Afghanistan : dix ans d’occupation pour rien!
La guerre ne mène à rien. Le cas de l’Afghanistan en est la preuve criante. Après dix ans d’occupation, l’Oncle Sam est sur le point d’entamer des négociations directes avec les talibans avant de leur transférer un pays meurtri. Tout ça pour ça?
Pour 2011, les chiffres sont effarants. La guerre contre le terrorisme lancée en Afghanistan par George W. Bush aura coûté plus que 1 250 G$, et a fait au moins 300 000 morts, dont plus de 120 000 civils.
Hélas, dix ans après avoir envahi l’Afghanistan, les États-Unis ont découvert l’amère réalité : sans les talibans, il n’y aura pas de paix là-bas! Alors, ils ont décidé de quitter ce brasier pour éviter un enlisement comme celui du cauchemar vietnamien. La coalition internationale qui compte quelque 130 000 militaires, pour la plupart des Américains, va définitivement plier bagage à la fin de 2014. Pourtant, la situation sur le terrain est catastrophique. Le pouvoir du président Hamid Karazai ne dépasse pas la zone verte ultra sécurisée de Kaboul, la capitale. Ailleurs, les talibans grignotent de plus en plus d’espace et de localités. Ils claironnent carrément leur retour inéluctable.
En effet, les experts des questions militaires font un constat catastrophique du bilan de cette décennie d’opérations de guerre occidentales sous la houlette des États-Unis. La défaite se voit comme le nez au milieu du visage afghan.
La crainte de voir l’Afghanistan sombrer une autre fois dans un chaos propice à la prolifération des troupes djihadistes, et donc, à la résurrection d’Al-Qaïda, les États-Unis se sont résignés à considérer le climat favorable à des prises de contacts indirects avec les talibans.
Cette année, le Qatar a financé l’ouverture du premier bureau de liaison des talibans à l’étranger. Fin janvier, des émissaires américains et des représentants des talibans se sont rencontrés afin de lancer les préliminaires d’une négociation de paix. En février 2012, le président afghan, Hamid Karzai, a confirmé que son gouvernement est associé aux discussions engagées entre les États-Unis et les talibans destinées à ouvrir des négociations de paix. Depuis, le dossier traîne!
Certes, on s’est mis d’accord sur une entente initiale. Les talibans ont accepté trois conditions : arrêter leurs attaques contre les civils, rompre tout lien avec Al-Qaïda en Afghanistan et au Pakistan et respecter la Constitution afghane. Mais les négociations ont achoppé sur des modalités pratiques à gérer avant l’ouverture des contacts directs. Les talibans ont notamment demandé la libération de leurs prisonniers de Guantanamo ou encore l’indemnisation des familles de victimes d’attaques de la coalition.
Du coup, ces pourparlers préparatoires tirent en longueur. Depuis cet été, les choses semblent bouger. Le mois d’août dernier, dans une dépêche de l’AFP, le chef suprême des talibans, le mollah Omar, a confirmé être ouvert à des négociations avec les Américains, dans un message publié à l’occasion de la fête musulmane marquant la fin du mois de jeun du ramadan. En octobre dernier, le chef de la commission électorale afghane, Fazel Ahmad Manawi, a laissé entendre que les talibans pourront présenter des candidats à la prochaine présidentielle, le 5 avril 2014. Et tout récemment, le Pakistan a libéré des prisonniers talibans.
Pour accélérer le processus, le Qatar a repris l’initiative. Dimanche dernier, il a organisé un forum pour relancer le processus. Une conférence animée par des diplomates et des universitaires d’Europe, des États-Unis et d’Afghanistan, dont des talibans. Ils discutent les perspectives, les obstacles et les défis du dialogue entre les talibans et l’Oncle Sam. 300 000 morts après, retour à la case départ!