Joaquin Phoenix: face à face avec le Joker
Joaquin Phoenix est reconnu pour s’investir pleinement dans les personnages qu’il interprète. L’acteur de 44 ans n’a pas fait exception lorsqu’est venu le temps d’interpréter le mythique rôle du Joker dans le film du même nom.
Précédé d’une rumeur favorable (le film a notamment remporté le Lion d’or au prestigieux festival de Venise), Joker prend l’affiche aujourd’hui partout en Amérique du Nord.
Le film du réalisateur Todd Phillips doit beaucoup à la performance de Joaquim Phoenix, qui s’est donné corps et âme à son rôle.
Lors de sa préparation pour le rôle, celui qui a été nommé trois fois aux Oscars a perdu tant de poids qu’il a cru devenir fou.
Et pour créer un rôle qui s’éloigne des performances inoubliables de Jack Nicholson, de Jared Leto ou de Heath Ledger dans le passé, le comédien a notamment dû apprendre à se contorsionner.
Alors que l’antagoniste de Batman a souvent été campé dans l’univers des films de superhéros, le personnage de Joaquin Phoenix s’inscrit davantage dans une ambiance de film d’horreur teintée de messages politiques.
Métro a rencontré l’acteur pour en apprendre plus sur son personnage d’Arthur Fleck, clown raté qui finit par devenir un criminel psychopathe.
Vos scènes de contorsions sont inoubliables. Comment avez-vous réussi à faire ça?
Il y a deux séquences dans le film qui sont importantes de ce point de vue là : la routine du clown et la danse. J’ai commencé à discuter avec le chorégraphe qui travaillait avec nous. J’étais vraiment intéressé par tout ce langage de la danse et du mouvement. Puis on a commencé à regarder ces vidéos et l’une d’entre elles m’a vraiment ému. J’en ai tiré toute l’arrogance du personnage. C’est là que le Joker est né.
Donc, le Joker a émergé pendant le tournage du film?
Oui. Il est né par le mouvement et par la danse. Donc, quand la musique a commencé à jouer – un morceau de violoncelle – et que j’ai commencé à bouger… Ça été très naturel. La notion de métamorphose m’intriguait beaucoup. Qui est ce gars, et comment est-il devenu ce qu’il est? C’était presque comme une danse d’interprétation.
«Je le vois comme quelqu’un qui a vécu beaucoup d’expériences traumatisantes et qui ne sait pas comment faire face au réel.» Joaquin Phoenix, acteur, à propos de son personnage d’Arthur Fleck, qui deviendra le Joker.
Comment avez-vous réagi quand on vous a proposé le rôle du Joker? Comment vous y êtes-vous préparé?
Quand on m’a approché avec le rôle je me suis dit : «Je ne peux pas croire que je vais faire ça.» J’ai toujours pensé qu’il y avait une occasion d’explorer ce genre de personnage plus en profondeur. Je n’ai pas vu ça dans d’autres films de superhéros. J’ai rencontré le réalisateur et il m’a montré la vidéo d’une personne en plein fou rire. Ce rire était presque douloureux à écouter pour Todd [le réalisateur]. Je me suis dit que c’était une manière intéressante d’aborder le personnage. Je n’avais jamais pensé au Joker de cette façon.
Et est-ce que vous avez lu le comics?
Quand on a commencé à faire des recherches, je me suis dit que je voulais faire les choses à ma manière. Je ne voulais pas être trop influencé par les comics. J’ai essayé d’appréhender le personnage du Joker de l’intérieur, en tant qu’homme et non comme le superméchant iconique que tout le monde connaît. J’ai senti que je pouvais être assez
libre dans mon interprétation du personnage.
Est-ce que ç’a été difficile de trouver le bon rire?
La deuxième fois que j’ai rencontré Todd, je lui ai demandé d’écouter et d’analyser mon rire. Il est venu chez moi et s’est assis dans le canapé. Ça m’a pris plusieurs minutes pour trouver ce rire. Je ne voulais pas forcer, il fallait que ça ait l’air naturel dès la première minute. À un moment donné, Todd a commencé à être vraiment mal à l’aise. C’était bizarre. C’était important pour moi de pouvoir faire ça. Et pour être honnête, c’était plus difficile que j’avais cru. J’ai essayé de nouveau et j’ai eu du mal. J’ai senti qu’il y avait du potentiel et ça m’a pris encore quelques semaines de tournage pour y arriver.
On dit que le rire est contagieux… mais le vôtre ne l’est pas du tout!
Pourtant, quand je l’ai vu, c’était contagieux. (Rires) On sent la douleur du personnage dans ce rire. Et il y a cet autre rire, presque faux. C’est une chose qu’on n’avait
pas anticipée.
Ce personnage est de toute évidence très malade…
Je ne l’ai pas vraiment abordé comme un personnage malade mentalement. Il a essayé sept médications différentes. J’ai fait quelques recherches sur ce genre de traitements et leurs effets secondaires. Il n’a jamais eu la chance d’exprimer ses besoins. Je n’ai pas pu discerner quoi que ce soit chez lui qui montrerait qu’il est mentalement malade. Je pense en revanche que c’est un vrai personnage narcissique.
Est-ce que votre vision du personnage a changé?
Quand je suis entré dans la peau du Joker j’ai commencé à comprendre Arthur différemment. J’étais très content qu’on filme les scènes du Joker si tard. Todd a vraiment créé un bel espace créatif qui laissait place à l’erreur et à la découverte. C’était génial d’avoir le temps de développer ce personnage. On a découvert beaucoup de choses sur le Joker pendant le tournage.