Affaire Merah: l’identité meurtrière?
«Je suis fière de mon frère. Il a combattu jusqu’au bout. Je l’ai dit au flic. Il m’a posé la question et j’ai répondu : “Qu’est-ce que tu penses des moudjahidines?” Je pense du bien des moudjahidines. “Qu’est-ce que tu penses de Ben Laden?” Je pense du bien de Ben Laden.»
Dans un documentaire-choc de M6 – une chaîne de télévision privée française –, celle qu’on voit toute voilée de noir en train de crier sa rage et sa haine est Souad, la sœur de Mohamed Merah, le tueur au scooter qui a semé la terreur à Toulouse le printemps dernier. Au lendemain de cette diffusion, la France a replongé dans l’effroi. De là à légitimer l’islamophobie ambiante?
Certes, la cavale meurtrière de Mohamed Merah visait l’armée et des juifs de France. Toutefois, les trois premières victimes du tueur au scooter ont été trois militaires français d’origine maghré-bine : Imad Ibn Ziaten, musulman d’origine marocaine, Abel Chennouf, catholique d’origine algérienne, Mohamed Legouad, musulman d’origine algérienne.
Comme d’autres parents des victimes, Latifa Ibn Ziaten, la maman voilée de Imad, a dénoncé les mots barbares de Souad Merah :
«Des paroles comme ça, ce n’est pas normal, c’est injuste. Si ces gens ont du respect identitaire, ils ne doivent pas parler. Qu’ils laissent les morts en paix et leurs parents faire leur deuil», a-t-elle déclaré, la gorge nouée, à France Télévisions.
Bien plus, celui qui a enregistré les propos de Souad à son insu est Abdelghani, l’aîné des Merah, qui est en rupture avec sa famille et qui dénonce l’attitude de ses proches.
Le Conseil français du culte musulman a dénoncé fermement ces propos, qu’il a jugés ignobles et choquants. La même journée, des imams français se sont recueillis à Jérusalem sur les tombeaux des victimes juives de Mohamed Merah. Pour l’imam de Drancy (Seine-Saint-Denis), Hassen Chalghoumi, la condamnation morale des propos de Souad Merah ne suffit pas. Il faut passer par la justice, parce que cette femme a fait appel à la haine et soutient les criminels.
L’enquête de la chaîne M6 a reconstitué la vie de Mohamed Merah pour expliquer comment il a basculé dans le terrorisme. Ce documentaire nous montre comment l’enfant Merah est devenu un cocktail explosif canalisé par les salafistes pour en faire une arme. Ici, l’islam n’est qu’un prétexte qui dissimule le véritable motif de l’action du terroriste : se venger de la société, la «source» de tous ses maux.
Le schéma est partout pareil dans les ghettos de notre planète. Famille éclatée avec un père absent et une mère dépassée par le poids des responsabilités. Résultat : des enfants abandonnés, frustrés et indisciplinés, à la scolarité dégradée. Ils deviennent imprévisibles, violents et abandonnent l’école pour plonger dans la délinquance, puis la prison.
Sous d’autres cieux, Mohamed Merah, le jeune déculturé, aurait emprunté le parcours type d’un membre de gang de rue pour donner un sens à sa vie. En France, l’endoctrinement salafiste étant fréquent dans certaines prisons, Merah n’y a pas échappé, jusqu’à la mort.
D’autres détails et la vidéo:
Mohamed Merah: itinéraire d’un terroriste français
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