Mal parti

On se calme. Depuis la publication d’un ballon d’essai sur la Charte des valeurs, l’opinion publique s’enflamme. Pourtant, on le sait, s’il y a un sujet qui doit être traité avec soin, c’est bien celui de la neutralité de l’État. Si le débat sur les accommodements s’était enflammé en 2007, le ton s’était apaisé durant les travaux de la commission Bouchard-Taylor. La façon de faire a d’ailleurs été citée comme modèle dans le monde.

Malheureusement, c’est bien mal parti. En lançant un ballon pour tester une approche, le gouvernement a manqué l’occasion d’introduire sa proposition en faisant preuve de pédagogie. Définir la neutralité de l’État n’est pas une mince tâche, particulièrement en contexte de gouvernement minoritaire. Ce dossier exige du doigté et un dosage difficile à trouver.

La sortie de Bernard Drainville, à l’entrée du conseil des ministres hier, aurait dû être faite avant. Car son éclairage est nécessaire pour comprendre la démarche qu’il souhaite amorcer. Le ton utilisé par le ministre ne reflète pas le débat qui a prévalu au cours des derniers jours. Il parle d’un équilibre qui respecte les droits et les valeurs. Il dit être à la recherche du plus large consensus, tant dans la population qu’au parlement. Mais c’est bien mal parti. Il aura fort à faire pour rectifier le tir, pour modifier la première impression qu’a laissée la fuite du début de semaine.

Cinq ans après la publication du rapport Bouchard-Taylor, le commissaire Gérard Bouchard se disait déçu de constater que bien peu de choses avaient changé. Parmi ses 37 recommandations, bien peu ont été mises en application. Il souhaitait, entre autres, un livre blanc sur la laïcité, la promotion de l’interculturalisme et une meilleure intégration des immigrants.

Sans nécessairement poursuivre les mêmes objectifs, les Québécois aussi sont restés sur leur appétit. Dans un sondage publié le printemps dernier, 75 % de la population souhaitait voir un encadrement afin qu’une meilleure cohésion sociale soit assurée.

Depuis Bouchard-Taylor, des gestes ont bien été posés. Le parlement a voté à l’unanimité pour le projet de loi 63 qui visait à modifier le préambule de la Charte afin de garantir également aux femmes et aux hommes les droits et libertés. Le gouvernement Charest a aussi déposé le projet de loi numéro 94 pour établir de nouvelles balises afin d’encadrer les demandes d’accommodement, sans pourtant jamais le faire adopter.

Si le gouvernement du Parti québécois veut faire avancer le débat, il doit pouvoir y faire face sans partisanerie. La sensibilité du sujet, comme le statut minoritaire du gouvernement, exige que l’on traite le sujet avec soin. Bernard Drainville aura maintenant la difficile tâche de corriger le tir.

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