Quatre ans de prison pour le propriétaire d’un pitbull coupable de négligence criminelle
MONTRÉAL — Le propriétaire d’un pitbull qui a défiguré une fillette dans un parc de Brossard en 2015, Karim Jean Gilles, a écopé d’une peine de quatre ans de pénitencier.
Cette peine «sévère» a été imposée par le juge notamment pour sanctionner «sa culpabilité morale très élevée» et aussi afin de dénoncer et dissuader les crimes commis contre des mineurs, surtout que dans ce cas, la victime n’avait que sept ans, a souligné le juge Pierre Bélisle, de la Cour du Québec, dans sa décision rendue vendredi matin au palais de justice de Longueuil.
Selon lui, il s’agit d’un cas de «négligence grossière et extrême».
L’homme avait été reconnu coupable le 22 février dernier de négligence criminelle ayant causé des lésions corporelles.
La procureure de la Couronne, Claudie Gilbert, avait demandé une peine de pénitencier de trois ans, mais le magistrat a jugé bon d’en imposer une plus lourde encore. Le maximum pour ce crime est de 10 ans d’emprisonnement.
«Je crois, qu’effectivement, il (le juge) a voulu rendre une sentence exemplaire et transmettre un message clair à M. Jean Gilles» et à ceux qui seraient tentés d’agir comme lui, a commenté Me Gilbert après le jugement.
En lisant sa décision vendredi, le juge Bélisle a tiré une conclusion plutôt rare: «il n’y a aucune circonstance atténuante susceptible d’alléger sa peine».
Karim Jean Gilles, qui s’est représenté seul, n’avait pas fait de suggestions pour sa peine, ni témoigné à son procès.
Quant aux facteurs aggravants, ils sont nombreux, selon le juge Bélisle: les nombreux antécédents judiciaires de l’homme — le juge a compté des condamnations pour 23 infractions — et les importantes blessures subies par l’enfant, sans oublier ses séquelles sérieuses et permanentes.
«L’absence de prise de conscience à l’égard de la nature et de la gravité de l’infraction commise montre sa dangerosité et laisse présager un risque de récidive», a écrit le juge. Bref, il estime que toutes les circonstances de cette affaire «militent en faveur d’une peine sévère de privation de liberté» pour l’isoler de la société.
M. Jean Gilles va purger ces quatre années de prison après la peine de 28 mois pour laquelle il est actuellement incarcéré, pour voies de fait contre un policier. Il devait être admissible à la libération conditionnelle en juillet. Ses quatre années additionnelles pourraient donc commencer à ce moment.
Alors qu’il avait été silencieux tout au long de la lecture du jugement sur la peine, il a déclaré à la toute fin qu’il faisait appel du jugement. Puis il a demandé au juge d’un ton provocateur s’il se trouvait actuellement en Cour municipale. Se faisant dire non, il a lancé au juge que l’infraction pour laquelle il a été jugé était une infraction municipale. Le juge a secoué la tête, ce qui a fait dire à Karim Jean Gilles: «vous n’êtes pas au courant!», avant de lui lancer «vous devriez peut-être lire» et de se faire escorter à l’extérieur de la salle de cour.
Me Gilbert a indiqué ne pas avoir été informée d’un appel du verdict. De plus, il est trop tard, a-t-elle souligné.
Catastrophe annoncée
Dans sa décision, le juge Bélisle a déclaré «qu’on ne parle pas ici d’un accident de parcours, mais d’une conduite répétée qui persiste depuis plusieurs années».
«Bref, la table était mise pour une catastrophe. Le problème n’était pas tant de savoir si la tragédie se produirait, mais quand elle surviendrait.»
Selon le magistrat, Karim Jean Gilles a démontré une «insouciance déréglée» envers la sécurité de ses voisins en omettant de munir ses chiens de colliers et de laisses lorsqu’ils étaient à l’extérieur, en ne clôturant pas sa propriété de façon adéquate pour empêcher que ses chiens ne s’échappent, et en laissant les deux chiens à sa mère, qui n’avait pas la capacité physique de les maîtriser. Tout cela alors qu’il savait que ses chiens étaient agressifs.
Le 20 septembre 2015, la petite Vanessa Biron s’était rendue au parc Marquise de la ville de Brossard avec sa soeur de cinq ans et sa mère. C’est là qu’elle a été attaquée par le pitbull de Karim Jean Gilles, pendant que son autre chien tournait autour d’elle en grognant et en jappant.
Vanessa a notamment subi des blessures au visage, en plus d’une fracture au crâne et à une main. Les muscles et les nerfs d’un côté de son visage ont été broyés et un os de sa joue a été fracturé en sept morceaux, a expliqué Mme Biron. Elle a une paralysie au visage, n’a plus de glandes salivaires et son canal auditif a été déchiré.
Les parents de la petite Vanessa, qui avaient assisté au procès, n’étaient pas au palais de justice vendredi.