiaux en 2018: le Pacte mondial sur les réfugiés et le Pacte mondial pour les migrations sûres, ordonnées et régulières². Il est à souhaiter que les États membres des Nations unies ne se dérobent pas encore une fois de leurs responsabilités internationales et qu’ils adoptent un nouveau cadre permettant de mettre en place une véritable politique migratoire mondiale axée sur les droits des migrants et des migrantes.

À ce sujet, je rappelle les objectifs qui ont été soumis au Conseil des droits de l’Homme des Nations unies en juin 2017 par François Crépeau en tant que rapporteur spécial sur les droits des migrants pour les Nations unies. Les objectifs proposés constituent l’agenda à poursuivre en vue d’aboutir à des politiques migratoires qui facilitent la mobilité dans le respect des droits de la personne. Ce rapport propose entre autres aux États:

  • d’offrir des solutions migratoires qui soient régulières, sécuritaires, accessibles à tous les migrants, quel que soit leur statut ou leur niveau de qualification;
  • d’assurer pour les migrants l’accès à la justice et aux services de base, incluant l’éducation et la santé;
  • de protéger les migrants contre toute forme de discrimination et de violence, incluant le racisme, la xénophobie, la violence sexuelle et les propos haineux.

Comme l’a affirmé Louise Arbour, la représentante du Secrétaire général pour les migrations et responsables de l’élaboration du Pacte migratoire, il est temps de changer notre discours sur la migration car la réalité migratoire est beaucoup plus positive que la perception que l’on en a. Il est grand temps de mettre en place des modèles de coopération qui vont diminuer la migration irrégulière et augmenter les voies légales de la migration³.

Ces vœux peuvent paraître utopiques. Pourtant, l’urgence d’agir est là.

***

[1] ACAPS,  «Humanitarian Overview: An Analysis of Key Crises into 2018», 30 septembre 2017.

[2] La Déclaration de New York a été adoptée le 10 septembre 2016 lors du Sommet des Nations Unies sur les réfugiés et les migrants.

[3] James Bowen, «Changing the Narrative on Migration», International Peace Institute (IPI), Global Observatory, 18 septembre 2017.

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