Richard le Grand
Richard Garneau nous a quittés abruptement. Aussitôt, l’émotion et les hommages ont fusé de toutes parts. La preuve qu’on est collectivement orphelins d’un personnage marquant.
Je n’ai pas connu personnellement le grand Richard. Je l’ai croisé à l’occasion dans les longs couloirs de la grande tour de Radio-Canada. Beau, très grand et élancé comme un jeune premier au geste fluide. On dirait que la pesanteur n’avait pas d’effet sur sa démarche. Il avait l’air de surfer sur une vague avec grâce. Impressionnant!
Tout à l’opposé de ces grosses têtes enflées par un succès éphémère, Richard Garneau avait un sourire réservé, mais convivial. Il le distillait généreusement aux gens qu’il lui arrivait de croiser. Il mettait humblement les gens à l’aise, car il avait la timidité de hocher la tête en donnant l’impression à son vis-à-vis d’être un ami. Furtivement, on se sentait à la maison parmi les siens. La classe!
Certes, je n’ai pas eu la chance de grandir avec Richard Garneau comme commentateur de La soirée du hockey, un privilège partagé par des millions de mes compatriotes. Toutefois, j’ai eu un réel plaisir à le découvrir grâce à sa lecture des nouvelles du sport, le samedi matin, avec Joël Le Bigot, à la première chaîne de la société d’État.
Je m’abreuvais de ses analyses du Tour de France au Canal Évasion. Et le summum de son art, je l’ai goûté avec admiration lors des Jeux olympiques, ceux de Pékin sur les ondes de Radio-Canada et ceux de Londres à RDS. Quelle que soit l’épreuve qu’il décrivait, on avait l’impression d’être dans le feu de l’action.
Dans mon livre à moi, quand vous tripez sur le sport et ses méandres, vous êtes mon ami. Si vous êtes fou de joie à l’idée de suivre toutes les épreuves des JO avec la fascination d’un gamin dans un magasin de jouets, vous êtes un proche. Et quand vous êtes un passionné d’athlétisme, surtout des épreuves du demi-fond, alors là, vous êtes un membre à part entière de mon clan. Pour tout vous dire, quand les médias ont annoncé la mort de Richard Garneau, c’est un membre chéri de ma famille d’adoption qui est parti.
Sur la forme et sur le fond, Richard Garneau, l’homme humble, était sur le toit du monde du journalisme sportif par sa rigueur, la qualité de son français, sa facilité d’élocution, son éloquence incomparable et la justesse de ses descriptions.
Notre vie se résume à trois gestes : on ouvre une porte pour entrer, on traverse un couloir et on ouvre une autre porte pour tirer notre révérence. Certains ne font que passer, d’autres saccagent le couloir, alors qu’une minorité, à l’image de Richard Garneau, marque cette traversée par son génie et sa grande humilité!
Les opinions exprimées dans cette tribune ne sont pas nécessairement celles de Métro.