La vicieuse
École primaire. Saint-Damien-de-Brandon. Dans nos plus que nombreux déménagements, nous nous sommes posés un an et demi dans cette campagne éloignée de Lanaudière. C’est aussi creux que le nom l’indique. Le transport en commun c’est le pouce, puis le maire c’est aussi le pompier, genre. J’y ai traversé ma deuxième année, et un bout de ma troisième. En début de troisième, à la rentrée, une nouvelle élève nous a été présentée. Myriam. Elle marquera ma vie, et celle de plusieurs garçons, à jamais.
Contexte. Troisième année, on a huit ans. J’avais déjà embrassé, même frenché. Ouin, dans la cour d’école y’avait des grosses roues de tracteur debout dans lesquelles on allait se cacher pour faire des niaiseries. Dans mon souvenir, c’est là que j’ai frenché pour la première fois… dans un tire. Don Juan de Michelin. Mais mon expérience avec les femmes s’arrêtait pas mal là. Parfois, tard le soir, je pognais des bouts d’Emmanuelle qui se faisait zigner la cuisse (les angles de pénétrations étant toujours scientifiquement impossibles) mais, comme j’ai dit, mon expérience restait de base.
Puis est arrivée Myriam. Elle venait de la ville, la grande, Montréal. Tout de suite on sentait qu’elle était différente. Qu’elle avait vécu. Elle avait sûrement déjà bu de la liqueur passé minuit, volé une gomme Bazooka au dep, dormi sans pyjama. Une femme, tsé. Tout de suite, elle s’est imposée comme une leader dans la classe; ce que Myriam proposait, ça se passait. Un jour, Myriam propose de jouer à la tague…
On avait dans la cour, en plus des absurdes énormes roues de tracteur, un module avec glissade, blocs pour grimper, corde, etc. Le classique. Myriam propose qu’on joue à la tague montée, mais avec une twist. Les filles courent après les gars, et quand une fille touche un gars… elle l’amène sous le module, à «l’abri» des regards, et… lui tâte le paquet. Yes. La conséquence de se faire toucher le dos… c’était se faire toucher le pénis. Peux-tu te dire que les gars… on courait pas vite! «Ah maudit! Tu m’as touché! J’t’assez « déçu »!» C’était pas siiii sexuel comme tâtage. C’était plus tâtage de pamplemousse voir si y’est frais… Mais reste que… Elle avait introduit le vice, le plaisir de la chair, la Grèce antique, l’Amazone! Elle avait dévergondé toute une classe! Tout le monde jouait. Sauf une.
La timide.
Une récré, alors qu’on s’adonne tout bonnement à notre tague extra BBQ, la timide arrive, avec à ses côtés la surveillante. La pas très svelte Mme Choquette. Sur son visage, on peut lire la colère, la consternation, l’indignation, L’Église catholique, le sacerdoce, et un Joe Louis qui n’a pas passé. Tous les parents allaient être mis au courant.
C’était une mort annoncée. Mais… pas pour moi. On a déménagé avant que le message se rende chez nous. J’ai remercié Jésus, Boudha, Bibi, Boombo, Optimus Prime et Tony le Tigre, puis j’ai fui les vicieuses pour toujours! Toujours étant… arrive secondaire 1.